Le collectif des élus du nord, qui regroupe en son sein conseillers nationaux, maires et députés des localités aux mains des groupes armés depuis bientôt un mois, dresse un tableau peu reluisant de la situation des populations déplacées.
À la faveur d’une conférence de presse animée vendredi dernier à l’hôtel nord-sud, les élus du nord ont brossé la situation humanitaire qui prévaut dans la zone et surtout profité de l’occasion pour lancer un appel à la communauté internationale afin de sauver les populations du désastre humanitaire qui se profile à l’horizon. «Si rien n’est fait, la donne pourra changer et il sera difficile de reconquérir le terrain, car les mouvements armés sont à pied d’œuvre pour asseoir leur autorité et idéologie», selon le porte-parole du collectif, député élu à Tombouctou, El Haj Baba Haïdara dit Sandy. Suivant ses propos, la situation humanitaire est catastrophique dans ces régions et risque de perdurer si des mesures appropriées ne sont pas prises dans les meilleurs délais. D’après El Haj Baba Haïdara, le nombre des personnes déplacées vers l’intérieur du pays déjoue tout calcul, d’autant plus que depuis le début de l’invasion armée, les familles bamakoises ne cessent d’accroître.
L’administration pillée. El Haj Baba Haïdara a par ailleurs peint l’étendue des dégâts. Il ressort de ses commentaires que l’administration publique a été pillée, que les services sanitaires sont quasi-inexistants, alors que les stocks de sécurité alimentaire et les produits PAM sont totalement mis à sac. À l’en croire, il y a lieu de s’inquiéter surtout que les nouvelles autorités ont jusqu’ici du mal à se mettre autour de l’essentiel. Quand dans le même temps, le Premier ministre de la transition Cheick Modibo Diarra a signifié malencontreusement que tout le pays souffre d’une crise alimentaire. Au moment où l’urgence demeure l’obtention d’un corridor humanitaire pour une zone déjà occupée par des groupes armés sans foi ni loi.
À propos de l’envoi d’une force de maintien de la paix de la CEDEAO, le conférencier a estimé qu’il est urgent que celle-ci se déploie afin de parer au vide qu’a laissé le départ des militaires maliens dans cette partie du territoire. Car, selon lui, la réalité du terrain exige cette intervention. À défaut, croit-il savoir, «Le Mali doit même attaquer la structure sous-régionale pour non assistance à un pays en danger». El Haj Baba Haïdara a en outre fustigé le comportement de ceux qui agissent pour la partition du pays. Ces derniers, dit-il, «n’ont jamais été mandatés par les populations. Désormais s’il y a des négociations, elles doivent se faire avec les populations majoritaires qui ne sont pas pourtant ceux qui revendiquent une indépendance. Il s’avère nécessaire d’impliquer les autres composantes du nord».
À la suite du député de Tombouctou, le doyen Nock Ag Athia a levé un coin de voile sur l’amalgame qui fait de tous les touaregs des rebelles. «Personne n’est plus patriote que moi. Je suis Malien et le resterai», a-t-il déclaré. C’est un tonnerre d’applaudissements qui a accueilli cette annonce qui, faut-il le rappeler, n’est pas une surprise pour qui connaît l’attachement de l’homme aux valeurs fondatrices du Mali. La preuve, il fait partie de rares touaregs à avoir quitté son Diré natal au plus de la rébellion des années 1990 et ce n’est pas par hasard que le général Moussa Traoré a qualifié sa section de pilote avec palme. Tout un symbole. De fait, son refus de l’irrédentisme lui vaut la haine des autres touaregs. «Aujourd’hui je n’ose pas aller à Dire sinon on va me tuer», a-t-il lancé de façon ironique. Le Doyen Nock Ag Athia plaid en faveur de la reconquête du territoire national. Au plus tôt.
Mahamane Cissé