Depuis le 7 janvier 2013, se tient à Conakry, le procès de 33 personnes-civiles et militaires-accusées d’avoir fomenté et/ou participé à l’attaque du domicile du chef de l’Etat guinéen, Alpha Condé. Procès politique ? Règlement de comptes ? Faux attentat contre le domicile du président ou vrai montage destiné contre une certaine communauté peule proche de l’opposition? Ces questions divisent aujourd’hui l’opinion dans un pays (la Guinée) dont l’histoire récente a été émaillée de « complots » réels ou inventés de toutes pièces.
Les faits : Dans la nuit de 18 au 19 juillet 2011, la résidence privée d’Alpha Condé est attaquée par des hommes armés à bord de véhicules Pick-up. L’affrontement entre ces hommes et les éléments de la garde présidentielle aurait duré une bonne partie de la nuit. Au finish : deux morts dont un soldat à la résidence du président. Aussi, il y aurait eu d’importants dégâts matériels chez Condé.
Qui étaient ces hommes qui projetaient donc d’assassiner ( ?) Alpha Condé ? Voici la principale question posée dans cette affaire qui défraie la chronique dans le pays d’Ahmed Sékou Touré. Et il revient aux assises de Conakry, présidées par Fodé Bangoura, d’y trouver la réponse. Une procédure judiciaire est en cours depuis près de deux ans.
A la barre, ils sont 33 accusés dont une dame, Fatou Badiar Diallo. Femme d’affaires de son état, elle est la veuve d’un colonel de l’armée guinéenne qui était en service à la sécurité présidentielle du temps de Lassana Conté. La curiosité de cette affaire ? Cette dame, Fatou, selon l’accusation, serait l’instigatrice de l’attaque.
A la barre, Fatou B Diallo, tout comme les autres accusés, ont nié en bloc les faits. Parmi les accusés, il y a aussi le commandant, Alpha Oumar Diallo dit AOB, un ancien élément de la garde présidentielle sous Lassana Conté. AOB est désigné par l’accusation comme étant le chef du commando qui a attaqué le domicile du chef de l’Etat. L’officier se dit victime d’un coup monté. Il aurait été « pris en otage » par les assaillants qui auraient tenté, par la suite, de le liquider…
Parmi les accusés, l’on note également la présence des jeunes (agents de renseignement, étudiants, gendarmes). Certains, à la barre, ont revendiqué leur appartenance à l’opposition. Ce qui justifie, selon eux, leur arrestation, leur emprisonnement et leur présence à la barre.
Au cours de l’instruction, trois accusés sont décédés en détention. Il s’agit du colonel Issiaga Camara (neveu du président Conté), le colonel Bidor Bah et le commandant Coulibaly. Les circonstances de leurs décès sont sources de polémiques, dans une Guinée où les vieux démons ont le « sommeil léger ». Ces démons risquent, tout simplement, de se réveiller, à tout moment.
Zones d’ombre, tortures et aveux
Beaucoup de zones d’ombre subsistent dans cette affaire. Aucun des 33 accusés n’a été appréhendé sur le théâtre des opérations, au moment même de l’attaque. En clair, tous les accusés ont été appréhendés avant ou après l’attaque du domicile du chef de l’Etat. Pourquoi ? Défaillance du système sécuritaire ? Allez y savoir.
Autre fait troublant ? La garde présidentielle n’aurait reçu aucun appui d’autres unités de la capitale au moment où le domicile présidentiel était attaqué. Or, il semble que les combats (entre assaillants et gardes) auraient duré 3 heures de temps (de 3 heures à 6 heures du matin). Où étaient les autres unités militaires et sécuritaires, pendant que le domicile du président était « sous les feux » des assaillants ? Pour l’instant, aucune réponse à cette question, malgré le passage à la barre de certains témoins à charge dont l’aide de camp du président Condé.
Pour leur part, les accusés rejettent toutes les accusations. Ils ont nié une quelconque participation à l’attaque du domicile présidentiel. Certains accusés ont soutenu à la barre qu’ils ont fait des aveux (au niveau de la commission d’enquêtes), parce qu’ils ont subi des tortures physiques et morales. Aussi, les avocats de la défense ont dénoncé les conditions dans lesquelles des aveux auraient été extorqués à leurs clients. Ainsi, le Commandant Coulibaly aurait été défenestré au cours de son interrogatoire, selon un accusé, Almamy Haguibou Barry.
Aussi, les mêmes avocats n’ont cessé de pointer du doigt certains membres de la commission d’enquêtes, accusés d’avoir fait preuve d’excès de zèle dans la conduite des enquêtes. Le fait qu’une partie des enquêtes ait été menée dans un camp militaire de Conakry (le camp Samory) apporte du grain au moulin de la défense. Alors que le procureur général, William Fernandez, et les avocats de la partie civile, estiment que la procédure a été menée dans les règles de l’art.
Parfum ethnique
Au-delà de l’opposition entre les parties au procès, le véritable problème de cette affaire est qu’elle est en passe de diviser les Guinéens.
En effet, au regard des nombreuses réactions depuis le début des assises, la thèse d’un règlement de comptes politiques aux relents ethniques a été souvent évoquée, y compris devant le tribunal, malgré le rappel à l’ordre du président du tribunal.
Or, c’est une évidence, la grande majorité des accusés sont peulhs. Et parmi eux, il y a de nombreux militants de l’opposition. Ce sont là, deux constats qui ont leur pesant d’or dans un pays qui, par le passé, a connu son « complot peulh » et ses bavures au tristement célèbre camp Boiro.
Après tout ce que la Guinée a connu dans un passé plus ou moins récent, ce pays a-t-il aujourd’hui besoin d’un procès avec un parfum ethnique?
Le président Alpha Condé a-t-il été piégé ou pris en otage par des courants rivaux au sein de l’armée et qui voulaient simplement avoir des boucs émissaires afin de prouver leur « fidélité » à lui ? Qui sont les vrais auteurs de l’attentat ? Ce sont là également des questions essentielles qui vont au-delà du prétoire.
Il faut que ce pays voisin, après des années de conflits politiques et de déchirements entres ses fils, se réconcilie, enfin, avec lui-même.
En réalité la Guinée, après tout ce qu’elle a connu, a beaucoup plus besoin d’unité que de procès spectaculaire (retransmis tous les soirs à la télévision nationale).
Et Alpha Condé, s’il ne veut ne pas échouer, comme d’illustres anciens opposants (africains) arrivés avant lui au pouvoir, doit se ressaisir et unir la Guinée et les Guinéens avant qu’il ne soit tard.
C. H Sylla
J’ai suivi le procès de l’attaque de domicile du président Alpha Condé avec beaucoup d’attention. J’ai compris deux choses:
– que cette attaque est un coup monté. Même quelqu’un qui n’a aucune notion en droit peut le comprendre très facilement. Les avocats de la défenses ont pu démontrer cette hypothèse avec preuves à l’appui. Elle est montée soit par le président lui même ou par lui et son entourage ou par son entourage seul.
-que la société guinéenne est très pourrue, des juges, avocats, militaires… L’avocat Aliw Seyni Aysatu Jallo a démontré avec preuves, dès 2 ans après l’indépendance en 1958 la machine de fabrication d’une société pourrue est déclanchée. La partie civile et l’avocat général n’ont pas démenti cette terrible histoire.
Alpha Condé est très mal parti. Il ne va pas réussir malgré toute sa campagne de réconciliation nationale. Pour réussir, il doit passer par des actes et non par des paroles, en s’excusant, en libérant ces innocents et en nettoyant son entourage.
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