Proclamé vainqueur des urnes (au 2è tour) le mercredi 1er décembre, Alassane Dramane Ouattara (ADO) voulait être investi à Yamoussoukro. Et depuis qu’il s’est proclamé Président (à juste raison et titre), il réside à l’Hôtel du Golfe où sont toujours cantonnés les membres de la Commission électorale indépendante (CEI) protégés par les forces onusiennes. Du reste, c’est à cet Hôtel que s’est tenu le premier Conseil des ministres du gouvernement de Guillaume Kigbafori Soro : sécurité oblige. Si bien que de nos jours, l’Hôtel du Golfe mérite bien le surnom de « L’Hôtel de la République ».
Quant à Laurent Gbagbo, il a formé son gouvernement le lendemain même de la formation de celui d’ADO. Face à cette situation socio politique ivoirienne bien ambiguë, bien des observateurs avisés se posent la question : avec ce bicéphalisme politique ambiant (deux Présidents pour un seul pays), la Côte d’Ivoire sera-t-elle finalement partagée en deux républiques : celle du Nord, avec Ado comme Président, et celle du Sud, avec Gbagbo comme chef ?
En tout cas, de deux choses l’une : soit les négociations, interventions et pourparlers internationaux parviennent à faire accepter, à l’un des deux Présidents, de céder le pouvoir, soit le pays sera menacé de se diviser en deux : le Nord et le Sud. Mais si l’un des deux Présidents devait céder le fameux fauteuil présidentiel à l’autre, c’est bien celui qui est désapprouvé, sinon décrié par tous (ONU, UE, UA, CEDEAO, Etats-Unis, France, Russie…) : Laurent Gbagbo.
Parlant de l’autre alternative qui consiste à passer de tergiversations en atermoiements pour que Gbagbo reste au pouvoir pour une supposée sauvegarde de la souveraineté nationale, elle est difficilement envisageable : pire, ce serait une aberration politique dont les conséquences sociales, politiques et surtout économiques risquent de retomber lourdement sur tous les pays voisins de la Côte d’Ivoire, et même au-delà.
Une autre éventualité cependant, même si, pour l’heure, elle paraît inimaginable : beaucoup d’Etats et d’institutions internationales, qui ont pourtant donné leur aval à ADO et son gouvernement, pourraient « retourner leurs vestes » et donner ainsi plus de poids et d’assise, sinon plus de crédibilité à ce pouvoir de Gbagbo qu’ils savent pourtant usurpé de la manière la plus flagrante et éhontée.
Mais pour l’heure, il semble que c’est tout le contraire, car non seulement le Président américain, Barak Hussein Obama, a invité, avec insistance, Laurent Gbagbo à quitter le pouvoir, mais la Côte d’Ivoire est désormais exclue de toutes les institutions et organisations africaines. Dès lors, c’est l’isolement total du pays, et cela, par la faute d’une seule personne.
Par ailleurs, si la raison de toute élection vise à apporter des changements qualitatifs dans les domaines de la vie sociale d’un pays, on peut dire que ces présidentielles ivoiriennes, quant à elles, ont plutôt apporté tout le contraire. Pire, ces élections ont brutalement remis sur la sellette ce spectre de la guerre civile et de la sécession en Côte d’Ivoire. Encore pire : elles ont subitement ramené le pays plus de dix ans en arrière, rappelant ainsi, au monde entier, ces terribles moments des sanglantes escarmouches entre Forces nouvelles (FN) du Nord et forces loyalistes du Sud.
L’on se rappelle même que les « Nordistes » étaient sur le point d’envahir toutes les régions du Sud, n’eussent été les interventions et autres bons offices de la Communauté et des institutions internationales.
Autant constater, en définitive, que ces élections présidentielles ivoiriennes ont complètement raté leur but, même s’il faut convenir que c’est le Président sortant, Laurent Gbagbo, qui a « pipé les dés » des élections, faussant ainsi le jeu démocratique. Et c’est bien dommage, car tous les Ivoiriens, sans exclusive, comptaient ardemment sur la réussite de ces présidentielles. Mais au lieu de cela, ce fut un fiasco retentissant.
Comment alors « redresser la barre » ? Une seule réponse, à notre avis : le fauteuil présidentiel doit être légitimement remis à qui de droit, c’est-à-dire Alassane Dramane Ouattara. En un mot, il faut rendre à César ce qui est à César. Le cas échéant, la Côte d’Ivoire risque de se diriger droit vers un gouffre socio politique encore plus profond et bourbeux que cette « mare » d’erreurs et d’errances politiques dans lesquelles elle a nagé tout au long de ces dix dernières années.
D’ores et déjà, toutes les Forces nouvelles (FN), actuellement stationnées à Bouaké, sont en état d’alerte maximum. Le mardi 7 décembre, le porte parole des FN, Seydou Ouattara Chérif, lançait ces propos pour le moins énigmatiques : « Cette situation ne peut et ne doit pas perdurer. Il faut que ça change ! ». On mesure toute la signification de ces propos quand on sait qu’aujourd’hui plus que jamais, les FN supportent ADO.
Par Oumar Diawara « Le Viator »