Projet de révision constitutionnelle : Daba Diawara s’explique sans convaincre

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Malgré la grosse artillerie gouvernementale sortie pour la circonstance, le Ministre de la Réforme de l’Etat, Daba Diawara, assisté par le porte parole du Gouvernement, Sidiki N’Fa Konaté, Ministre de la Communication et des Nouvelles Technologies, n’a pas dissipé les inquiétudes des hommes de médias sur le bien fondé de certains projets de réforme et le moment choisi. C’était au cours d’une conférence de presse organisée à l’intention de 5 organes le samedi dernier à la Maison de la Presse.

Compte tenu, des réserves formulées par certains partis politiques et non les moindres sur l’échiquier national, ATT ne peut que compter sur ses amis. Sans une marge de manœuvre trop grande, le président du PIDS s’est longuement expliqué, sans toute fois convaincre sur le bien fondé de certaines propositions. Sans être foncièrement contre le principe des reformes, les hommes de médias ont émis tout comme les politiques, des réserves sur le moment choisi. A la lecture des grands axes du projet proposé aux réformes, nous pouvons les classées en deux catégories.

LES PARTIES SOUS RESERVE
Il s’agit notamment de la nationalité Malienne « d’origine » qui sera désormais exigée pour tous les candidats à l’élection présidentielle. Avec à l’esprit le concept de l’ivoirité qui a fait couler la Côte d’Ivoire, cette partie a suscité des inquiétudes chez les confrères. En définissant le concept de la nationalité « d’origine », Daba Diawara a souligné que c’est la nationalité qu’une personne tient de ses parents. Autrement dit, seul un enfant d’un père malien ou d’une mère malienne peut postuler à la présidence de la République.Ainsi, tout comme en Côte d’ivoire, des milliers de nos compatriotes qui ont bénéficié du droit de sol pour acquérir la nationalité dès leur naissance sont exclus du jeu. Si tel est l’esprit du projet en question, il y a forte à parier que cette exclusion ne manquera pas de susciter des grincements de dents.-Autre recul de la démocratie contenu dans le projet de reforme : il s’agit du renforcement du pouvoir du président de la République en cas de cohabitation. Là encore, Daba Diawara n’a pas convaincu. Pour justifier cette option qui est à l’opposé des pratiques dans les grandes démocraties, le Ministre des Réformes de l’Etat, fait allusion au pouvoir traditionnel des chefs en Afrique. Pour lui, il est difficile d’imaginer un pouvoir en Afrique en général et au Mali en Particulier où le président de la République élu par un suffrage universel direct accepte de s’effacer au profit d’un gouvernement.En clair, propose une démocratie à la malienne. A ce sujet, il a oublié de nous dire qui sera comptable du bilan  dans une telle situation. Malgré la confiance du peuple, si un parti majoritaire à l’assemblée nationale ne peut pas entièrement appliquer son programme où est la démocratie ? Dans l’esprit de ce projet, un Président de la République même minoritaire, reste le seul maitre à bord. C’est dire, que même le Président de la République a du mal à accepter son statut d’opposant s’il perd la majorité.Contrairement à l’effet escompté, cette disposition constituera un goulot d’étranglement pour notre démocratie. Et le président ne fera plus assez d’effort pour ne pas perdre sa majorité.Comme troisième point inquiétant, nous avons le remplacement du comité national de l’Egal Accès aux Médias d’Etat et le Conseil supérieur de la Communication. Si ce principe n’est pas mauvais en soi, le mode de désignation de cette nouvelle autorité Indépendante qui sera créée reste compris par les confrères comme une volonté d’ingérence. En effet, au lieu d’être élu par ses pairs, le président de cette autorité sera nommé par le président de la République. Pour justifier cet état de fait assimilé à un recul, Daba Diawara nage encore dans les eaux troubles. Pour lui, il y aurait eu un cas jurisprudentiel qui a mal tourné entre les 9 membres de la cour constitutionnelle. De toute évidence, la presse ne voit pas d’un bon œil cette mode de désignation de son premier responsable.En plus, des réserves ont été formulées concernant la pertinence de la création d’une seconde chambre, dans un contexte très difficile pour les populations.

