Comprendre le cas Khadafi : Le chat, le rat et le rapace

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Le chat est un mammifère carnivore. Qu’il appartienne aux espèces domestiques ou sauvages, le chat se nourrit aussi de chair de rat comme plat de résistance préféré.

Le rat, étant un mammifère rongeur très nuisible, vit souvent caché dans des égouts et des trous. Très habiles à creuser lui-même des trous dans ou autour des maisons, le rat s’alimente de plusieurs sortes de restes.

Le rapace est une espèce d’oiseau carnivore qui se sert de son puissant bec et de ses griffes solidement recourbées pour neutraliser et dévorer ses proies pendant le jour ou dans la nuit. 

Ce titre pourrait donner l’impression qu’il s’agit d’une fable sur les animaux de la jungle. Pas du tout. Mais, ces noms de bêtes sont évoqués pour faire allusion aux hommes qui, par leurs bêtises de plus en plus désastreuses, transforment plusieurs pays en jungles. Dans sa définition physique, la jungle est un espace forestier habité par des animaux sauvages. Dans son sens figuré, c’est un milieu rural ou urbain dans lequel la meilleure loi est celle du plus fort.       

Jeune capitaine très fougueux et trop ambitieux

Dans ce contexte de l’animosité urbanisée commençons par le Chat qu’incarne le  président disparu de la Libye, Mouammar Kadhafi. Cet homme dont le nom a résonné dans presque tous les coins du monde pendant plusieurs décennies, est né le 19 juin 1942. Âgé de 69 ans, pendant ses 42 années de pouvoir d’État, Kadhafi n’a cessé de faire parler de lui en bien et en mal. Cet homme est issu d’une famille de Bédouins dont les moyens financiers étaient très limités. Cette famille appartient à la tribu des Kadhafa ( al Kadhafi est un nom signifiant « De la tribu des Khadafa». Mouammar a été élevé dans le désert de la région de Syrte. C’est à peine âgé de 20 ans qu’il a constitué à Sebha, zone d’influence de sa tribu, un groupe de jeunes révolutionnaires pour renverser la royauté libyenne étant inspiré par l’idéologie du Général égyptien Gamal Abdel Nasser. À cause de cet objectif politique, il a été exclu de l’école de Sebha en 1961. Avec courage, il a étudié le droit à l’Université de Libye avant d’entrer à l’académie militaire de Benghazi pour ensuite apprendre le métier des armes en 1965 pendant près d’une année au British Army Staff College. Kadhafi retourne en Libye en 1966 avec le grade d’officier.

 

 

Mouammar n’avait que 27 ans quand il renversa, le 1er septembre 1969, le roi Idris 1er qui, âgé de 80 ans, était

 

hospitalisé en Turquie. Ce jeune révolutionnaire président très fougueux et trop ambitieux a opéré de grands bouleversements sociopolitiques et surtout économiques en Libye, en Afrique et même dans le monde. D’abord, il change de grade : Du Capitaine au Colonel et déclare la « révolution du peuple». En 1977, il change le nom du pays : De la République arabe libyenne en Jamahiriya arabe libyenne populaire et socialiste. Jamahiriya signifiant : État des masses. Il instaure alors des « comités révolutionnaires ».

Kadhafi, qui est, à la fois, solidaire et autoritaire, ne laisse personne indifférent à l’extravagance de ses habillements et comportements. Le Colonel président libyen a prôné farouchement le panarabisme, le panafricanisme et surtout l’expansionnisme. Dès après son accession forcée au pouvoir, il a ordonné d’abord à l’armée britannique, présente depuis treize ans, de quitter la Jamahiriya libyenne avant de mettre à la porte de son pays tous les militaires américains. C’est en 1970 que ce jeune Colonel est parvenu, pour la première fois dans le monde, a profondément changé la géopolitique du pétrole par l’imposition d’une augmentation du prix du baril de pétrole.

