Le mandat d’Ibrahim Boubacar Kéïta a été le pire des cauchemars et la plus sanglante pour les populations des régions du nord et du centre. Depuis son arrivée à la tête du pays, en septembre 2013, les années se succèdent, avec un seul dénominateur commun : L’insécurité ! Si le Nord du Mali était la principale préoccupation de la situation sécuritaire, aujourd’hui la crise s’est déplacée vers le Centre, la région de Mopti et celle de Ségou. Ce n’est point un mystère : l’incapacité du régime d’IBK à assurer la sécurité des populations a causé plusieurs centaines victimes, civiles et militaires. Le drame aujourd’hui ? La multiplication des affrontements intercommunautaires avec son lot de victimes…
De 2013 à nos jours, plusieurs centaines de Maliens ont perdu la vie à cause de la grave situation sécuritaire qui sévit dans le pays. En effet, les attentats à la roquette, poses de mines, des attaques armées, des embuscades, assassinats ciblés et exécutions sommaires deviennent le quotidien de beaucoup de localités.
A cause de l’incompétence du régime actuel a assuré la sécurité des populations, la situation sécuritaire dans le Nord et le Centre du pays se dégrade quotidiennement. L’Etat n’y exerce quasiment plus son autorité dans plus de la moitié de ces territoires, laissant le champ libre aux bandits, aux rebelles et aux groupes djihadistes d’appliquer leur loi… Conséquence : les populations sont abandonnées à leur triste sort et ne savent plus à quel saint se vouer.
Ainsi, Le 9 mai dernier : Un car a été attaqué entre Gossi et Intahaka par des bandits armés. Les passagers ont été dépossédés de tous leurs biens. Mardi 8 mai 208, le préfet de Teninkou et son chauffeur ont été enlevés par des hommes armés non identifiés, entre Mopti et Kadial… Le jeudi 3 mai dernier : Un des véhicules des FAMas a sauté sur un Engin explosif improvisé (EEI) à Boudjiguiré, une localité située entre Nara et Guiré. Bilan : 2 blessés.
Le 1er mai 2018, à Tin-Dinbawen et à Taylalène, commune de Ménaka, 17 nouveaux civils ont été sauvagement exécutés. Des atrocités y ont été commises sur des vieillards et des enfants.
Dans la région de Mopti, à Youwarou, un comptable du Csref et le chef du Cscom de Guido SARRE ont été de nouveaux enlevés, le jeudi 26 avril 2018. Ils ont été interceptés par les hommes armés entre Dialloubé et Seweri sur la route de Mopti. Et pourtant, ces personnes avaient été libérées, il y a une semaine suite à un premier rapt.
Aussi, le sous-préfet de Hombori à lui aussi été enlevé puis relâché dans la même semaine par des hommes armés non identifiés.
Le 26 et 27 avril 2018, des hommes lourdement armés ont fait irruption dans un campement à Aklaz, une localité, située à d’Adaramboukane (frontière Mali-Niger). Selon plusieurs sources locales, les assaillants ont ouvert le feu sur les populations civiles en faisant une quarantaine de morts. Parmi les victimes, des enfants et des personnes âgées. En l’absence de l’Etat et ses services, les populations étaient à la merci des assaillants. Pendant tout ce temps, il n’y eut aucun secours des forces militaires (maliennes, onusiennes et françaises).
Le village de Nouh Bozo situé dans l’arrondissement de Kouakourou dans le cercle de Djenné serait également sous contrôle de présumés djihadistes depuis le début du mois d’avril 2018, affirment plusieurs sources locales.
28 mars 2018, les éléments de la Garde nationale ont repoussé une attaque terroriste contre l’hôtel « La Falaise » à Badiangara. Bilan : 2 personnes blessées dont un garde et 1 terroriste neutralisé. Les assaillants ont fui sur des motos vers Koro.
Mercredi 28 février 2018 : la série meurtrière s’est poursuivie dans la zone de Boni (Mopti), où une autre explosion de mine a fait des victimes parmi les éléments de la Minusma. Selon les premières informations, 6 soldats de la mission onusienne ont trouvé la mort. Cette explosion meurtrière a, en outre, provoqué de nombreux blessés.
