Sofara (région de Mopti) : Peur sur la ville

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Mali: inauguration du quartier général de la force conjointe du G5 Sahel
La force conjointe du G5 Sahel sera basée à Sévaré, près de Mopti (photo), dans le centre du Mali. © Getty Images/Friedrich Schmidt

Les populations de la ville de Sofara, (région de Mopti) tout comme d’autres localités en 5eme région sont de plus en plus privées de leur droit d’organiser des festivités pour célébrer les mariages ou encore les baptêmes.

A Sofara les habitants vivent dans la peur.

Les habitants de Sofara,  chef-lieu de la commune de Fakala dans le cercle de Djenné, vivent actuellement au rythme que leur imposent des groupes terroristes. Pour cause, ils sont privés depuis quelques temps de leur Droit de célébrer le mariage ou le baptême.

En effet, une famille avec qui nous partageons le même village, décide d’aller célébrer (ce 31 Décembre 2017) le mariage de leur fille à Sofara en grande famille, où il était également prévu une autre union.

Nous avons alors décidé d’effectuer le voyage avec la famille.

Nous voilà dans la ville de Sofara après quelques heures de route. Mais, notre joie sera de courte durée, puisque subitement nous vîmes deux hommes enturbannés arrivés à bord d’une moto.

C’était la veille des mariages (30 décembre dernier). Les deux ‘’diables’’ ont demandé à voir la famille des mariées. Après quelques minutes d’échanges avec celle-ci, ils remontèrent sur leur moto.

Tout le monde était curieux de savoir ce qu’ils voulaient, et le message était clair.

« Ces deux hommes enturbannés sont venus nous annoncer de ne rien organiser, ni ce soir, ni demain comme  festivité, du contraire, il yaura des cravates au cours de la cérémonie. Pas de mairie, donc pas cortège, pas de micro», a lâché la mère d’une des futures mariées.

Et d’ajouter, les larmes aux yeux : « Si je pouvais, j’annulerai tout. Parce que, c’est une occasion qui est censée ne se présenter qu’une fois dans la vie d’une femme.

La frayeur a succédé à la joie durant le reste de la journée de ce 30 décembre 2017.

Terrorisme à visage découvert

Arrivés le matin,  (jour des mariages) les deux hommes enturbannés s’invitèrent encore à la cérémonie.  Curieusement, ils ne se cachaient même pas. Assis côte à côte, dans la foule visiblement inquiète, ils causaient tout naturellement.

La peur au ventre, tous les participants à la cérémonie avaient les regards tournés vers les  deux ‘’invités’’ surprise qui semblaient dire : «  nous sommes là, n’oubliez surtout pas !’’

En plus, ils effectuaient des vas et viens autour  de la concession.

A l’heure des repas, les deux intrus viennent manger comme tous les invités.

Il a fallu attendre jusqu’à 16 heures, pour que les deux hommes remontent sur leur moto avant d’avertir.

« Si vous tentez quoi que ce soit, je dis bien quoi que ce soit, vous allez bien nous entendre. N’oubliez jamais, nous avons des yeux et des oreilles partout. Vous êtes prévenus ».

Ainsi, ils sont partis sans faire de dégâts. Comme dit l’autre, plus de peur que de mal.

Cependant, il faut noter que ce cas n’est qu’un exemple parmi tant d’autres dans la région de Mopti.

Selon les témoignages recueillis sur place, les populations de plusieurs localités de cette région centre de notre pays sont constamment victimes de cas d’intimidation, de torture et d’autres formes de violence comportant des violations directes des Droits de l’homme.

« Notre localité n’est pas la seule concernée, des villages environnants aussi. On ne sait pas comment ils font, mais ce qui est sûr, ils sont bien informés. Nous essayons tant bien que mal de vivre avec. Parce que, la présence de l’Etat se fait rare.  Nous ne pouvons que nous conformer à leur loi pour ne pas perdre la vie »,  nous dit résigné, un habitant de Sofara.

Selon cet autre, croyant garantir leur propre sécurité et celle de leur famille, beaucoup  de nos jeunes se font recruter au sein des groupes terroristes.

Face à cette insécurité grandissante, le rétablissement de l’autorité de l’État et le redéploiement progressif des forces de défense et de sécurité du Mali est la seule solution pour améliorer la situation des droits de l’homme dans la région de Mopti.

Envoyé spécial

Djibril Kayentao

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