Le colonel belliqueux

Belliqueux, le Colonel Kadhafi a provoqué ou exacerbé plusieurs conflits armés à travers le monde, surtout en Afrique. Sans hésiter, il a annexé, en 1973, la bande d’Aozou au Tchad. Ce Tchad qui est un des principaux points d’appui de la « Françafrique». Sur le terrain se faisaient des croisades meurtrières entre tchadiens protégés par la Libye d’un côté et par la France de l’autre. Pendant la guerre entre l’Ouganda et la Tanzanie entre 1978 et 1979, Kadhafi soutient Idi Amin Dada en lui envoyant 3000 militaires qui n’ont pu éviter la défaite militaire suivi de la chute du président ougandais en avril 1979. Cette ingérence de Kadhafi a causée d’autres fortes tensions entre la Libye et la France. Au Mali aussi, Kadhafi a soutenu financièrement et matériellement la rébellion dans le nord contre les autorités maliennes.  

L’échec de la tentative de fusion entre la Tunisie et la Libye en 1974 a provoqué la dégénération des relations entre les deux pays. Mouammar Kadhafi est un homme téméraire que les pays occidentaux ont toujours soupçonné de soutenir financièrement et matériellement plusieurs organisations armées qui mènent des actes terroristes dans le monde. Après avoir fait intercepter un message de l’Ambassade libyenne à Berlin-est concernant l’implication du gouvernement libyen dans l’attentat à la bombe qui a tué plusieurs américains dans une discothèque de Berlin-ouest, le président américain Ronald Reagan a autorisé de bombarder la Libye le 15 avril 1986. Dans ce bombardement, une soixantaine de libyens sont morts dont Hannah, la fille adoptive de Kadhafi. Les pays occidentaux ont pris dès lors plusieurs sanctions économiques contre la Jamahiriya arabe libyenne.   

Mal à l’aise dans son isolement, le colonel président a commencé, au milieu des années 1990, des offensives diplomatiques vers l’Occident. Sur cette lancée, Mouammar Kadhafi a laissé dans les filets de la justice écossaise ses agents des services secrets avant de reconnaitre officiellement, en 2003, les responsabilités de ses officiers dans l’attentat de Lockerbie et celui du vol 772 UTA. Après cet aveu, il a effectué le payement d’une indemnité de 2,16 milliards de dollars aux familles des 270 victimes de Lockerbie pour obtenir l’annulation définitive des sanctions de l’ONU contre son pays. Cet adoucissement de la politique extérieur du colonel libyen a été marqué par le durcissement de sa position envers les opposants de l’intérieur à son régime.

Un président généreux

Certes, Kadhafi a toujours refusé de partager la moindre parcelle de son pouvoir mais, il a accepté avec patriotisme le partage total des richesses du pays avec tous les libyens faisant de son pays l’un des plus prospères au monde. Cette largesse de Kadhafi s’est concrétisée dans d’autres pays africains dont le Mali qui, depuis 1983, a obtenu gratuitement une télévision nationale avant de devenir un terrain privilégié d’investissement de fonds libyens.

Kadhafi est un bouillant panafricaniste dont la farouche volonté d’unification  et de solidification du continent affichée dans la « Déclaration de Syrtre » du 09 septembre 1999 a suscité la transformation de l’Organisation de l’Unité Africaine(OUA) en Union Africaine(UA) en 2002 à Durban, en Afrique du sud.  Kadhafi qui porte très souvent sur ses habits un badge représentant l’Afrique a, à son tour, assumé la présidence de l’Union africaine en 2009. Très amoureux des honneurs, il a demandé, sans aucune modestie, à ses pairs de l’appeler officiellement « Roi des rois traditionnels d’Afrique ».

Ce Roi des rois autoproclamé a écrit le «livre-vert» publié en trois parties. Dans la 1ere, il propose : La solution au problème de la démocratie. Kadhafi se penche dans sa 2eme publication sur : La solution du problème économique avant de clore par une .troisième partie contenant sa vision du monde : Les fondements sociaux de la troisième théorie universelle.