LES REFORMES SALUEES

Certaines réformes ont été saluées. Il s’agit notamment : du renforcement des moyens d’action du Médiateur de la République ; la protection des droits et libertés ; le réaménagement des pouvoirs juridictionnels etc.En tout état de cause, le moment choisi pour les réformes constitue une bombe à retardement qu’il faut gérer si on ne veut connaître les évènements douloureux du Sénégal. Il appartient au Chef de l’Etat de savoir ménager les susceptibilités afin que notre démocratie puisse sortir grandie de cette étape. A suivre donc…

Lemzo Diallo

Les fausses notes de la conférence :
deux Ministres, seulement 5 Journalistes invités

A la lumière du déroulement de la conférence de presse sur les réformes constitutionnelles qui s’est déroulée le samedi dernier à la maison, certains se demandent  si toutefois, c’est une question  Nationale ou celle du PIDS. Pour cause, malgré l’importance du sujet pour tout le pays, Daba Diawara et son équipe n’a daigné inviter que 5 organes de presse jugés proches de son parti. En plus cette rencontre, avec leurs hommes de médias, n’a pas dissiper les inquiétudes quand au choix du moment.

Malgré le renfort de Sidiki N’Fa Konaté,  Ministre de la Communication et des Nouvelles Technologies, Porte parole du gouvernement, certains  faits sont restés à travers la gorge des journalistes. Difficile pour eux de croire que malgré l’importance du sujet et le déplacement de deux ministres que le département des Réformes de l’Etat ne s’est donné la peine que d’inviter 5 organes de presse seulement. Selon une source proche du ministère,  le choix de ces 5 organes aurait été fait par Daba en personne et en fonction des considérations politiques.Si tel est l’option choisie par le Ministre de la Réforme de l’Etat à tous les niveaux, il y a fort à parier que le Mali risque de connaître le cas du Sénégal. Il est temps que le président du PIDS sache que sa mission est nationale et par conséquent, qu’il laisse ses affinités politiques de côté. Nous ne sommes pas contre le fait qu’il truffe son département de ses compagnons politiques, d’autant plus que l’occasion se faisait de plus en plus rare. Mais qu’il n’invite que 5 organes par affinité et aucune radio pour une question nationale, nous sommes désolés mais cela est inacceptable.Comme pour en rajouter aux calvaires des hommes de médias, le chargé à la communication s’est volatilisé juste après la fin de la cérémonie. Pour une première, l’échec est consommé. Dorénavant, il appartient aux autorités de ne pas donner le mauvais exemple. Sinon, il y a fort à parier que ces réformes ont un dessous inavoué pour Daba et son parti. Car dans ces conditions, il est difficile de croire que la volonté de Daba Diawara est d’informée le maximum de malien.A bon entendeur salut