Le mois de février 2018 a été particulièrement meurtrier dans le centre du pays où 12 soldats (maliens et étrangers) et un agent des eaux et forêts ont perdu la vie. En effet, le mardi 27 février 2018, un détachement des FAMa a « sauté sur un engin explosif improvisé », à environ 7 km à l’est de Dioura (Ségou). Le bilan est particulièrement lourd du côté de l’armée : 6 morts et de nombreux blessés. Quelques heures auparavant, un élément des eaux et forêts (un corps paramilitaire) a été sauvagement assassiné, à Douentza, par des inconnus. Après leur forfait, les auteurs de cet assassinat ont disparu dans la nature. La piste terroriste est privilégiée.
le dimanche 28 janvier 2018, à Ménaka, 4 militaires de l’armée de malienne sont morts dans l’attaque du camp de la garde nationale. Un jour avant, le samedi 27, tôt le matin, les terroristes ont lancé une offensive contre un camp des FAMas à Soumpi (Nianfunké).
Selon un bilan de l’armée, l’attaque contre Nianfunké a fait : 14 morts au sein des forces maliennes et 10 blessés, 17 morts du côté des assaillants et plusieurs blessés.
Cette attaque est survenue 72 heures après l’explosion d’un véhicule transportant des forains en provenance du Burkina Faso à Boni, cercle de Douentza, et deux attaques simultanées contre l’armée malienne à Youwarou (Mopti) et à Goumancoura (Ségou). Le président Ibrahim Boubacar Keïta avait décrété un deuil national de trois jours sur l’ensemble du territoire national à compter de lundi 29 janvier 2018. Il s’agissait de rendre hommage à tous ceux qui ont perdu la vie suite aux attaques terroristes. Au moins plus d’une cinquantaine de personnes ont en effet perdu la vie, en janvier 2018, dans le centre et le nord du pays.
Dans la région de Mopti, plusieurs localités subissent la loi des groupes djihadistes. Après plusieurs tentatives ratées, des hommes armés non identifiés seraient parvenus à assiéger le village de Nouh Bozos dans le cercle de Djenné, le dimanche 27 avril 2018. Des sources locales font état de cinq morts, plusieurs blessés et des otages…
Dans un communiqué, le Parena estime que la côte d’alerte est atteinte. « L’instabilité fait des ravages. Au cours du seul mois d’avril, plus de 200 personnes ont perdu la vie au Nord-Est et au Centre du Mali. Du 1er janvier au 31 mars 2018, au moins 316 personnes sont mortes dans notre pays, du fait de l’insécurité », indique le Parena.
En effet, pour rappel « Il y a eu davantage d’actes terroristes dans les régions de Mopti et Ségou que dans l’ensemble des cinq régions du nord du pays » ces 3 derniers mois. C’est ce qu’indique le dernier rapport trimestriel de l’ONU sur la situation sécuritaire au Mali.
Durant ces 3 derniers mois, les groupes terroristes ont mené au total 71 attaques dans le pays. Parmi elles, 20 se sont produites dans la région de Mopti, 17 à Gao et 14 à Kidal. Le rapport de l’ONU précise aussi que 37 de ces 71 attaques ont été menées contre les forces de sécurité malienne. 22 dans les régions de Mopti et Ségou, 8 à Gao, 4 à Tombouctou, 2 à Koulikoro et 1 à Ménaka…
Affrontements intercommunautaires
Autre source d’inquiétude, l’émiettement de la rébellion touarègue au Nord trouve désormais son pendant au centre du pays. En effet, plusieurs localités du Nord et du Centre sont devenus le théâtre d’affrontements intercommunautaires.
Au moins cinq civils ont été tués, le 9 mai dernier, à Ménaka, récemment ensanglantée par la mort de dizaines de civils de communautés différentes. Un véhicule qui avait quitté Indelimane « pour la foire de Menaka » a été « attaqué par des hommes armés. Cinq passagers civils ont été » tués par des « assassins (qui) sont ensuite allés dans un campement pour tuer d’autres civils… », a affirmé une source, sous couvert de l’anonymat pour des raisons de sécurité.
L’attaque a été confirmée par une source de sécurité malienne selon laquelle « des criminels ont assassiné mercredi six civils entre Indelimane et Menaka ».
Le vendredi 9 mars 2018, des heurts similaires avaient causé la mort d’une dizaine de personnes et d’importants dégâts matériels dans le cercle de Koro (Mopti), selon des sources sécuritaires et administratives locales.
La recrudescence des affrontements sanglants entre les communautés (Dogon et Peulh) ont accéléré la multiplication des groupements peulhs qui accusent par ailleurs l’armée malienne de soutenir les milices. En juin 2017, des affrontements entre Peuls et Dogons ont fait plus de 30 morts et plusieurs blessés dans le village de Douna, cercle de Koro (Mopti).
Le samedi 28 août 2016, entre éleveurs et agriculteurs dans la région de Mopti. C’est une affaire de vol de bétail qui a mis le feu aux poudres. Cinq civils ont été tués et sept autres blessés.
