C’est suite à plusieurs missions de bons offices et de réconciliation dans le cercle de Niono par la délégation de la commission nationale de réconciliation du Haut Conseil Islamique du Mali depuis le 05 décembre 2021 , afin de trouver des passerelles de discussion entre les djihadistes et les milices donzos , d’une part faciliter la réconciliation et la cohésion sociale entre les différentes communautés, l’ampleur des souffrances de la populations du cercle de Niono depuis plus de six mois, du village de Farabougou par des djihadistes. Ces souffrances se résumaient par la mort de plusieurs morts, la destruction de plusieurs milliers de récoltes, vol ou confiscation de près deux tiers du cheptel. Aussi, il faut noter que des dizaines de villages sont sous blocus et les habitants n’ont pas la liberté de s’aventurer au-delà d’un ou deux km de leur village.
-maliweb.net- Les différentes missions conduites par le Haut Conseil Islamique du Mali lui ont permis de mettre en évidence plusieurs sources de tensions et de menaces, d’actes de violence dans tout le cercle de Niono. Elles ont aussi permis de mettre en lumière les multiples lignes de fracture et de défis qui s’opposent à la paix et à la sécurité dans le cercle de Niono entre les mouvements djihadistes et des milices donzos. Elles ont également permis d’échanger sur les perspectives et les esquisses de solutions envisageables, face aux menaces et défis que constituent ces groupes djihadistes et les milices donzos dans le cercle Niono. De ces missions, il est largement ressorti que l’activisme des djihadistes et les milices donzos est en train d’exacerber toutes les lignes de fractures traditionnelles (ethniques et religieuses) dans toutes les localités du cercle Niono, avec possibilité de s’élargir violemment dans toutes les autres localités de la région de Ségou, si rien n’est fait immédiatement.
C’est ainsi q’un accord de « cesser le feu » sur toute étendue du cercle de Niono a été signé entre les djihadistes et les donzos, le 14 mars 2021 dernier ayant permis aux djihadistes de libérer définitivement le village Farabougou.
Dès la rentrée en vigueur de l’accord, force est de constater, qu’il a déjà suscité de l’espoir chez les populations de Niono. Il a fait renaitre un sentiment de joie et d’optimisme dans le cercle des populations vu que depuis six mois, elles font face à une insécurité grandissante avec ses corollaires de morts et de blessés, d’enlèvements de personnes et de bétails, d’interdiction d’accéder aux champs de culture, de déplacement des populations, et de destruction de milliers d’hectares de culture (brulés, volés ou détruits par des oiseaux…) Les populations du cercle de Niono que nous avons rencontrées savent bien combien cette paix retrouvée représente à leurs yeux. Depuis le lundi matin 15 mars, des premiers prisonniers ont été libérés. Le blocus sur Farabougou et d’autres villages a été levé.
Des femmes ont repris le chemin pour les maraichages. Des déplacés ont regagné leurs domiciles sans aucune difficulté.
Cependant, cette paix reste toujours fragile, si des mesures d’accompagnement ne sont pas prises très rapidement. Ces mesures doivent s’appuyer sur les recommandations de la Conférence d’Entente Nationale et les conclusions du Dialogue National Inclusif pour un règlement maliano-malienne de la crise.
L’objectif est de réduire l’expansion de l’idéologie religieuse radicale dans notre pays, et de sortir de la seule option militaire. Les perspectives s’annoncent difficiles en raison du mode singulier qui ne retient présentement que l’option militaire comme seule alternative à cette insécurité idéologique, face à la pluralité des acteurs radicaux qui démontre toute la complexité du phénomène et suggère une pluralité de solutions adaptées. Sur ce point seuls les maliens sont légitimés pour rationaliser une nouvelle dynamique sur la base de mécanismes traditionnels de gestion de conflits. Ce recours aux méthodes traditionnelles de médiation à de Niono par le Haut Conseil Islamique est la parfaite illustration de la force et de la valeur des règles traditionnelles de médiation.
Pour ce qui concerne le cas spécifique du cercle de Niono, les médiateurs du Haut Conseil Islamique recommandent de : Négocier l’élargissement de l’accord qui vient d’être conclu entre djihadistes et donzos à tous les autres belligérants dans le cercle ; Négocier la libération de tous les représentants de l’Etat enlevés dans le cercle. Elargir cette expérience de Niono à toutes les autres localités touchées par les problèmes similaires ; mettre en place un cadre de concertation permanent entre les leaders religieux et forces de défense et de sécurité dans toutes les régions et tous les cercles du Mali ; élaborer une stratégie de désarmement total et sans condition de tous les groupes et milices armés, ou de les mettre sous commandement militaire avant qu’il ne soit trop tard.
Farabougou enfin libéré !
Il y’a six mois, Farabougou était dans la famine, dans l’insécurité et dans l’incertitude. Farabougou était enclavé, pas de route, pas d’éducation et pas de centre de santé. Aujourd’hui Farabougou est libéré et rentre dans l’histoire grâce à l’accord de paix signé ce dimanche 1er mars 2021 entre djihadistes et donzos sous la facilitation du Haut Conseil Islamique du Mali représenté par une délégation de 7 membres avec à sa tête le Secrétaire Général Adjoint du Bureau Exécutif National en la personne de Moussa Boubacar BAH (Chef de mission, Bocary DIALLO rapporteur, Mamadou Moukfa HAIDARA point focal , Mamadou BASSOUM interprète, Yacoub SYBI facilitateur et enfin M Sambourou DIALLO représentant de TabutalPulakou.
