Afghanistan : 12 morts dans l’attaque contre l’université américaine

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Des étudiants enfermés à l'intérieur du bâtiment ont fait état d'explosions et de tirs. © AFP/ MASSOUD HOSSAINI

Cette attaque, qui a tué des étudiants et des policiers à Kaboul, intervient 15 jours après l’enlèvement de deux enseignants de cette université privée.

Au moins douze personnes ont été tuées lors d’une attaque contre l’université américaine d’Afghanistan à Kaboul qui a duré plus de dix heures dans la nuit de mercredi à jeudi, pendant lesquelles des étudiants ont lancé de poignants appels à l’aide. L’attaque contre cet établissement d’élite qui accueille 1 700 étudiants n’a pas été revendiquée pour l’heure. Deux de ses professeurs, un Australien et un Américain, avaient déjà été enlevés au début du mois, sans que leur rapt ne soit revendiqué non plus.

“Sept étudiants, un garde de l’université, et un garde de l’établissement voisin pour les aveugles ont été tués”, a indiqué le porte-parole du ministère de l’Intérieur, Sediq Sediqqi, ajoutant que trois policiers avaient également trouvé la mort. Un précédent décompte faisait état de 9 morts. Selon ce nouveau bilan, au moins 45 personnes ont été blessées, dont certaines grièvement.

Des centaines d’étudiants évacués

Le nombre d’assaillants n’est pas clair, mais la police de Kaboul a indiqué avoir tué deux d’entre eux lors de leur opération de sécurisation du campus à l’aube. L’armée afghane, assistée par des conseillers militaires de la coalition internationale dirigée par les Américains, a rapidement encerclé le campus. Des centaines d’étudiants ont été évacués pendant la nuit. Une poignée d’étudiantes, certaines terrifiées et en pleurs, ont été escortées hors du campus par des policiers à la fin de l’assaut. “La fille de mon beau-frère, étudiante, a disparu”, lance une femme anxieuse devant l’université. “On la cherche depuis le début de l’attaque, on a vérifié tous les hôpitaux, mais il n’y a pas de trace d’elle.”

Explosions et fusillades avaient retenti sur le campus en début de soirée mercredi, à l’heure où de nombreux étudiants s’y trouvaient pour assister à des cours du soir, une pratique fréquente en Afghanistan où nombre d’étudiants sont également salariés. Dès les débuts de l’attaque, nombre d’étudiants avaient émis des messages de détresse sur Twitter. “#AUAF attaquée. Des amis et moi nous sommes échappés, plusieurs autres amis et des enseignants sont coincés dedans”, a ainsi tweeté le journaliste Ahmad Mukhtar. “J’ai entendu des explosions, et il y a des tirs près d’ici. […] Notre classe est remplie de fumée et de poussière”, a raconté un étudiant joint par téléphone par l’Agence France-Presse. “Nous sommes coincés à l’intérieur et nous avons très peur.”

L’éducation, rare source d’espoir pour les jeunes Afghans

Cette attaque, la première de cette ampleur contre une université d’envergure en Afghanistan, jette une ombre sur tout le secteur de l’éducation, considéré comme une rare source d’espoir pour les jeunes Afghans grandissant au milieu d’une insécurité croissante. L’augmentation du nombre d’étudiants et surtout d’étudiantes allant à l’université est saluée comme une réussite depuis la chute en 2001 du régime taliban qui avait interdit l’éducation des femmes. “En s’en prenant aux civils, aux établissements d’éducation, aux zones résidentielles, aux ponts et centrales électriques, les groupes terroristes veulent (…) entraver le développement et le renforcement des valeurs auxquelles croient les Afghans”, a déploré le présidentAshraf Ghani.

L’université américaine d’Afghanistan, qui entretient des partenariats avec de prestigieuses universités américaines comme Georgetown, Stanford et l’université de Californie, est considérée comme une cible en partie en raison de la présence d’enseignants occidentaux. On ignore le sort des deux professeurs enlevés le 7 août par des hommes armés qui ont brisé les fenêtres de leur véhicule à proximité de l’établissement, mais les enlèvements crapuleux d’étrangers sont relativement fréquents à Kaboul.

Cette nouvelle attaque d’ampleur en plein Kaboul intervient alors que les rebelles talibans sont à l’offensive dans tout le pays contre le gouvernement soutenu par les Occidentaux. Les forces afghanes soutenues par l’armée américaine tentent de repousser les insurgés islamistes qui s’approchent de Lashkar Gah, capitale de la province du Helmand, haut lieu du pavot. L’intensification des combats dans cette zone du sud de l’Afghanistan, qui entraîne une crise humanitaire, montre à quelle vitesse la sécurité se détériore, près de quinze ans après l’intervention menée par les Américains. Les talibans se rapprochent d’une autre capitale provinciale, Kunduz, noeud stratégique dans le nord du pays qu’ils avaient brièvement conquis il y a un an, leur principale victoire depuis 2001.

  Publié le 24/08/2016 à 18:00 | Le Point.fr

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