L’amélioration des conditions de la qualité de vie des populations à travers le renforcement de l’accès aux services sociaux de base tels que l’électricité fait partie des objectifs prioritaires de l’action gouvernementale, notamment l’Axe 4 du Plan d’Action du Gouvernement de Transition. Le taux de raccordement à l’électricité au Mali est actuellement de 48%. En milieu rural, le taux de branchement n’est que de 25 % alors que 70 % de la population malienne vit en milieu rural. Malgré l’irradiation solaire du Mali de 6 ou 7 kWh par mètre carré par jour et les stratégies gouvernementales de soutien aux énergies renouvelables, les solutions pour accroître l’accès aux énergies propres demeurent timides. Donc, le défi à relever est énorme. Ce qui n’a pas échappé aux autorités du pays. C’est dans ce cadre que l’Institution de la République dédiée aux communautés de base a organisé, dans le cadre des travaux de sa session ordinaire de 30 jours, un atelier de deux jours sur la problématique.
Démarrée le 07 novembre 2022 pour 30 jours, la session ordinaire du Haut Conseil des Collectivités a, durant deux jours, planché sur la problématique de l’accès des populations rurales et périurbaines à l’l’électricité, une innovation pour une institution qui se limitait qu’à élaborer des rapports d’ordre général. Autrement dit, celle-ci s’est attaquée cette fois-ci, de visu, à une problématique majeure pour le développement des communautés de base en faisant appel aux acteurs concernés afin qu’ils viennent débattre des problèmes et trouver ensemble des solutions. Ainsi, du 24 au 25 novembre s’est tenu l’atelier national sur la problématique de l’électricité rurale au Mali. Quatre thèmes étaient au centre des débats : Enjeux et défis de l’électrification au Mali ; Acquis et perspectives de développement de l’électrification en milieu rural ; Participation au financement et à la gestion des projets ER (Energie renouvelables) dans le cadre du Ppp (Partenariat public-privé) ; Financement durable de l’électrification rurale au Mali. Les travaux de l’atelier ont été ouverts par le Premier Ministre par intérim, Colonel Abdoulaye MAÏGA. Y étaient présents des membres du gouvernement, les gouverneurs de toutes les régions administratives, des élus, des personnalités du secteur, etc. Dans son allocution, le Chef du Gouvernement par intérim a rappelé que la tenue de l’Atelier est « la concrétisation d’une volonté plusieurs fois affirmée par le Président de la Transition, Son Excellence le Colonel Assimi GOITA, qui accorde une importance particulière au renforcement des infrastructures dont celles de l’électricité en milieu rural.» En terminant ses propos, Colonel Abdoulaye Maïga a indiqué que : « En ce début du 3ème millénaire, la situation énergétique de notre pays n’est pas favorable aux attentes de la population et aux acteurs industriels et économiques. Nous avons la ferme conviction que cette situation énergétique défavorable sera dans un futur proche un vieux souvenir grâce aux réformes institutionnelles et réglementaires en cours dans le secteur de l’énergie » Pour le président du HCC, si rien n’est fait, la majorité de la population sera privée d’électricité pour longtemps. La dispersion des habitats, les faibles revenus des populations et les coûts de raccordement sont, selon Mamadou Satigui Diakité, des obstacles majeurs à l’accès à l’électricité des populations. C’est pourquoi, dit-il, l’électrification rurale s’impose non seulement comme une solution mais aussi comme une nécessité et non un luxe car l’arrivée de l’électricité dans une localité rurale est synonyme de développement économique et social. Quant au Président Directeur Général de l’Agence Malienne pour le Développement de l’Énergie Domestique et de l’Électrification Rurale (AMADER), Amadou Sidibé, la satisfaction des besoins en énergie électrique de qualité à un coût abordable est prise en compte dans le plan directeur d’électrification rurale (PDER horizon 2030) de sa structure qui est en cours d’élaboration. Il a ajouté que l’électrification des infrastructures communautaires sanitaires, éducatives, hydrauliques, de production et de transformation agricoles est également prise en compte dans ce plan. Pour le Patron de l’AMADER, le PDER corrigera la répartition inéquitable de l’électricité entre les villes et les villages par la mise en œuvre de projets intégrés d’électrification rurale hors réseau.
Contexte et impact économique de l’électrification rurale au Mali
Afin d’améliorer l’accès à l’électricité en zone rurale, le Mali a choisi de s’appuyer sur des structures (entreprises privées, groupements d’intérêt économique, associations) indépendantes de l’opérateur historique qui exploitent des centrales électriques décentralisées alimentant des micro-réseaux. Ces structures, quasi exclusivement des entreprises, contrôlées par l’Agence Malienne pour le Développement de l’Énergie Domestique et de l’Électrification Rurale (AMADER), interviennent dans les zones non couvertes par l’opérateur national Énergie Du Mali (EDM). Actuellement, ces entreprises disposent d’une autorisation d’exploitation pendant une durée de 15 ans, renouvelable, et l’État participe le plus souvent au cofinancement initial des investissements. À elles de définir leur modèle économique, en tenant compte d’une tarification validée au niveau de l’AMADER pour celles qui reçoivent un appui financier de l’État. Initiée dans les années 2000, cette stratégie a permis de faire progresser le taux d’électrification rurale de 1 % en 2006 à 11,9 % en 2010 et 18 % en 2012. Après une première phase dans les années 2000 axée sur des solutions thermiques au gasoil, une seconde phase a commencé dans les années 2010 avec l’hybridation des centrales avec du solaire photovoltaïque (PV).
Le programme d’électrification rurale du Mali vise à répondre à plusieurs cibles : clients domestiques, éclairage public, clients productifs ou sociocommunautaires. L’utilisation productive de l’électricité est supposée générer des revenus qui vont améliorer les conditions de vie des populations. En outre, ces revenus devraient permettre de financer l’électricité de confort. Mais les retours du terrain montrent que cette grille de lecture ne correspond pas à la réalité. Alors que des progrès encourageants sont constatés en ce qui concerne l’utilisation domestique de l’électricité, l’éclairage public et l’électrification des centres sociocommunautaires, l’impact de l’électrification sur le développement des très petites entreprises (TPE) n’est pas si important. Les factures électriques des ménages ne sont pas financées par ces nouvelles activités, pas plus que le fournisseur d’électricité ne trouve dans ces clients productifs une source de recettes décisives. L’utilisation productive de l’électricité semble rester mineure, voire impossible pour certaines activités, car elle provoque pannes ou dégradation de la qualité du réseau électrique.
Il faut rappeler que la mise en œuvre du programme de l’électrification rurale au Mali est assurée par l’Agence malienne pour le développement de l’énergie domestique et de l’électrification rurale (AMADER) qui a été créée par la Loi N°03-006 du 21 mai 2003. C’est un établissement public à caractère administratif doté de personnalité morale et de l’autonomie financière qui a pour mission la maîtrise de la consommation d’énergie domestique et le développement de l’accès à l’électricité en milieu rural et périurbain. A ce titre, elle est chargée, entre autres, de promouvoir la recherche orientée vers les technologies et pratiques permettant d’assurer la maîtrise de l’énergie domestique, promouvoir la production, la diffusion et l’utilisation des équipements autonomes en bois-énergie, favoriser l’utilisation d’énergies renouvelables dans la consommation d’énergie domestique, intensifier la promotion de l’utilisation des combustibles de substitution au bois-énergie, promouvoir l’électrification en milieu rural et périurbain en servant d’interface entre les villages, les communes et opérateurs techniques et financiers, organiser et renforcer les capacités d’études, de réalisation et de gestion en matière d’électrification rurale.
Raymond Dembélé