L’opération contre le complexe sécurisé où vivait le chef d’al-Qaida a duré moins de 40 minutes et a été menée par les forces spéciales de l’US Navy. Barack Obama s’était impliqué personnellement dans sa préparation depuis le 14 mars.
Abbottabad, nord du Pakistan, 01h15 du matin heure locale dans la nuit de dimanche à lundi. Des hélicoptères survolent un complexe sécurisé de 3000 m², tandis que des troupes commandos s’approchent du bâtiment. L’assaut final pour capturer Oussama Ben Laden a commencé.
«Un grand nombre de commandos a encerclé le complexe (…) Tout à coup, des tirs ont éclaté en provenance du sol et en direction des hélicoptères. Il y a eu des échanges de tirs intenses», raconte un habitant. Au sol, des membres des Navy SEALs, l’unité d’élite de la Marine américaine. Dans le ciel, quatre hélicoptères. L’un des appareils aurait eu une panne technique, forçant tous les membres du commando à prendre place dans l’autre appareil utilisé pour cette opération. Officiellement, il n’y aurait eu aucun blessé dans les rangs américains. Un habitant a vu un appareil «chuter».
L’opération était coordonnée par la CIA, depuis le siège de l’organisation à Langley, en Virginie. Leon Panetta, directeur de l’organisme, a suivi l’attaque en temps réel.
Moins de 40 minutes plus tard, Oussama Ben Laden est mort. Lui et ses gardes ont résisté à l’assaut. Après des échanges de feu nourris, Ben Laden aurait été atteint d’une balle en pleine tête, selon un haut responsable américain. Dans la bataille, quatre autres personnes trouvent la mort : l’un des fils de Ben Laden, deux hommes -probablement des messagers-, et une femme qui servit de bouclier humain. Deux autres femmes ont été blessées.
Le corps du commanditaire des attentats du 11 septembre 2001 est emmené par le commando américain. Des prélèvements ADN ont été effectués afin de permettre une identification formelle. La dépouille mortelle a ensuite été immergée en haute mer selon les télévisions américaines.
Complexe localisé en août 2010
Les services de renseignement américains étaient sur une piste sérieuse quant à la localisation du chef d’al-Qaida depuis août 2010. «Il a fallu plusieurs mois pour remonter ce fil», a expliqué le président Barack Obama lors de son allocution à la télévision américaine. C’est le 14 mars dernier qu’Obama a tenu la première d’une série de cinq réunions avec ses conseillers, où les plans d’action ont été passés en revue et approuvés. «Et finalement, la semaine dernière, j’ai déterminé que nous avions suffisamment de renseignements pour agir, et ai autorisé une opération destinée à capturer Oussama Ben Laden et à le présenter devant la justice.» Selon un haut responsable américain, le feu vert a été donné vendredi dernier à 8h20 du matin par le président des Etats-Unis, lors d’une réunion à la Maison-Blanche avec son conseiller pour la sécurité nationale, Thomas Donilon, et son conseiller antiterroriste, John Brennan.
Les forces américaines avaient fait le lien entre Ben Laden et un de ses messagers il y a six ans, selon un haut responsable américain. Ben Laden semblait lui faire une entière confiance. Son pseudonyme avait été révélé par des prisonniers de Guantanamo. Il faudra quatre ans aux services de renseignement américains avant de trouver son vrai patronyme, et encore deux ans pour savoir qu’il opérait au Pakistan. En août 2010, les services secrets américains finissent par trouver le complexe d’Abbottabad, où le messager et des frères d’armes vivaient.
«Lorsque nous avons vu ce complexe, nous avons été plus que surpris – ce complexe est réellement unique», a expliqué le haut responsable américain. Avec ses murs de 5 mètres de haut surmontés de barbelés, le complexe disposait de deux accès sécurisés. Le bâtiment principal, composé de trois étages, avait peu de fenêtres donnant vers l’extérieur, et une terrasse protégée des regards indiscrets grâce à un mur de deux mètres. Autre fait intriguant, le complexe ne disposait ni du téléphone, ni d’Internet. En outre, les habitants brûlaient eux-mêmes leurs déchets, au lieu de les faire collecter par les éboueurs. La propriété est estimée à près d’un million de dollars, et se situe dans une ville militaire abritant trois régiments de l’armée pakistanaise. Une académie militaire se situe à 700 mètres du complexe.
Pour les services de renseignement américains, il ne fait plus guère de doute que le complexe cache quelqu’un de très important. Plusieurs mois d’investigation seront encore nécessaires avant que les autorités américaines n’aient la certitude qu’il s’agit d’Oussama Ben Laden.
L’information restera confidentielle jusqu’au début de l’opération. Aucun pays étranger n’a été mis dans la confidence. Au sein du gouvernement américain, seul un petit groupe était au courant de l’opération à venir.
Par Chloé Woitier – Lefigaro.fr