Une semaine après la signature de l’accord de paix, la même délégation du HCIM a pris son « bâton de pèlerin » pour aller sur le terrain, constater si réellement l’accord est respecté dans sa globalité par les différentes parties prenantes basées dans les villages qui sont : Niono, Dedoubouba, Dogofri, B 3, Tièmaba, N 8 courani, M’Bewani, N’Dianabougou, Farabougou, Kroumakoubé, KimbiriWèrè (commune de Diabaly), N’Gounando, SambèrèKokodji et KouyéBamanan.
Pour l’étape de Farabougou, la plus dure et sensible phase a concerné la rencontre de la délégation avec les djihadistes et par la suite avec les donzos et enfin avec les deux entités. Hier ennemis et aujourd’hui amis se rendant ensemble à DogofryBa sous escorte le mardi 23 mars, jour de foire, pour un meeting d’information aux populations sur le contenu de l’accord.
Après le meeting, cap sur Farabougou 15 km de Dogofry toujours sous escorte, pendant 3 h pour pouvoir arriver. Deux jours avant l’entrée dans Farabougou, les djihadistes, ont entrepris de déminer toutes les mines autour du village afin de permettre l’accès à Farabougou en toute sécurité. Au cours du parcours conduisant à Farabougou, on a pu observer un paysage abandonné, des champs de riz carrément brûlés. A Bouroukouko un village voisin peul à moins 2 km de Farabougou, nous avons pu apercevoir trois ânes et une quinzaine de corps de donzos décomposés. Il nous revient que pendant que Farabougou était assiégé par les djihadistes, les donzos de Dogofry avaient tenté de libérer le village et ils sont tombés dans un guet-apens de leurs adversaires et certains membres de la délégation ont pu identifier des frères qu’ils n’avaient plus de nouvelles il pendant au moins 6 mois. Tout au long du parcours nous avons vu apparaitre trois djihadistes sortir de leurs cachettes avec des mitrailleuses pour nous saluer : quelle frayeur !
Enfin, nous arrivons à Farabougou, nous sommes obligés de laisser nos véhicules car tous les ponts reliant Farabougou ont été dynamités par les djihadistes, il faut faire le reste du trajet à pieds ou sur un tracteur.
A Farabougou-village pas de présence de l’Etat ni aucun service social de base, seule la présence de l’armée malienne, d’ailleurs pour quel but, car elle n’arrive pas à sortir du village et faire des mouvements. Vous pourriez imaginer à travers les images comment la joie des populations martyres de Farabougou étaient grande de voir pour la première fois pendant 6 mois une délégation étrangère ainsi que le retour de certains des frères bloqués à Dogofry depuis le début de l’évènement.
Après les civilités, la délégation du HCIM dirigé par Moussa Boutoutbacar BAH Chef de mission expliquera les raisons de la médiation qui a abouti à l’accord de paix.
Du chef de village, l’Iman, la jeunesse et les femmes ont tous apprécié que la paix revienne définitivement à Farabougou à travers la médiation du HCIM. De vives voix, ils ont sollicité l’aide du peuple malien et du Gouvernement, car la saison hivernale et le mois de ramadan sont pour bientôt, pour cela, ils ont besoin des bœufs de charrues ou des tracteurs pour les travaux champêtres. Pour le mois de ramadan, ils aimeront avoir des vivres. Ils demandent également la reconstruction de leur mosquée en état de délabrement.
Il urge pour l’Etat d’envoyer immédiatement les services sociaux sanitaires car le besoin en raison du nombre élevé de femmes enceintes et de nouveaux nés qui n’ont jamais reçu leurs premiers vaccins. Des personnes âgées hypertendues, diabétiques qui peinent à trouver des médicaments. La réouverture rapide d’écoles s’impose également.
Que dire du contenu de l’accord entre les djihadistes et les donzos du cercle de Niono
L’accord signé entre les djihadistes et les donzos est un compris entre les deux parties pour un « cessez le feu » sur toute l’étendue du cercle de Niono. Cet accord entre les deux parties doit être considéré comme un début de solution définitive aux problèmes d’insécurité dans la zone.
Il s’articule autour des points suivants :
1- l’accord concerne toute l’étendue du cercle de Niono et rentre en viguier le dimanche 15 mars 2021 à partir de 23 heures ;
2- les populations de Niono sont libres de vaguer à leurs occupations (travaux dans les champs, accès aux marchés et aux foires hebdomadaires, coupe de bois morts…) sans menace ni crainte ;
3- les différends religieux entre populations seront gérés par les oulémas des localités respectifs, sauf exception pour des peules victimes de délits de faciès et de stigmatisation ainsi que pour toute autre personne, d’une façon volontaire, décide de soumettre son problème aux djihadistes. Ces cas seront gérés par les djihadistes avec possibilité de comparer le verdict aux avis des oulémas de la localité ; la liberté aux femmes de porter les habits de leurs choix sauf dans les zones où se trouvent les djihadistes ;
4- libre choix des donzos de porter partout, leurs tenues et fusils sur toute l’étendue du cercle de Niono sans condition ;
5- l’acceptation des djihadistes de prêcher dans les villages munis de leurs armes ;
6- la libération de tous les détenus donzos et d’autres personnes aux mains des djihadistes et des donzos sans conditions ;
7- amnistie pour tous les auteurs des infractions commises, de part et d’autre, sans dommage et intérêts ;
8- la levée de blocus sur la population de farabougou et l’éloignement des djihadistes de ce village sans condition pendant au moins un mois, ainsi que le retrait de l’armée de ce village d’ici un mois.
- Transformer la commission nationale de réconciliation du Haut Conseil Islamique à une commission nationale de médiation et de réconciliation, rattachée à la Primature, ou à défaut au Ministère de la Réconciliation et dotée de toutes les expertises nationales en la matière afin qu’elle contribue à l’endiguement de cette insécurité idéologique dans notre pays.
Envoyé Spécial /Bokoum Abdoul Momini