La vassalisation de la Cour constitutionnelle va-t-elle se confirmer avec la révision constitutionnelle en cours ?

0
Autorités intérimaires : La Cour constitutionnelle rejette en bloc la requête l'opposition
Cour Constitutionnelle du Mali

Nous avons vu ces derniers temps des reportages sur la Cour Constitutionnelle du Mali à la Télévision Nationale (ORTM). Dans ces reportages, le réalisateur a fait des interviews de la présidente de la Cour Constitutionnelle, et d’autres responsables relatives au rôle de cette cours qualifiée d’arbitre entre les différentes lois qui gèrent une République en principe. Ces reportages sont-ils des signes avant-coureurs pour prendre notre démocratie en otage ? Nous en doutons. Ces cas se rencontrent généralement, en Afrique. Rares sont les Cours Africaines qui disent réellement le droit. Nous idéalisons les membres des cours constitutionnelles, ça ne doit pas être le cas vu la manière dont ils sont désignés. Au Mali depuis 2002, nous nous posons la question de savoir si la Cour Constitutionnelle est au service du pouvoir en place ou de la République ?

En effet en 2002, le candidat qui avait gagné au premier tour n’a pas été retenu et malgré des plaintes bien fondées, notre Cour Constitutionnelle a regardé vers la direction du doigt du Président de la République enfin de mandat pour trancher. A la veille des élections, les membres de la Cour Constitutionnelle avaient reçu de nouvelles voitures pour les besoins de la cause.

En 2007,  Feu le président de la Cour Constitutionnelle Kanouté avait déploré l’impuissance de la Cour face à la loi  de l’argent c’était lors des élections. La Cour a été obligée d’accepter ainsi les résultats. Par conséquent elle a été incapable de dire le droit.

En 2013, l’opposition a accusé le gouvernement  d’avoir utilisé un système scientifique de fraude pour le scrutin presidentiel. Malgré les nombreuses plaintes avec des preuves de l’opposition, rien n’a pratiquement changé dans le résultat final. En 2012, le Mali a connu une triple crise sécuritaire, institutionnelle et humanitaire, dont la résolution a abouti à  un Accord pour la Paix et la Réconciliation signé le 15 mai 2015 à Bamako et obtenu à l’arrachée sous la pression de la Communauté Internationale. Cet accord a été qualifié de bon accord malgré qu’il comporte des choses totalement en contradiction avec la constitution malienne de 1992 et les textes de la décentralisation, dans certaines de ses dispositions. Pour l’homme de droit, lorsque l’exécutif désigne ceux qui doivent administrer les collectivités, cela est une violation flagrante de notre constitution. Malgré la saisine de la cour sur ses aspects anticonstitutionnels par les députés de l’Opposition Républicaine, la cour constitutionnelle n’a eu d’autres arguments, que de dire que l’Accord rentre dans le cadre de la réconciliation et la paix. Ledit accord malgré sa validation par la Cour Constitutionnelle et sans être soumis au vote de l’Assemblée Nationale continue de faire des centaines de victimes civiles et militaires par an. Où est donc la paix et la réconciliation tant chantées par la Cour Constitutionnelle de notre pays. Ce comportement de notre cour, participe à la prise en otage de notre démocratie par ses membres désignés à partir des canaux relationnels comme  le plaidoyer fait par sa présidente auprès de Madame la présidente pour sa nomination. Ceci explique donc cela.

Nous nous attendons le même refrain de paix et réconciliation par rapport à la nouvelle constitution qui contrairement à la pratique admise, doit s’adapter à l’Accord d’Alger. Toute société démocratique repose   sur trois pierres  angulaires à savoir le citoyen qui ne demande que l’égalité pour tous, le juge qui tranche entre les citoyens, entre le citoyen et l’Etat et entre les organes de l’Etat, et enfin le journaliste qui s’informe pour informer le peuple. Chacune de ces pierres est essentielle au bon fonctionnement du dit triangle. Les membres de la Cour Constitutionnelle du Mali n’ont pas compris cela.

Au Niger, il y a quelques années de cela, lorsque Mamadou Tandia Président sortant a tripatouillé la constitution pour se maintenir au pouvoir dans le cadre du « tazartje »  avec l’argument fallacieux comme quoi il a commencé des chantiers qu’il voudrait  terminer. A l’époque la Présidente de la Cour Constitutionnelle a dit ‘’niet’’. Cette cour s’est vraiment assumée sous la conduite d’une femme. La même chose est-elle réalisable au Mali ?

Nous ne sommes pas certains, car notre cour semble perdre le combat de nos valeurs à savoir la dignité, la loyauté, l’amour du travail bien fait et le patriotisme. Alors que le premier principe qui guide la construction d’un Etat de droit est que les gens qui exercent des responsabilités publiques doivent se soumettre aux lois inscrites dans la constitution. Le second principe est l’indépendance de la justice ou tout au moins, l’indépendance qui résulte de la séparation des pouvoirs, donc à l’abri de toute pression politique.

La Cour Constitutionnelle ne doit pas être une porte d’entrée pour créer un déséquilibre entre les pouvoirs. Madame la présidente, est une des premières  actrices du mouvement démocratique saura-t-elle se mettre à hauteur de mission ?

Elle a été presque la première victime de l’indépendance de la justice sous le régime du Général Moussa Traoré. Saura-t-elle garder cela en mémoire par rapport à tout ce qu’elle pose comme acte au nom de la République ?

Comme dit le philosophe « il n’y a pas de destins forclos il n’y a que des responsabilités désertées ». La Cour Constitutionnelle prendra-t-il le chemin d’une responsabilité désertée ?

Seydou DIARRA

Commentaires via Facebook :