Nord – Mali : Attention au détournement des dons humanitaires !

Selon certains experts en matière d’aide humanitaire, il faut beaucoup faire attention concernant l’aide humanitaire consentie ces derniers jours pour les régions du Nord car, toujours selon ces experts, si rien n’est fait pour assurer sa « suivie » comme il se doit, l’aide risque de ne jamais parvenir aux ayants droits.

Les experts nationaux et internationaux que nous avons rencontrés dénoncent déjà la mauvaise organisation des convois humanitaires et de la distribution de l’aide aux populations du Nord Mali. Selon eux, dans la plupart des cas, près de la moitié de l’aide distribuée est détournée, et une grande partie est contrôlée par un «cartel» d’hommes d’affaires ou de personnes mal intentionnées qui se partagent le plus souvent 60% du marché de sa distribution.

L’élan de générosité et de sympathie suscité actuellement par le Nord va forcement changer dans la politique et la structure traditionnelle de l’aide internationale. Ainsi, on pourrait avoir une mauvaise répartition de l’aide aux populations du Nord. Cela se justifie par le fait qu’aux yeux de la communauté internationale, le pays a toujours été un mauvais gestionnaire de par son absence de vision, de planification et de transparence, et de par la corruption qui gangrène les institutions. C’est pourquoi ces experts invitent les nouvelles autorités du pays à jouer le rôle de superviseurs et de contrôleurs des actions des ONG et des structures qui se créent, et surtout à  jouer pleinement leur rôle de coordinateurs des ONG présentes sur le terrain. Le déblocage de l’aide  humanitaire destinée  aux populations des régions du Nord doit être accompagné du déploiement d’un groupe d’observateurs internationaux, dont des fonctionnaires onusiens ou des associations internationales, afin d’éviter que les rebelles qui contrôlent ses régions du Nord ne s’accaparent cette aide ou que cette même aide ne soit l’objet de détournement par certains responsables d’association ou de mouvement.

Dans la situation actuelle du Nord, il faut savoir qui est le véritable interlocuteur à qui s’adresser concernant cette aide car plusieurs mouvements se trouvent dans ces villes occupées par les bandits armés. Il est donc difficile de savoir qui est le bon interlocuteur. Aussi, avec la crise alimentaire qui s’annonce déjà, les rebelles pourraient confisquer cette aide pour eux et leurs hommes plutôt que de le remettre aux populations car dans ce genre de situation, 30% de l’aide alimentaire est détournée par des partenaires locaux et des forces de l’ordre, 10% par les transporteurs routiers et 5 à 10% par les groupes armés dont les rebelles qui essaiment actuellement le septentrion malien. Le PAM (Programme alimentaire mondial) ne peut pas travailler dans les régions du Nord en raison de l’insécurité qui y règne et de l’absence de l’autorité de l’Etat. Il est donc actuellement difficile de bien coordonner les activités de l’aide. Or si l’aide humanitaire n’est pas bien organisée et suivie, ce sont des milliers de civils qui en seront privés. Toute chose qui pourrait avoir des conséquences très fâcheuses pour ses populations qui sont déjà « au bout du gouffre ». Les nouvelles autorités doivent donc vite se pencher sur le sort des Maliens restés sur place au Nord, faute de moyens pour se réfugier ailleurs.

Paul N’guessan

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