En suppliant son opposition, dès l’annonce des résultats globaux provisoires, à participer à un gouvernement d’union nationale, le Président Issoufou envoie des signaux évidents pour tenter de fédérer l’ensemble des acteurs politiques autour de sa personne. Une volonté qu’il n’a pas tardé à matérialiser par l’envoi de l’opposant Hama Amadou en France, dès la fin du second tour, pour se faire soigner mais aussi par sa mise en liberté provisoire en début de semaine. Une main tendue, bien que salutaire au regard de son élection controversée au second tour à la soviétique, qui cadre pourtant avec la logique que Mamadou Issoufou veut se prémunir d’une probable insurrection populaire. Qui pourrait déboucher inéluctablement sur une intervention de l’armée, tant le Niger est un habitué des coups d’Etat militaire.
Une éventualité d’ailleurs largement partagée par Emmanuel Grégoire de l’Institut de Recherche pour le Développement (IRD). Celui-ci expliquant que « le Chef d’Etat nigérien s’est aperçu qu’il était allé trop loin, tente de jouer la carte de l’unité nationale pour contenir le mécontentement de la population et des troubles, voire éviter qu’un coup d’Etat ne le renverse, l’armée ayant massivement voté pour Hama Amadou ». A cet effet, Issoufou parviendra-t-il à faire dissiper le spectre du putsch militaire qui plane sur son pouvoir ?
La coalition de l’opposition nigérienne (regroupée au sein de la COPA), ayant déjà averti qu’elle ne reconnaîtrait pas la victoire du Chef d’Etat et sachant désormais par les résultats des urnes le désaveu de la Grande muette pour celui-ci, persiste à ne pas vouloir se contenter d’un gouvernement d’union nationale qui la confinerait. En lieu et place, elle propose préalablement un dialogue inclusif qui mènerait le Niger vers une transition politique qui créerait les conditions de nouvelles élections. Or le pouvoir, qui rejette toute idée de se saborder, feint d’ignorer son manque de popularité (en l’occurrence à Niamey), pour ne pas dire son déficit de légitimité, argumente que c’est simplement le risque du péril sécuritaire qui l’anime pour vouloir rassembler les nigériens. Or, quels que soient les arguments défendus par les uns et les autres, le Président Issoufou n’a plus de temps à perdre pour essayer de rapprocher les deux visions antinomiques. Mais comment va-t-il s’y prendre, lorsque l’on sait aussi que c’est la coalition présidentielle qui détient la majorité absolue à l’Assemblée nationale ?
A défaut d’accepter l’idée d’une transition politique, fortement défendue par le camp adverse, le Chef d’Etat nigérien, garant de la paix sociale, devra forcément convaincre son propre camp afin que celui-ci accepte de concéder un large compromis. Sans cela, l’opposition nigérienne, qui sait compter dans la capitale sur un soutien populaire avéré par les urnes, pourrait s’évertuer à créer toutes les conditions objectives (par la désobéissance civile) pour faire bouger l’armée. Une institution qui est déjà intervenue à maintes reprises pour remettre de l’ordre à chaque fois que les politiques se sont montrés incapables de bien jouer le jeu démocratique.
Gaoussou M. Traoré
Mr Gaoussou M. Traore, on sent qu’à travers votre article vous avez une vision partielle de la situation politique au Niger, mais sachez que le Niger ne se limite pas à Niamey et n’est pas aussi le Niger.
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