Arrêt de la cour constitutionnelle du 4 juillet 2017 : IBK et l’Opposition se quittent dos à dos

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Autorités intérimaires : La Cour constitutionnelle rejette en bloc la requête l'opposition
Cour Constitutionnelle du Mali

Le projet de référendum du président de la République Ibrahim Boubacar Kéita ne sera pas abandonné comme le réclament vivement l’Opposition parlementaire, mais il fera plutôt l’objet d’un toilettage à la faveur d’un renvoi du texte à l’Assemblée nationale pour une seconde lecture avant sa soumission à l’appréciation souveraine du peuple. C’est dire qu’à l’heure du verdict final, il n’y a eu ni gagnant, ni perdant, les 9 sages de la Cour constitutionnelle ayant laissé l’initiateur du projet et les partisans du « Oui » ainsi que les défenseurs du « Non » quitter le terrain juridique après un mois de rudes empoignades dans la rue et via les médias et les réseaux sociaux.

Pour rappel, l’arrêt de la Cour constitutionnelle rendu le 4 juillet 2017 fait suite à la saisine de l’institution par l’opposition parlementaire à la faveur d’un recours en inconstitutionnalité du projet référendaire. Et la requête d’Ibrahima Sory Dembélé, un autre plaignant domicilié en commune V du District de Bamako, a  été jugée irrecevable. Les griefs formulés par les requérants étaient, entre autres, liés à la violation de l’article 118 de la Constitution du 25 février 1992, développée en deux branches, des insuffisances liées à la mouture du texte et à sa date d’adoption par l’Assemblée nationale.

Sur le fond de la polémique, la Cour constitutionnelle a largement suivi les partisans du projet de révision constitutionnelle dans leur logique et trouve qu’un  toilettage  s’impose avec urgence pour préserver l’unité nationale, l’intégrité du territoire, après la signature de l’accord pour la paix et la réconciliation nationale issu des pourparlers d’Alger entre le gouvernement et les mouvements armés en rébellion contre l’Etat.

Ainsi, pour motiver sa décision sur ce chapitre, les 9 sages de la Cour constitutionnelle signalent que la souveraineté du peuple s’exerce à ce jour par ses élus sur toute l’étendue du territoire national et qu’explicitement, en son article 3, l’Accord de paix  engage les institutions de l’Etat malien à prendre les dispositions requises pour l’adoption des mesures réglementaires, législatives voire constitutionnelles nécessaires à la mise en œuvre de cet accord, en vue de créer les conditions d’une paix juste et durable au Mali, pouvant contribuer à la stabilité sous régionale ainsi qu’à la sécurité internationale.

S’agissant de l’inopportunité de la révision (constitutionnelle en raison de la situation sécuritaire actuelle du pays) évoquée par l’Opposition dans sa requête, la Cour constitutionnelle a aussi tranché. « En tout état de cause, le défi sécuritaire imposé au Mali étant contemporain, le fonctionnement régulier de ses institutions ne saurait être tributaire de la pacification absolue du territoire national, elle-même dépendante d’un environnement d’instabilité transnationale, au risque de freiner le processus démocratique et de plonger le pays dans l’impasse et le chaos  et que dès lors, le citoyen ne peut être privé du droit d’exprimer son choix au sujet d’une loi de révision constitutionnelle», souligne l’arrêt de la Cour constitutionnelle.

Au sujet du grief portant sur les erreurs de date, la Cour constitutionnelle reconnait le tort du régime et demande une correction. Toutefois, elle trouve que cette erreur matérielle n’affecte pas la conformité de la loi à la Constitution.

Sur la question de la mouture du texte publiée en vue du référendum, la Cour constitutionnelle réconforte l’Opposition dans sa plainte et confirme que le texte n’est pas dans une forme qui sied à une loi de révision constitutionnelle.

Selon les 9 sages, la mouture actuelle du texte dénature son caractère modificatif et ne se distingue point d’une loi constitutionnelle originelle. Du coup, ils exigent qu’un correctif soit apporté à ce niveau aussi.

S’agissant de la non détermination de la durée du mandat des sénateurs désignés par le Président de la République, la Cour signale effectivement que l’article 61, tel que libellé, ne mentionne aucune indication sur la durée du mandat des sénateurs désignés par le Président de la République et demande en conséquence de corriger cette omission.

Statuant sur la question de la faculté de la révision constitutionnelle par le Congrès soulevée par les requérants, la Cour constitutionnelle rejette toute idée d’inconstitutionnalité de l’article 143 alinéa 2. Elle estime que l’inquiétude des requérants est prise en compte dans l’article 144 alinéas 2 qui dispose que «la laïcité et la forme républicaine de l’État ainsi que le multipartisme ne peuvent faire l’objet d’une révision».

Ainsi, au regard de la conclusion des membres de la Cour constitutionnelle, l’on est en droit de dire que la plainte de l’Opposition n’a pas été vaine et que les initiateurs et partisans du Oui n’avaient pas non plus totalement tort. En attestent les observations et omissions soulevées par la Cour constitutionnelle qui somme le président de la République, non pas à enterrer son projet de révision constitutionnelle, mais à renvoyer le texte devant les élus nationaux pour un nouveau vote.

Youssouf Z Kéïta

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