Dans un communiqué officiel, le gouvernement a parlé de « tragiques événements qui ont causé la mort de cinq civils », sans donné plus de détails.
Cependant, pour un élu de Mopti, il s’agit de nouveaux affrontements intercommunautaires liés à un vol de bétail.
Le président de l’association Tabital Pulaaku, a confirmé : « Ce samedi, une milice armée à la recherche d’animaux volés est tombé dans une embuscade dans un petit village du nom de Tekere Finadji. Echanges de tirs. Cinq personnes sont tuées et au moins sept autres blessées ».
Depuis, d’autres mouvements militaires non terroristes ont vu le jour tels que l’Alliance nationale pour la sauvegarde de l’identité peulh et la restauration de la justice au Mali. Ce dernier a notamment mené une offensive contre des milices à Karéri le samedi 27 aout 2016 causant la mort d’une dizaine de personnes. Face à ces violences, des centaines de civils de cette ethnie ont pris la route vers le Sud du pays. Plusieurs milliers de peuls ont quant à eux été contraints de fuir la région de Mopti en direction de la Mauritanie voisine.
Cependant, dans un manifeste publié le 19 août 2016, Aly Nouhoun Diallo, porte-parole de la coordination des associations peulhs, a notamment dénoncé les « persécutions orientées contre des peuls » et les « amalgames » des forces armées maliennes qui assimilent systématiquement les peulhs à des terroristes. La création du Front de libération du Macina (FLM) de Hamadoun Kouffa, composé de combattants majoritairement peulhs a jeté de l’huile sur le feu en déclenchant une répression brutale et aveugle…
Véritable poudrière
Pour échapper à ces affrontements, le nombre des réfugiés peulhs à Dialakorobougou venant du Cercle de Koro s’augmente. En, effet, le 10 mai dernier, 15 nouveaux cas de déplacés ont été enregistrés à Bamako dont 6 femmes, 7 enfants et 2 hommes. Au total, 96 personnes ont quitté leurs villages.
Par ailleurs, ces affrontements ont été déclenchés par l’attaque, par des éleveurs Peulhs, de deux villages (Sabérré-Darrah et Diankabou) habités par des Dogons. Ce à quoi les chasseurs Dogons ont répliqué en attaquant et en incendiant le village peulh de Madougou, le dimanche 11 mars 2018. Le lendemain (12 mars), de violents heurts ont opposé les deux communautés à Kewa, dans le cercle de Djenné (Mopti). Bilan : 10 morts (8 Dogons et 2 éleveurs Peulh) et plusieurs blessés. Dans le cercle de Koro, à Aama, village situé dans la Commune de Kassa à Diankabou, des affrontements intercommunautaires ont eu le samedi dernier. L’incident s’est produit autour d’un puits à grand diamètre. Pas de perte en vie humaine. Au même moment, le village de Bombou dans la Commune de Madougou avait été attaqué par des individus non identifiés. Le bilan fait état deux morts.
Le dimanche 6 mai dernier, au cours d’une conférence le président de Tabital Pulaaku, Abdoul Aziz Diallo, les attaques récentes portent la signature des chasseurs dozos, et dans laquelle on retrouve des Dogons, mais aussi des gens qui ne seraient pas maliens: « La situation est très grave. Et de jour en jour, ça s’aggrave. Aujourd’hui, il y a une milice appelée Dozo, qui est descendue dans le centre et qui est en train de descendre dans les villages pour tuer les gens n’importe comment. Ils arrêtent même des voitures pour faire descendre les gens et les égorger. Ils brûlent les cases, ils tuent les animaux des Peulhs. C’est très grave ! C’est une milice fabriquée. On ne sait pas qui tire les ficelles, mais ce qui est sûr, c’est que cette situation-là n’est pas claire. Et ça risque de contaminer toute la région entière. Aujourd’hui, c’est Koro. Hier, c’était Djenné. Demain, on ne sait pas si ce ne sera pas Douentza, Bankass ou Bandiagara ». Le président de Tabital Pulaaku a cité une série d’évènements qui tendent à prouver une nette détérioration sur le terrain. A savoir le massacre des habitants peulhs de Nawodié et Tanfadada dans la commune de Dougani par des chasseurs appelés Dan-na Amassagou ; l’incendie des villages peuls de Madougou ; la chasse aux peuls entreprise par la milice Dan-na Amassagou ; l’interception de vivres allouées aux populations par le Premier ministre et des ONG…
Une véritable poudrière pour l’Etat malien qui paye aujourd’hui au prix fort l’abandon de pans entiers de son territoire et une stratégie maladroite déployée depuis des années consistant à alimenter les divisions locales pour asseoir son autorité.
Mohamed Sylla