Les puissances occidentales, les USA en tête, doivent, au lieu d’aider aveuglement le pouvoir en place à Bagdad, prioritairement tout faire pour ne pas davantage accentuer l’appartenance confessionnelle des différents Etats du Proche-Orient. C’est la nature même des guerres civiles en cours en Syrie et en Irak, essentiellement à caractère confessionnel, qui l’exige. Car, au regard de ce qui s’y passe dans ces deux pays sensibles de la région, il y a raisonnablement lieu de ne pas risquer des mesures géopolitiques pouvant contribuer à embraser une situation déjà explosive.
Les deux conflits sont indéniablement en train de réveiller l’antagonisme entre les deux grandes branches de l’Islam : le Sunnisme et le Chiisme. Ainsi en Syrie, le soutien militaire, financier et diplomatique de l’Arabie Saoudite aux rebelles sunnites (djihadistes ou non) contre le régime Alaouite, est un secret de polichinelle. Quand, l’Iran majoritairement chiite n’a jamais nier son soutien au pouvoir syrien, en lui fournissant experts militaires, armes et moyens financiers. Des positionnements qui démontrent la volonté claire et nette des deux grands pays musulmans d’exercer et détendre, par le biais des deux courants religieux, leur influence respective sur les autres pays de la région.
Ce qui amène désormais certains analystes à ne plus hésiter à affirmer que le Croissant chiite (l’axe Iran-Irak-Syrie-Liban) est en guerre confessionnelle contre la majorité sunnite, composée par la quasi-totalité des pays arabes. Les relations permanemment tendues entre l’Arabie Saoudite et le gouvernement chiite de Nouri Al Maliki, depuis la chute de Saddam Hussein, d’une part et celles sulfureuses entre la dynastie wahhabite (sunnite) et le pouvoir de la révolution chiite iranienne, d’autre part sont d’ailleurs là pour étayer cette thèse. Le Premier ministre Maliki, lors d’une interview exclusive datant de quelques mois ne s’était même pas priver d’accuser l’Arabie Saoudite d’avoir déclaré la guerre à son pays. En expliquant cela par le soutien en tout genre que l’Arabie accorderait aux rebelles de l’Etat Islamique en Irak et au Levant (EIIL).
D’ailleurs, l’antagonisme entre les deux Etats continue de se refléter au niveau de la presse saoudienne. Laquelle n’hésite pas à montrer de doigt le régime chiite irakien d’avoir marginalisé les sunnites du pays. Comme en les empêchant d’accéder aux postes administratifs et politiques clefs et l’accès à l’armée nationale, entre autres. Certains éditoriaux de journaux saoudiens, proches du pouvoir, vont jusqu’à avertir « d’éviter de jouer avec le feu du confessionnalisme qui brûlera tout le monde ». Alors que d’autres expliquent simplement que l’EIIL n’est autre que « le produit d’une politique confessionnelle, partisane et d’exclusion poursuivie par le Premier ministre Maliki ». Tout en qualifiant les actions militaires menées par l’EIIL de véritables soulèvements des provinces arabes sunnites contre le gouvernement chiite. Toute chose qui tend à démontrer que la rébellion sunnite, contrairement aux thèses gouvernementales irakiennes et à l’appréciation occidentale, n’est pas un mouvement terroriste.
Ainsi, Washington et ses alliés occidentaux, qui sont en train de se préparer pour intervenir dans le but de stopper l’avancée de l’EIIL vers le sud, notamment Bagdad, par des frappes aériennes et surtout l’appui militaire de l’Iran, devront faire très attention. Car, la résultante des guerres en Syrie et en Irak a désormais réveillé les vieux réflexes communautaires au niveau des chiites comme des sunnites dans la région. Les chiites se mobilisent de plus en plus, en mettant de côté leur clivage politique, pour se mettre à la disposition du régime irakien. Alors que de son côté, les sunnites majoritaires dans le centre- nord, s’enrôlent volontairement dans l’armée de l’EIIL (qui compte désormais en son sein des anciens militaires baasistes pour, disent-t-ils, défendre leur région du joug chiite.
Par Gaoussou M. Traoré
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