Le secrétaire général des Nations Unies, Antonio Guterres a publié, le 28 décembre 2020, son rapport trimestriel sur la situation au Mali. Ce rapport de 21 pages met l’accent sur la situation sécuritaire, humanitaire, politique, judiciaire et juridique qui prévaut au Mali. Le rapport évoque également le processus de paix au Mali à travers la mise en œuvre de l’accord pour la paix et la réconciliation issu du processus d’Alger. Le rapport de Antonio Guterres révèle que les Forces de défense et de sécurité maliennes, les forces internationales, la MINUSMA (Mission multidimensionnelle intégrée des Nations Unies pour la stabilisation au Mali) et les groupes armés signataires ont essuyé 35 attaques asymétriques. Selon le rapport, ces attaques ont causé la mort de 30 soldats maliens et d’un Casque Bleu. «Au 1er décembre, 232 événements avaient été signalés au total : 182 civils avaient été tués, 175 blessés et 163 enlevés dans tout le Mali», précise Antonio Guterres dans son rapport.
Selon le secrétaire général des Nations Unies, Antonio Guterres, les autorités maliennes ont pris une première série de mesures pour préparer la tenue d’élections présidentielles et législatives à la fin de la période de transition, malgré des obstacles de taille. Avant d’ajouter que le 27 octobre 2020, le Président de la transition, Bah N’Daw, a rencontré les membres de la Cour constitutionnelle pour examiner la question de la tenue des élections. Le rapport du secrétaire général des Nations Unies indique que la situation dans le centre du Mali reste très préoccupante. « Une série de violences graves a été enregistrée dans la région de Ségou où, depuis début octobre, le village de Farabougou et des villages voisins de la commune de Dogofri, dans le cercle de Niono, ont été la cible d’attaques et de blocus de la part de ce que l’on présume être des combattants extrémistes. Le siège et le blocus des villages ont causé la mort d’au moins six civils et fait des dizaines de blessés, et se sont traduits par l’enlèvement d’au moins 20 civils, le déplacement de plus de 2 000 familles des villages des communes de Dogofri, de Mariko, de Siribala et de Sokolo et des vols de bétail. On estime que près de 4 000 personnes sont actuellement bloquées dans le village de Farabougou, privées d’accès aux biens de première nécessité et aux soins de santé et constamment menacées de violences. Plusieurs initiatives de médiation et d’aide humanitaire ont été mises en place autour de Farabougou, avec des objectifs distincts, notamment l’accès humanitaire, l’atténuation et la désescalade des conflits et la réconciliation. La force de la MINUSMA a effectué 25 sorties d’hélicoptères militaires dans les zones touchées afin de transporter 64 soldats des Forces armées maliennes et de livrer plus de 30 tonnes de vivres et autres fournitures », révèle le rapport de Antonio Guterres. Dans la région de Mopti, ajoute le rapport, les milices d’autodéfense et les groupes extrémistes ont continué d’exploiter les conflits intercommunautaires, alimentant la violence contre les civils et entraînant des atteintes à la sécurité, principalement dans les cercles de Bandiagara, Bankass, Douentza et Koro. Antonio Guterres a fait savoir que les groupes terroristes, en particulier le Groupe de soutien à l’islam et aux musulmans (GSIM) et l’État islamique du Grand Sahara (EIGS), ont continué d’étendre leur influence dans le centre et ont attaqué et menacé les populations locales de plusieurs villages. A ses dires, les affrontements entre communautés et groupes terroristes se sont poursuivis, entraînant le blocus de plusieurs villages, avec des conséquences désastreuses pour de nombreux civils. Le blocus le plus important a été signalé dans le village de Farabougou, dans le cercle de Niono (région de Ségou). A l’en croire, l’utilisation d’engins explosifs improvisés par des groupes armés a continué d’entraver la liberté de mouvement des civils et des forces de sécurité.
