Face aux menaces terroristes, le Mali, le Niger et le Tchad ont décidé de s’unir en signant une convention judiciaire à Niamey, ce jeudi 11 mai. Elle vise notamment à renforcer la sécurité et le contrôle aux frontières.
Ce sont les trois ministres de la Justice du Niger, du Mali et du Tchad qui ont signé cette convention de coopération judiciaire. Des « accords historiques », disent-ils, au moment où ces mêmes pays sont menacés par le terrorisme transfrontalier.
« Il a fallu attendre le développement du terrorisme dans le Sahel pour qu’avec l’aide de nos partenaires, on puisse mettre en place ce mécanisme juridique », explique le professeur Ahmat Mahamat Hassan, ministre tchadien de la Justice.
Les frontières entre ces trois pays n’existent plus en matière judiciaire. « L’entraide sera totale », assure le ministre nigérien de la Justice, Marou Amadou. « Si nous pouvons faire l’extradition d’un détenu là où on peut mieux le juger, là où on a plus d’information, c’est déjà bien, s’il y a des avis de condamnation, on sait qui séjourne dans quel pays, les échanges de casiers judiciaires. »
Les experts des trois pays ont mis deux ans pour aboutir à ces résultats. Les terroristes seront traqués. « Il faudra absolument que les magistrats, les officiers de police judiciaire aient les moyens de pouvoir les poursuivre, les traquer, les arrêter, les inculper et les écouter partout où ils sont », ajoute Ahmat Mahamat Hassan.
Deux pays menacés par Boko Haram n’ont pas encore signé cette convention judiciaire : le Cameroun et le Nigeria.
Frontières poreuses
Trafic de drogue, d’armes, d’êtres humains, attaques de groupes jihadistes sahéliens ou de Boko Haram… C’est pour faire face à ces menaces que les autorités nigérienne, malienne et tchadienne comptent, par cet accord, faire tomber les frontières judiciaires entre leurs pays.
Car les trafics sont par nature transfrontaliers. Quant aux terroristes, qu’ils fassent la promotion d’un jihad global, comme les groupes sahéliens, ou tentent d’implanter leur idéologie à la croisée de plusieurs Etats, comme Boko Haram, ils n’ont que faire de ces barrières étatiques. Si ce n’est pour les utiliser comme entrave aux poursuites, à l’image des attaques menées en début d’année dans la région de Tillabéri, au Niger,
par des assaillants venus du Mali qui ont repassé aussitôt la frontière.
Permettre qu’un ressortissant des pays signataires puisse être jugé indifféremment dans l’un des trois pays, partager les informations sur des suspects, mener des enquêtes conjointes… Autant de mesures qui visent à mettre la justice des trois pays en phase avec la réalité du terrain, pour une réponse plus rapide, efficace et coordonnée.
Mais pour cela, il faut que les moyens humains, en nombre et compétences, et les moyens financiers des justices de chacun des pays, soient renforcés. Faute de quoi, la seule volonté de conjuguer les efforts de systèmes judiciaires nationaux fragiles ne suffira pas à donner corps à cette justice transnationale.