En déclarant personnellement, lors d’une allocution télévisée dans la nuit du 20 au 21 janvier, sa décision de renoncer en « âme et conscience » à la direction de son pays, « pour l’intérêt supérieur de son peuple et de son pays », Yahya Jammeh qui affirme croire « en l’importance du dialogue et en la capacité des Africains à résoudre eux-mêmes les défis de la démocratie », contribue à la conclusion en beauté de la grande crise postélectorale de la Gambie. Mais, cette victoire de la médiation africaine prouve clairement que l’usage de la résolution diplomatique dans les crises africaines est plus bénéfique que celui de la menace militaire que promet toujours la Communauté Internationale.
La multiple et ultime médiation marocaine, mauritanienne et guinéenne, conduite par les présidents Mohamed Ould Abdel Aziz et Alpha Condé, est finalement parvenue à convaincre le Président Yahya Jammeh à céder volontairement le pouvoir à son successeur élu, Adama Barrow. La solution extrême d’intervention militaire préconisée pour mettre fin au pouvoir de Jammeh a été évitée de justesse en Gambie. Une preuve qu’en matière de contentieux interne, mieux vaut suffisamment user de la persuasion dans la discrétion que de procéder à des menaces militaires intempestives extérieures qui ne font très souvent qu’envenimer une situation déjà complexe.
Les Chefs d’Etat de ces trois pays entretiennent de très bonnes relations avec le président Jammeh, dont une épouse est guinéenne et une autre marocaine. Un royaume notamment avec lequel son régime aura entretenu d’excellentes relations diplomatiques durant les deux décennies écoulées. Des relations qui se sont surtout renforcées, lorsque la Gambie s’est engagée dans l’Union Africaine pour l’annulation de l’adhésion de la République Arabe Sahraouie Démocratique (RASD).
Par cette prouesse diplomatique, les trois pays évitent à la minuscule Gambie d’être plongée dans une aventure militaire aux conséquences incalculables. Elle préserve incontestablement des vies humaines et évite la destruction du modeste tissu social et économique que l’enclave sénégalaise possède. Mais aussi et surtout, elle évite incontestablement au Sénégal (qui demeure en guerre depuis des décennies contre sa rébellion casamançaise) d’intervenir militairement en Gambie. Un pays dont la population dans sa majorité demeure, quelle que soit la cause, hostile à une intervention militaire de son puissant voisin. Ce, bien qu’il soit une réalité que les deux peuples ne constituent qu’un seul et même, que les puissances coloniales ont politiquement séparés.
Cela n’est pas une première, la médiation interafricaine est d’usage en République Démocratique du Congo (RDC). Un pays dont le Président en fin de mandat constitutionnel, refuse catégoriquement de céder le pouvoir. Pour autant, les mêmes dirigeants africains et la Communauté internationale n’ont jamais menacé son régime d’une quelconque intervention militaire pour le déloger. Au contraire, ils n’ont de cesse encouragé les nombreux compromis et compromissions politiques qui le maintiennent au pouvoir jusqu’à l’élection de son successeur. Ce, sans pour autant parvenir à trancher sur sa non-participation à la future présidentielle.
Comme quoi, la médiation à l’africaine peut bien être une excellente recette pour résoudre les conflits politiques sur le continent. Une leçon sociopolitique que la CEDEAO, l’UEMOA, les autres organisations sous-régionales africaines et l’UA devront toujours retenir. Elles devront désormais exploiter à fond toutes les options pacifiques pour régler les nombreux contentieux politiques que connaît le continent. Comme ceux qui sont en cours au Congo, au Gabon, au Tchad, etc.
Gaoussou Madani Traoré
Les médiateurs de la 23 ème heures, Kondé et Aziz croient t’ils réellement qu’ils ont été les seuls à avoir pris la peine de raisonner Jammeh ? Des Gambiens des Nigériens , Sierra léonnais , Senegalais s’y sont essayés avant eux des gens qui etaient pour Jammeh bien plus que des “amis politiques”. Si Jammeh a lâché c’est au fond parce qu’il a compris que le report de force n’était pas à sa faveur c’est tout. Merci à Kondé et Aziz mais …il faut relativiser.
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