Dans cette 3eme et dernière partie, il met en exergue les liens familiaux, tribaux ou  nationaux mais soutient que la famille est la structure la plus forte et la plus naturelle. Kadhafi a fondé, à des moments différents, avec deux femmes une famille de 09 enfants.  Quelques mois après son arrivée au pouvoir, il a divorcé, en 1970, sa femme Fatiha al-Nuri. Il a eu avec celle-ci un seul fils, Mohamed Kadhafi qui était le président de l’organisme libyens des Télécommunications avant de fuir pour se réfugier en Algérie le 29 août dernier.

Safia Farkash a été la 1ere Dame de la Libye de 1970 au 29 août 2011 date de sa fuite en Algérie une semaine après la chute de son mari président de la Jamahiriya. Safia a eu avec Mouammar 08 enfants dont une seule fille qui est aussi allée, au même moment que sa mère, se protéger en Algérie.

 

 

Lentement mais sûrement vers une fin tragique

Qualifié de «Printemps arabe», le contexte de fortes désobéissances civiles contre des pouvoirs dictatoriaux a été le facteur accélérateur du déclenchement de la rébellion armée libyenne contre Kadhafi. L’instigateur de ce mouvement de bouleversement national, Moustafa Mohammed Abdel Jalil, est loin d’être un inconnu dans le milieu du pouvoir de Kadhafi.

Moustafa Abdel Jalil a vu le jour en 1952 à El Beida. C’est dans cette même ville libyenne que Jalil a commencé en 1975, dans l’anonymat politique, sa carrière comme assistant du secrétaire du Ministère Publique après l’obtention à l’université de Benghazi de son diplôme d’études de Droit et de Charia. Trois années plus tard, en 1978, il est nommé juge. Quand il portait le titre de Président de la Cours d’Appel de Tripoli. Moustafa Jajil s’est fait largement connaitre sur le plan national et international par sa fermeté dans la confirmation ( deux fois) de la peine de mort contre des infirmières bulgares dans l’affaire de contamination d’enfants libyens. Il a aussi développé une bonne relation avec la famille Kadhafi qui lui a valu le poste de ministre de la justice grâce à l’appui d’un fils du président, Saif Al-Islam Kadhafi.  A ce poste Jalil est devenu de plus en plus dérangeant pour les Kadhafi par ses dénonciations de l’état de la démocratie et des mauvais traitements faits aux prisonniers. Face au refus de la Sécurité intérieur de libérer 300 prisonniers, Abdel Jalil a publiquement présenté en janvier 2010 sa lettre de démission. Elle a été refusée par Kadhafi. Un an et un mois plus tard, le 21 février 2011, il démissionne pour contester la répression meurtrière du gouvernement faite aux insurgés et manifestants anti-Kadhafi. Dès qu’il a rejoint les rebelles à Benghazi pour les guider. Kadhafi, théoriquement soutenu par l’Union africaine, a promis le montant de 500 000 dinars à toute personne qui parviendra à capturer Abdel Jalil. Celui-ci matériellement appuyé par la Communauté internationale, réplique à Kadhafi et l’UA ainsi : «…Kadhafi, c’est un tigre de papier ; attendez, et vous verrez…», a-t-il ironisé avant l’encerclement et l’effondrement du pouvoir de Kadhafi à Tripoli le 21 août.  Ce grand bouleversement politico-militaire effectué par Abdel Jalil et ses rebelles qualifiés de rats par Kadhafi, a entrainé ce Guide de la révolution libyenne dans la totale clandestinité.  Dans ses cris de désespoir, Kadhafi caché quelque part affirme n’avoir fait qu’un retrait tactique et demande à ses partisans de poursuivre les batailles.

Ce fut ensuite le tour des rats de proposer, le 24 août, à travers leur chef  Abdel Jalil, la somme de 02 millions de dinars ( 1,2 million d’Euros) à quiconque arrêtera le gros chat Kadhafi vivant ou mort.

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