Transition au Mali : « Il est urgent de s’atteler aux réformes…»
Antonio Guterres a fait savoir que les Forces de défense et de sécurité maliennes, les forces internationales, la MINUSMA et les groupes armés signataires ont essuyé 35 attaques asymétriques ; 55 % d’entre elles se sont produites dans le nord du Mali, dont 14 % dans la région de Kidal, 33 % à Tombouctou et 8 % à Gao. Pour la première fois, précise le rapport, des attaques à l’engin explosif improvisé ont été enregistrées dans les régions de Koulikoro et de Sikasso, dans le sud du Mali. Le centre du Mali a été le théâtre de 45 % des attaques, dont 36 % se sont produites dans la région de Mopti et 9 % dans celle de Ségou. Aux dires du secrétaire général de l’ONU (Organisation des Nations Unies), les Forces de défense et de sécurité maliennes ont été la cible de 17 attaques au cours desquelles 30 soldats ont été tués et 48 blessés. Pour lui, la MINUSMA a subi 13 attaques qui ont fait un mort et 10 blessés parmi les soldats de la paix. Il a signalé que le 30 novembre 2020, les camps de la MINUSMA à Kidal, Ménaka et Gao, que la Mission partage avec les Forces armées maliennes et les forces internationales, ont été visés simultanément par des tirs indirects de mortier. Selon lui, aucune perte et aucun dommage matériel n’ont été signalés. Au cours des trois derniers mois, dit-il, une attaque a été menée contre des groupes armés signataires et a abouti à l’enlèvement d’un de leurs membres : le 13 octobre, des motards armés non identifiés ont enlevé un combattant du groupe Ganda Izo. Selon Antonio Guterres, la police de la MINUSMA a dispensé une formation à 525 membres du personnel de sécurité malien, dont 87 femmes dans divers domaines, notamment la protection des civils, la police de proximité et la lutte contre la violence basée sur le genre. «Au 1er décembre, 232 événements avaient été signalés au total : 182 civils avaient été tués, 175 blessés et 163 enlevés dans tout le Mali. Les actes de violence ont donc diminué par rapport à la période précédente, durant laquelle 343 événements avaient été signalés : 375 civils avaient été tués, 450 blessés et 93 enlevés », a précisé Antonio Guterres. La MINUSMA a recensé 483 violations des droits humains (88) et atteintes à ces droits (395), soit 237 de moins que pendant la période précédente. Il s’agissait d’exécutions extrajudiciaires, sommaires ou arbitraires (29 victimes), d’autres meurtres (96), de violations du droit à l’intégrité physique ou d’atteintes à ce droit (123), de disparitions forcées (2), d’enlèvements (111), d’actes de torture et autres traitements cruels, inhumains ou dégradants (15), de détentions illégales, y compris de détentions prolongées et de violations des garanties d’une procédure régulière (107), ainsi que de nombreux cas de destruction de biens et de pillage, d’attaques contre le personnel humanitaire et d’atteintes à la liberté de conscience par des groupes extrémistes violents. Toujours, selon Antonio Guterres, la MINUSMA a continué d’offrir un soutien logistique et technique et un soutien en matière de renforcement des capacités à la Commission vérité, justice et réconciliation (CVJR), qui à ce jour a enregistré 18 722 dépositions, dont celles de 7 482 femmes et de 790 enfants. Il a souligné que la situation humanitaire reste très préoccupante. « La pandémie de maladie à coronavirus (COVID-19), la violence à l’intérieur des communautés et entre elles, ainsi que les effets des changements climatiques ont encore accru les besoins humanitaires. Le nombre de personnes déplacées au Mali a augmenté, passant de 287 496 en juillet 2020 à 311 193 en octobre, et quelque 143 301 réfugiés maliens étaient toujours présents dans les pays voisins », a-t-il dit. Il a rappelé que la sécurité alimentaire s’est aussi fortement dégradée au cours du dernier trimestre. «Alors que près de trois mois se sont écoulés depuis le début du processus de transition de 18 mois, il est urgent de s’atteler aux réformes institutionnelles, constitutionnelles et électorales, seule façon de s’attaquer aux causes profondes des problèmes », précise le secrétaire général de l’ONU dans son dernier rapport sur le Mali.
Aguibou Sogodogo