Le locataire de la Maison-Blanche a fait savoir jeudi soir que l’aide américaine sera suspendue si le président Mahmoud Abbas refuse d’examiner son plan de paix.
C’est ce qui s’appelle sortir du non-dit. S’exprimant jeudi soir à l’issue d’une rencontre avec Benyamin Nétanyahou au Forum économique mondial de Davos, Donald Trump a clairement exprimé son intention de suspendre l’aide américaine aux Palestiniens s’ils persistent à refuser tout contact avec son Administration. Le président Mahmoud Abbas a officiellement coupé les ponts avec les États-Unis depuis la reconnaissance de Jérusalem comme capitale de l’État d’Israël le 6 décembre dernier. «L’argent est sur la table, indique désormais le locataire de la Maison-Blanche, et les Palestiniens ne l’auront pas tant qu’ils refuseront de s’asseoir pour négocier.» Davantage que comme le fruit d’un coup de colère, il a présenté cette menace comme une tactique destinée à sortir de l’impasse. «Les autres négociateurs n’ont jamais essayé, a-t-il expliqué. Et bien moi, j’essaie!»
Cette mise en demeure intervient quarante-huit heures après la visite de Mike Pence au Proche-Orient, lors de laquelle le président Mahmoud Abbas a ostensiblement refusé de le rencontrer. «Les Palestiniens nous ont manqué de respect en ne permettant pas à notre grand vice-président de les voir alors que nous leur donnons des centaines de millions en aide et en soutien», a déploré jeudi soir Donald Trump. «M. Abbas a insulté le président américain», a pour sa part condamné l’ambassadrice américaine auprès des Nations unies, Nikki Haley, en allusion à un discours devant le comité central de l’Organisation de libération de la Palestine (OLP) lors duquel le président palestinien a récemment laissé éclater sa colère. «Nous n’allons pas courir après une gouvernance palestinienne qui ne réunit pas les qualités nécessaires pour parvenir à la paix», lui a répondu Nikki Haley.
Les États-Unis comptent parmi les principaux pourvoyeurs d’aide aux Palestiniens. En 2016, l’Agence américaine pour l’aide et le développement (Usaid) a financé des projets en Cisjordanie et à Gaza pour un montant total de 256,5 millions d’euros (319 millions de dollars). Quelque 29 millions d’euros (36 millions de dollars) ont aussi été transférés à l’Autorité palestinienne afin de financer ses services de sécurité. Enfin, Washington donne en temps normal plus de 281 millions d’euros (350 millions de dollars) par an à l’agence des Nations unies en charge des réfugiés (Unrwa). Mais l’Administration a annoncé la semaine dernière une réduction de moitié de la première contribution versée à cette organisation pour l’année 2018. «Il faut montrer du respect aux États-Unis, ou bien alors on ne va nulle part», a semblé justifier jeudi Donald Trump.
Le président américain est également revenu sur le coup de tonnerre diplomatique du 6 décembre. «Si l’on regarde les efforts de paix entrepris par le passé, on observe que Jérusalem était le principal obstacle, a-t-il philosophé. Donc on a retiré Jérusalem de la table, il n’y a plus à en parler. Les Israéliens ont gagné quelque chose, mais ils devront bientôt offrir quelque chose à leur tour.» Ces propos contrastent avec les assurances livrées dans un premier temps par Donald Trump, qui avait déclaré: «Notre reconnaissance ne préjuge en rien les frontières de la souveraineté israélienne à Jérusalem, qui devront être déterminées dans le cadre de négociations».
Évoquant le plan concocté par son gendre Jared Kushner, que Mahmoud Abbas refuse désormais d’examiner, le président américain a aussi promis: «Nous avons une grande proposition de paix, excellente pour les Palestiniens.» Mais l’explication n’a guère convaincu Saeb Erekat, le négociateur en chef de l’OLP, qui a réagi: «Ceux qui affirment que Jérusalem n’est plus sur la table disent que la paix n’est plus sur la table». Hanan Ashraoui, membre du comité exécutif de l’OLP, a rebondi: «Refuser de rencontrer votre oppresseur, ce n’est pas manquer de respect – c’est se respecter soi-même». L’ambassadeur palestinien à Washington, Hossam Zomlot, a pour sa part dénoncé «un coup de poignard dans le dos».
L’Administration américaine, qui revendique traditionnellement une position de neutralité dans son traitement du conflit israélo-palestinien, a tout récemment cessé de ménager les apparences. Dans une allocution empreinte de ferveur religieuse prononcée lundi devant la Knesset, le vice-président Mike Pence a déclaré: «Nous nous tenons au côté d’Israël parce que votre cause est notre cause, vos valeurs sont nos valeurs et votre combat est notre combat. Nous nous tenons au côté d’Israël parce que nous croyons au vrai contre le faux, au bien contre le mal et à la liberté contre la tyrannie.» Ne mentionnant les Palestiniens que pour les sommer de revenir à la table des négociations, il s’est soigneusement abstenu d’évoquer leurs revendications sur la Cisjordanie ainsi que sur Jérusalem-Est, et a étrangement conclu: «Que Dieu bénisse le peuple juif, l’État d’Israël et tous ceux qui appellent cette terre leur foyer».
Et le Gros Rat Blanc risque de se faire frapper tout court !
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