Pourrissement de la situation sécuritaire au Sahel: la France en pompier-pyromane ?

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Les pays du Sahel et le Mali, en particulier, font face à une recrudescence de l’insécurité, à cause d’un afflux djihadiste, sans précédent, vers cette partie du monde peu peuplée et mal quadrillée par les forces de sécurité nationales. Zone de convergence de nombreux intérêts géopolitiques et géostratégiques, les pays du Sahel sont l’objet de toutes sortes d’accusations : corruption, mauvaise gouvernance handicapant non seulement le développement des zones, mais aussi l’efficacité des forces armées et de sécurité. Heureusement qu’il y a encore des observateurs, aux regards plus ou moins neutres, pour situer souvent les choses dans leur contexte. En tout cas, le colonel algérien à la retraite, Abdelhamid Larbi Cherif, dans un entretien accordé au Quotidien algérien ‘’l’Expression’’ situe clairement les responsabilités des uns et des autres et pointe un doigt accusateur en direction des pays de la rive nord de la Méditerranée, à savoir la France, l’Espagne et l’Italie…

Selon le chroniqueur Christophe Ayad, responsable du service International du « Monde », la France, qui est intervenue au Mali pour chasser les djihadistes en 2012 ou du moins arrêter leur progression vers le Sud, ‘’est fatiguée de tenir à bout de bras et de financer un pouvoir corrompu et inefficace’’. Cependant, il estime l’impossibilité pour l’ancienne Métropole de lâcher notre pays, sous peine de perdre un champ de bataille devenu stratégique de la « guerre contre le terrorisme ».

Un regard erroné du conflit malien !
Le chroniqueur qui semble tout ignorer des réalités du conflit de notre pays, va jusqu’à comparer la situation malienne pour la France, à ce que l’Afghanistan est pour les États-Unis.
« Cette histoire, emblématique, pourrait être celle de l’Afghanistan, depuis 2001 : un succès militaire, suivi d’une reconstruction ratée et du retour progressif d’une insurrection, plus aguerrie et politiquement plus habile. En fait, elle est de plus en plus celle du Mali, du moins de sa partie septentrionale », précise-t-il.
Plus l’armée française y est engagée, plus la situation se dégrade et plus se renforce ce qu’elle était venue combattre : le djihadisme armé qui gagne progressivement à sa cause les populations peules du Centre du pays, après avoir séduit une partie des Arabes et des Touaregs du Nord.
Ignorant tout des différents rapports de l’ONU sur la situation sécuritaire du Mali, le chroniqueur mal inspiré martèle : « la faute à IBK, rétorquent les Français « off the record » : il n’a ni voulu ni pu appliquer les accords de paix signés avec les groupes armés dans le nord du pays, a détourné l’argent prévu pour la reconstruction de cette région délaissée et sinistrée, secouée par les soulèvements séparatistes, décimée par une année de règne djihadiste (en 2012) ; il n’a rien fait pour reconstruire l’armée malienne, se reposant sur les Français de l’opération « Barkhane » (qui a succédé en 2014 à « Serval ») et les Casques bleus de la Minusma décimés par les embuscades, les attaques au mortier et les engins explosifs improvisés ; enfin, IBK sous-traiterait le centre du pays à des notables islamistes ».

Les efforts ignorés
Pourtant, dans le dernier rapport du Secrétaire général de l’ONU sur la situation au Mali, les soldats maliens sont les plus touchés par les attaques djihadistes : ‘’les groupes terroristes ont mené, durant ces trois derniers mois, 71 attaques sur l’ensemble du territoire (37 contre les Forces de défense et de sécurité maliennes, 31 contre la MINUSMA, dont 4 contre ses sous-traitants, 2 contre un groupe armé signataire et 1 contre l’Opération Barkhane)’’.
Aussi, ces propos semblent ignorer tous les efforts faits par les autorités maliennes et les partenaires de notre pays pour la renaissance de l’armée du Mali : formation des GTIA ; acquisitions d’équipements militaires et réalisations d’infrastructures militaires ; adoption de textes législatifs et règlementaires pour l’amélioration des conditions de travail et de vie de nos soldats et leurs familles (le Statut général des militaires, la Loi d’orientation et de programmation militaire)…
De son côté, dans l’entretien qu’il a accordé au quotidien algérien, ‘’l’Expression’’, Abdelhamid Larbi Cherif, colonel à la retraite, situe clairement les responsabilités des uns et des autres dans le pourrissement de la situation sécuritaire au Sahel et pointe un doigt accusateur en direction des pays de la rive nord de la Méditerranée, à savoir la France, l’Espagne et l’Italie…
Selon lui, ‘’il est un fait avéré que la France est directement responsable de la détérioration de la situation sécuritaire au Sahel, ainsi que de la vague de migrants qui déferle sur l’Europe’’. La France avec ses actions unilatérales et précipitées au Sahel, le payement des rançons au profit des terroristes, suivis par les opérations Serval, Barkhane et le G5, a ruiné la zone et l’a plongée dans le chaos, soutient-il. Il a rappelé à ce propos que les terroristes qui étaient une soixantaine et sévissaient dans les monts de Taghergher à la frontière nord-ouest du Mali, ont pu, grâce à l’argent des rançons, créer des alliances avec les tribus et financer pas mal de groupuscules armés.
« Les conséquences de l’action irréfléchie de la France ont donné l’occasion à Mokhtar Belmokhtar de financer, d’armer et de former le groupe de Boko Haram, étendant, par là même la superficie de l’instabilité en Afrique. Cette phalange qui a fait allégeance à Daesh, a donné un prétexte aux USA d’entrer en Afrique. Des informations précises font d’ailleurs état du déplacement de Belmokhtar et son groupe vers la Libye, une dizaine de jours avant le lancement de l’opération Serval. La suite tout le monde la connaît, c’était l’assaut terroriste sur l’usine de gaz de Tiguentourine », a-t-il révélé dans son entretien.
Cette attaque, souligne le colonel à la retraite, avait pour objectif affiché de faire pression sur la France pour l’amener à mettre un terme à son opération au Mali. Abdelhamid Larbi Cherif accuse la France de ne pas tenir compte des souffrances des autres.
« Ses intérêts priment sur tout. Paris cherche prioritairement à défendre son héritage colonial dans cette région du monde », enfonce-t-il.

Gestion des flux migratoires
Sur la question de la migration, un autre mal des pays du Sahel, le colonel à la retraite estime que certains pays européens ont une solution ‘’ponctuelle et superficielle’’ pour un phénomène plus profond. Au lieu de faire des études et trouver des solutions avec la création d’un climat stable et durable pour arrêter ce flux, les pays européens font dans la fuite en avant, dit-il.
« Ils ne font en réalité que gagner du temps, en transformant les pays maghrébins en prisons à ciel ouvert pour migrants. La réalité est bien là : l’Europe défend ses intérêts en bloc et donne des avantages à certains Etats du Sud pour faire le sale boulot. Mais, dans le fond, ce qui arrive en Méditerranée occidentale est le résultat des défaillances d’une politique que je qualifierais de néocoloniale ». Selon lui, la migration est une opportunité aux manipulateurs du terrorisme pour lancer des actions dans le but de maintenir leur hégémonie et exécuter leur plan profitant de la fragilité, du désespoir et des malheurs des populations des pays pauvres.
Il fait remarquer que les terroristes se servent de ce flot migratoire favorisé par la déstabilisation de la Libye pour y injecter des jeunes embrigadés, véritables kamikazes en puissance.

Par Sidi Dao

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