ATT sur RFI à propos de la Libye le samedi 3 septembre 2011 : \”La reconnaissance du CNT par le Mali n’est qu’une question de temps\”

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Dans une interview accordée à nos confrères de RFI, le samedi 3 septembre 2011, le président de la République, Amadou Toumani Touré, a expliqué la position du Mali sur la crise qui secoue actuellement la Libye. En marge de la conférence internationale des "amis de la Libye", tenue jeudi à Paris sous la direction du président français Nicolas Sarkozy et du Premier ministre britannique David Cameron, ATT a assuré que le Mali ne va pas tarder à reconnaître le Conseil national de Transition (CNT) …

Monsieur le président bonjour, est-ce que votre participation à la Conférence de Paris sur la Libye vaut reconnaissance du CNT ?

Non. Vous savez que  d’abord, j’ai été invité par le président de la République française et vu les relations et les privilèges que nous avons avec la France et au plan de la courtoisie d’abord, il faudrait répondre. Nous reconnaissons la Libye et nous avons notre ambassadeur qui est resté en Libye, malgré tout, avec sa famille, qui est resté solidaire au peuple libyen pendant toute sa lutte. Jusqu’à aujourd’hui, notre ambassadeur n’a pas bougé.

D’autre part, en tant que membre d’un comité qui est chargé de la médiation, vous imaginez, nous ne pouvons pas être juge et partie. Nous respectons également une ligne qui été dégagée par l’Union Africaine : accélérer la mise en place d’un Gouvernement inclusif. A partir de là, nous allons procéder également à l’acceptation de ce gouvernement  au sein de l’Union Africaine et j’ai été réconforté par le président du CNT, hier, qui a dit également les mêmes choses. Donc, je pense que la reconnaissance n’est qu’une question de temps.

Vous n’avez pas de doute sur le projet de société du CNT par exemple?

 Je n’ai aucune raison de douter. Je pense ou en tout cas j’ai vu des gens de très bonne volonté. Ensuite, ce n’est pas ma première fois de rencontrer le CNT. A chaque fois qu’il y a eu une réunion, je me suis toujours permis de les rencontrer et j’ai toujours échangé avec eux. Ensuite, je me suis rendu à Benghazi pendant les heures chaudes et donc, pratiquement, je les connais.

Nous attendons que l’UA change de position pour reconnaître, à votre tour, si j’ai bien compris, le CNT.  Mais, est-ce que vous n’avez pas l’impression que l’UA s’est arcboutée sur une position dépassée; qu’elle n’a pas su s’intégrer à une dynamique internationale concernant la Libye ?

 Je ne crois pas. Je pense que l’UA, d’abord, il faut le reconnaître, a été l’une des premières organisations à s’intéresser à la situation en Libye. D’autre part, l’UA, en tout cas, a dégagé une feuille de route. Et aujourd’hui, nous voyons que les éléments essentiels de notre feuille de route ont été pris en compte. Je ne pense pas que l’Union Africaine soit en retard. Je pense que c’est une démarche et je comprends parfaitement cette démarche.

Sur ce dossier libyen, les pays africains sont particulièrement divisés une quinzaine ont reconnu le CNT. D’autres, non. Est-ce qu’il n’y a pas, aujourd’hui, un manque  de leadership  au sein de l’Union Africaine ?

Je ne pense pas. Je pense tout simplement, il faut reconnaître une chose : le fait de ne pas reconnaître le CNT est un sujet dépassé. Moi, j’ai dit à certains amis du CNT : " ne perdons pas du temps à la reconnaissance ; maintenant, voyons les actions nouvelles comment les uns et les autres peuvent s’y engager». Il y a un fait qui est là : c’est le CNT. Ils sont là, ils sont installés ; ils travaillent, on travaille avec eux, on parle avec eux. Donc, moi je pense que l’Union Africaine, c’est beaucoup plus les textes qui l’enferment et non une autre volonté politique.

Monsieur le président, qu’allez-vous faire pour les Maliens qui vivent toujours à Tripoli qui, pour beaucoup, sont coincés chez eux, n’osent pas sortir et sont pris pour des mercenaires. Est-ce que votre mission diplomatique sur place a des contacts avec eux. Savez-vous combien sont concernés? Qu’est-ce qui est prévu ?

D’abord, Il faut dire qu’il y a un nombre particulièrement important de Maliens qui sont rentrés. Il y a pas moins de 20 000. Et je suis surpris de savoir qu’il a encore presque le même nombre qui est resté. Jusque là, nous n’avons appris aucune exaction et nous n’avons appris aucun problème à un Malien. L’ambassadeur, qui est là-bas à que j’ai commis de rester tant qu’il y aura un seul Malien, est là et chaque jour nous recevons des comptes rendus.

Mais c’est vrai, j’ai profité de cette  réunion pour rappeler quand même qu’il y avait un point très important qui avait été déjà souligné avec insistance par le Premier ministre du CNT qui disait " nous prendrons toutes les dispositions pour les Etrangers ". Nous avons dit que ça nous rassure. Ils ont besoin de reprendre les choses en mains et je pense que ça ira bien.

Et concernant les Maliens qui sont rentrés au Mali dans le dénuement… Est-ce que des financements vont être débloqués pour ces personnes qui sont revenues sans aucun sou ?

Je comprends le drame que vivent ces compatriotes rentrés les mains vides ou avec la couverture et les enfants. Vous ne pouvez pas imaginer  les flux financiers que ces Maliens envoient au pays. ..  Ce que nous avons pu faire, c’est de les accueillir, c’est de leur exprimer notre affection, c’est de prendre en compte certains petits soucis. Mais en vérité, pour les réinsérer, cela est extrêmement important et c’est un des sujets avec lesquels nous allons discuter, avec, non seulement certains partenaires mais essentiellement avec la partie libyenne.

Ce n’est pas suffisant ce qui doit être fait. Mais, nous pensons que c’est une situation provisoire.

Confirmez-vous la circulation d’armes françaises venues de Libye au Mali, comme l’a dit un officiel sous couvert d’anonymat?

Armes françaises, je dis tout de suite que ce n’est pas vrai. Je suis officier, donc, je connais quand même les armes. Je n’ai vu aucune arme qui porte une mention " Made in France ".

Mais, je sais que la Libye est une poudrière, un magasin d’armes et je pense qu’avec les désordres qui sont autour des différents affrontements, certainement, nous sommes sûrs que des armes ont quitté certaines zones pour se déverser dans la bande sahélo-sahélienne. Nous sommes convaincus que certains anciens combattants ou autres sont retournés dans la bande sahélo-sahélienne. Il y a des Maliens ; il y a d’autres nationalités. Et nous savons  également que certains sont revenus avec armes et bagages.

Est-ce que vous craignez le retour de Touareg qui auraient pris les armes en Libye et qui reviendraient au Mali ?

Nous n’avons aucune crainte. Tout dépendra de leur volonté. Il y a des touareg d’origine malienne qui sont libyens. Il y a des Touareg libyens également. Mais, si quelqu’un vient et qui doit retourner un jour dans son pays d’origine, avec la bonne volonté devenir  faire l’élevage, la pêche ou autre pour s’intégrer dans la société qu’il avait quittée, il n’y a aucun problème.

Interview transcrite par Bruno Djito SEGBEDJI

 

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