Acquitté de crimes contre l’humanité par la justice internationale en mars, l’ex-chef d’Etat attendait le feu vert d’Abidjan pour rentrer.
« Je vous annonce que le retour du président Laurent Gbagbo sur la terre de Côte d’Ivoire est prévu pour le 17 juin », a déclaré, lundi 31 mai, Assoa Adou, le secrétaire général du Front populaire ivoirien (FPI), le parti créé par celui qui fut le chef de l’Etat de 2000 à 2010.
Depuis que l’ex-président a été acquitté, en mars – il était accusé de crimes contre l’humanité –, par la Cour pénale internationale (CPI), son retour était attendu avec de plus en plus d’impatience par ses partisans. M. Adou a fait cette annonce au cours d’une cérémonie à Abidjan le jour des 76 ans de M. Gbagbo, né le 31 mai 1945.
Au début de mai, le ministre de la réconciliation nationale, Kouadio Konan Bertin, avait annoncé que la date du retour de l’ancien chef de l’Etat serait annoncée quand tout serait « prêt » pour l’accueillir, notamment en matière de sécurité.
Eviter les débordements
Des négociations sur les conditions de ce retour ont eu lieu ces dernières semaines entre le parti de M. Gbagbo et le gouvernement, qui veut éviter tout débordement au moment de l’accueil que souhaitent lui réserver à Abidjan ses partisans par milliers.
Au nom de la « réconciliation nationale », les autorités avaient, à la fin de 2020, octroyé à Laurent Gbagbo deux passeports – l’un ordinaire ; le second, diplomatique, et l’intéressé avait alors exprimé son souhait de rentrer dès décembre.
Au début d’avril, le président Alassane Ouattara avait lui-même donné son feu vert au retour de son principal rival à la présidentielle de 2010, disant que ce dernier pouvait revenir quand il le souhaitait. M. Ouattara avait ajouté que le retour de son prédécesseur et de sa famille serait pris en charge par l’Etat et qu’il bénéficierait des avantages dus aux anciens présidents.
Le refus de Laurent Gbagbo d’admettre sa défaite face à Alassane Ouattara à la présidentielle de 2010 avait provoqué une grave crise postélectorale ayant fait quelque 3 000 morts. C’est pour ces violences que M. Gbagbo a été inculpé puis acquitté par la CPI, au terme d’une longue procédure.
L’ancien chef de l’Etat reste néanmoins sous le coup d’une condamnation, en Côte d’Ivoire, à vingt ans de prison pour le « braquage » de la Banque centrale des Etats d’Afrique de l’Ouest (BCEAO) pendant les violences postélectorales de 2010-201, mais l’abandon de ces poursuites paraît presque certain après le feu vert du président Ouattara au retour de son prédécesseur.
Un signe fort de décrispation
Arrêté en avril 2011 à Abidjan, Laurent Gbagbo avait dans un premier temps été détenu dans le nord de la Côte d’Ivoire avant d’être transféré dans une cellule de la CPI à La Haye. Depuis son acquittement, il vivait à Bruxelles d’où il avait annoncé à plusieurs reprises son intention de rentrer « bientôt ».
Ce retour est un signe fort de la décrispation de la vie politique ivoirienne depuis les dernières législatives de mars qui se sont déroulées dans le calme et auxquelles avaient décidé de participer les grands partis d’opposition, dont le FPI, qui boycottait tous les scrutins depuis dix ans.
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Alassane Ouattara avait pourtant été réélu en octobre 2020 pour un troisième mandat controversé au cours d’une présidentielle boycottée par l’opposition qui jugeait ce nouveau mandat inconstitutionnel. Le scrutin a donné lieu à une crise électorale qui a fait une centaine de morts et un demi-millier de blessés entre août et novembre 2020.
Mais après ces violences, les gestes d’apaisement du pouvoir se sont multipliés, avec la libération de prisonniers arrêtés pendant cette dernière crise électorale et le retour d’exilés partisans de Laurent Gbagbo. A la fin d’avril, des cadres du FPI et sa sœur cadette, Jeannette Koudou, sont ainsi rentrés du Ghana en accord avec le gouvernement ivoirien au nom de la « réconciliation nationale ».
Le Monde avec AFP