« Le jeudi 6 novembre 1975, ce sont 350.000 marcheurs marocains qui ont franchi pacifiquement la frontière qui sépare le Maroc de son Sahara. Partout dans le monde, c’est la stupeur : les Marocains osent défier la puissance espagnole encore implantée dans la région. Ils avancent, sans autre arme que le Coran. Cette opération, mûrie par Feu SM le roi Hassan II va bouleverser les rapports de force hérités d’une décolonisation inachevée, vingt ans après l’indépendance du Maroc », indique une source marocaine.
En effet, à l’indépendance du Maroc, en 1956, l’Espagne restitue la zone Nord de son protectorat, à l’exception de ses présides, Ceuta et Mellila, toujours espagnols, et prétend conserver l’enclave d’Ifni et la région de Tarfaya, rattachée administrativement au Sahara (la rétrocession de Tarfaya et Sidi Ifni aura lieu respectivement en 1958 et 1969). L’Espagne rencontrera une vive opposition de la part des populations locales et de l’Armée de libération marocaine qui refuse de déposer les armes avant la reconquête de l’ensemble du territoire marocain et de la libération de l’Algérie.
A partir des années 1970, l’Espagne doit faire face à la pression internationale, l’O.N.U. ayant prononcé des résolutions en faveur de la décolonisation du territoire, en 1971 et en 1973. Par ailleurs, les incidents armés se multiplient sur le territoire, avec l’implication de certains pays de la région.
Au début du mois de juillet 1974, l’Espagne informe l’O.N.U. du nouveau statut d’autonomie interne qu’elle compte appliquer au Sahara. Cette décision provoque tout naturellement une forte opposition de la part du Maroc qui ne veut à aucun prix de la création d’un « Etat fantoche » sur un territoire qu’il n’a jamais cessé de revendiquer.
Le Maroc demande en 1975 l’arbitrage de la Cour internationale de justice (C.I.J.), appelée à trancher sur le fait de savoir si, au moment de la colonisation par l’Espagne, ce territoire était terra nullius, c’est-à-dire territoire n’appartenant à personne. Le 16 octobre 1975, la Cour internationale de justice rend un avis consultatif sur le droit applicable dans cette affaire. Elle estime qu’à l’époque considérée, ne pouvaient être considérés comme terra nullius les territoires habités par des tribus ayant une organisation sociale et politique. Or c’était le cas du Sahara au moment de la colonisation. Elle reconnaît, en outre, que ce territoire relevait du système juridique musulman fondé sur le lien religieux de l’islam et sur l’allégeance (beya’a) des diverses tribus au Sultan marocain. Fort de cette reconnaissance claire et nette de la CIJ et plus encore de l’article 6 de la résolution 1514 (XV) des Nations unies qui stipule que : « toute tentative ayant pour but d’ébranler totalement ou partiellement l’unité nationale et l’intégrité territoriale d’un pays est incompatible avec les buts et les principes de la Charte des Nations unies », Feu SM le Roi Hassan II réclame le retour du Sahara à la Mère Patrie. Le soir même de la décision de la C.I.J., Feu SM le Roi Hassan, décidant de faire passer dans la réalité ce qui était juridiquement acquis, révèle au peuple marocain, par un discours adressé à la Nation, sa décision historique de donner le point de départ à la glorieuse Marche Verte…
Au soir du 5 novembre, Feu SM Hassan II lance un appel à son peuple : «Demain, tu franchiras la frontière. Demain, tu entameras la Marche, demain tu fouleras une terre qui est tienne, tu palperas les sables qui sont tiens, demain tu embrasseras un sol qui fait partie intégrante de ton cher pays ». Et le lendemain matin, le 6 novembre, à l’aube, tous les marcheurs sont massés devant le fort de Tah, poste frontalier qu’ils vont traverser dans une discipline et une organisation impeccables, montrant à la face du monde entier, que Feu Hassan II était le souverain d’un peuple capable de la plus grande marche pacifique de l’histoire contemporaine.
Le 9 novembre 1975, alors que les marcheurs ont avancé de 20 à 30 km au-delà de la frontière, Feu Hassan II leur donne l’ordre de faire demi-tour, et prononce un discours dans lequel il insiste sur le caractère historique de leur avancée triomphale : « [les marcheurs] viennent d’écrire une des pages les plus glorieuses de notre Histoire, une page qui sera citée en exemple aux générations futures en fait de discipline, d’obéissance, de maturité, d’endurance et de patriotisme ».
La décision d’interrompre la Marche est intervenue après que Feu Hassan II ait reçu de l’Espagne des garanties que les négociations décisives allaient commencer. Et en effet, le 12 novembre, des négociations s’engagent entre le Maroc et l’Espagne à Madrid, en présence d’une délégation mauritanienne. Elles aboutissent à la signature d’un accord tripartite, le 14 novembre, à Madrid. Le texte de cet accord porte sur le retrait espagnol du Sahara, le 28 février 1976.
Un processus de paix qui piétine
Pour des considérations géopolitiques liées au contexte de la guerre froide, la médiation africaine, engagée depuis 1976, n’a pas abouti, la question du Sahara a été confiée à l’ONU… Face à l’impasse politique, et en réponse aux appels du Conseil de sécurité aux parties, le Royaume du Maroc a soumis, le 11 avril 2007, au Secrétaire Général, « l’Initiative marocaine pour la négociation d’un statut d’autonomie de la région du Sahara. »
Grâce à cette initiative, le Royaume du Maroc garantit à la population de la région, leur place et leur rôle, sans discrimination ou exclusion, dans ses organes et institutions. Ainsi, les populations du Sahara peuvent gérer démocratiquement leurs affaires, par le biais de pouvoirs législatif, exécutif et judiciaire exclusifs. Elles auront les ressources financières nécessaires pour développer la région dans tous les domaines et participeront de manière active, dans les domaines économique, social et culturel de la Nation …
Cependant, la dynamique que cette initiative audacieuse a enclenchée en mettant en marche un nouveau processus de négociations n’a, jusqu’à présent, pas abouti à la solution politique consensuelle et définitive escomptée. Et nonobstant ces manœuvres désespérées, le Maroc, par la voix de Sa Majesté le Roi Mohammed VI, n’a cessé de réaffirmer sa volonté de faire avancer ce processus sur la base des constantes et des objectifs des négociations, tels que définis par le Conseil de sécurité et par M. Ban Ki Moon, Secrétaire général des Nations Unies.
Moussa Dagnoko
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