Lemzo Diallo  

Les grands axes du projet de révision constitutionnelle
1-    Il est proposé un réaménagement de l’Exécutif dans le cadre du régime semi-présidentiel1.1. Deux nouvelles conditions sont posées pour la recevabilité de la candidature à l’élection du président de la République : il faut être Malien « d’origine » et n’avoir aucune autre nationalité et être âgé de moins de 75 ans.1.2. Le Président de la République prête serment désormais devant la cour constitutionnelle (qui n’était pas créée en 1992) en gardant sa coiffure conformément aux dispositions du guide du protocole réglementant les tenues pour les cérémonies officielles.1.3. Le Président de la République conserve les pouvoirs propres que lui confère la constitution. En outre, il définit la politique de la Nation dont le gouvernement assure la conduite.1.4. La possibilité est donnée au Président de la république de mettre fin aux fonctions du premier ministre sans la présentation par celui-ci de la démission du Gouvernement. Dans la même logique, la fin de la mission du Premier ministre entraîne la démission collective  des autres membres du gouvernement.1.5. Il est prévu de laisser vacant le siège du député appelé au gouvernement. Dans ce cas, l’exercice de son mandat est suspendu.  A la fin de sa mission gouvernementale, sauf s’il fait l’objet de poursuites judicaires,  il retrouve son siège.1.6 Le régime de déclaration des biens du président de la république, du Premier ministre et des ministres a été réaménagé pour permettre le contrôle de véracité des déclarations et assurer un meilleur suivi de l’évolution du patrimoine.1.7 Le statut pénal du président de la République est complété. Un régime de sanction est organisé pour les infractions commises en dehors de l’exercice de ses fonctions.1.8 Le gouvernement demeure responsable devant l’Assemblée nationale qui peut le renverser. Mais, il ne peut présenter qu’un programme de gouvernement. 2. Le parlement est renforcé  2.1 Il est créé une seconde chambre, le sénat, qui imprimera une nouvelle dynamique au travail législatif et au contrôle de l’action gouvernementale.2.2 Les capacités du parlement sont renforcés tant pour l’exercice de la fonction législative que pour le contrôle de l’action  gouvernementale, notamment avec la possibilité qui lui est donnée de recouvrir à l’appui de la cour des comptes.3. Le pouvoir juridictionnel est réaménagé pour répondre aux exigences actuelles.3.1 Les compétences de la cour constitutionnelle en matière électorale (articles 33 et 86  nouveaux) sont réaménagés fin de la décharger de la proclamation des résultats des élections législatives et présidentielles. Elle ne connaîtra que des réclamations consécutives à la proclamation des résultats. Ses moyens sont renforcés  et les procédures d’investigations réaménagées pour faire mieux accepter ces décisions.3.2.  Pour renforcer l’indépendance des membres de la cour constitutionnelle  à l’égard des autorités de nomination, il leur est confié un mandat non renouvelable dont la durée est portée à 9 ans. Il est institué un renouvellement pars tiers des membres tous les 3 ans. Les neufs membres sont nommés, à concurrence de trois, par le président de la république, deux par le président de l’Assemblée nationale, deux par le président du Sénat et deux par le conseil supérieur de la magistrature. 3.3 Il est institué un contrôle par voie d’exception ouvert aux justiciables. En outre le Médiateur de la République peut solliciter de la Cour  à propos de la constitutionnalité des lois et des traités.3.4 La Cour suprême, constituée de la section judiciaire  et de la section administrative est maintenue en tant qu’institution constitutionnelle.3.5 L’actuelle Section des comptes devient la nouvelle  Cour des comptes,   juridiction suprême d’un nouvel ordre formé avec des chambres régionales des comptes.4. Le haut conseil des collectivités qui est resté sans impact sur le fonctionnement de l’Etat est supprimé.5. Le conseil économique social  et culturel est réaménagé dans ses attributions et ses modalités de fonctionnement. Son caractère d’organe consultatif est affirmé ainsi que le caractère facultatif de sa consultation. 5.1   L’exposé du recueil des attentes, des besoins et des problèmes de la société civile avec des orientations de la société civile avec des orientations et des propositions devant les institutions est de droit.5.2 Pour rendre effectifs les principes du tripartisme, les représentants de l’Etat seront des conseillers  à part entière désignés par le président de la République.5.3 A l’instar des autres institutions de la République,  l’organisation, les règles de fonctionnement  et la désignation des membres du CESC seront désormais fixées par une loi organique.6. Le médiateur de la république voit ses moyens d’action renforcés. Il peut consulter la Cour constitutionnelle et la cour suprême.7. Une nouvelle autorité indépendante dont le statut est organisé par une loi organique assure la régulation de l’audio visuel et veille au respect de l’expression plurielle des courants de pensée et d’opinion. Il remplace le comité national de l’Egal Accès aux Médias d’Etat et le Conseil supérieur de la communication.8. Le régime libéral actuel qui régit la formation des partis politiques est maintenu. Et il est consacré selon la voie appropriée, la possibilité pour les groupements politiques aussi de concourir  à l’expression du suffrage.9- de nouvelles perspectives sont ouvertes en ce qui concerne les élections     9.1 Il est donné un fondement constitutionnel  à l’élection des députés selon un système mixte combinant le scrutin  majoritaire  et la représentation proportionnelle.9.2 Les délais et le calendrier électoral sont revus pour tenir compte des  expériences vécues.9.3 Une meilleure assise juridique est donnée aux mesures de discrimination positive  favorisant l’accès des femmes aux mandats électoraux et fonctions électives.10. Les droits et libertés  sont mieux protégés avec l’institution du contrôle de constitutionnalité par voie d’exception.11. La  procédure de révision de la Constitution est assouplie par la possibilité ouverte d’y procéder sans passer par le referendum qui ne demeure obligatoire que pour la modification de la durée et de la limitation de mandats présidentiels.

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