Engagé à la fois dans la lutte contre le terrorisme et la rébellion armée au Nord, le Mali devrait désormais faire face à la multiplication des groupes armés qui opèrent à des regroupements.
Après le rapprochement la semaine dernière, en catimini, des groupes armés du Nord, le Mnla, le Hcua et le Maa à travers la signature d’un accord en Mauritanie dont les closes ne sont pas rendues publiques, voilà que les groupes islamistes emboîtent les pas à travers une fusion donnant naissance au non générique de «Mourabitounes».
Au moment où tous les regards étaient braqués sur l’organisation du 2ème tour de la présidentielle, les groupes armés qui opérèrent dans le vaste désert du septentrion, peaufinaient des stratégies. En effet, le rapprochement entre le Mnla, le Hcua et le Maa est interprété différemment. Si d’aucuns y voient un moyen pour ces groupes d’avoir une vision commune face aux nouvelles autorités, certains pensent plutôt qu’il s’agit d’une stratégie visant à dribler davantage les Maliens et la Communauté internationale.
Il y a donc des zones d’ombres qui subsistent, à entendre certains membres de ces groupes armés. Car, lors des pourparlers de juin dernier à Ouagadougou, les responsables de ces groupes armés se sont montrés farouches à l’idée d’un rapprochement, surtout que les Arabes se disent républicains. Et tout au long des pourparlers, le Mouvement arabe de l’Azawad (Maa) s’est montré très proche des sédentaires et avait même signé une alliance afin de marquer son désaccord vis-à-vis du Mnla et du Hcua qui insistaient sur l’indépendance ou sur le statut juridique pour le Nord du Mali qu’ils appellent Azawad. Curieusement, le Maa signe un partenariat avec ces deux groupes qui se présentent comme interlocuteurs indispensables, alors qu’ils les avaient combattus.
«Nous avons mieux à gagner avec le Mnla et le Hcua que les autres groupes d’auto-défense qui ne vont jamais avoir confiance en nous», nous a confié un leader du Maa, en début de semaine. Avant d’ajouter : «De toutes les façons, nous n’avons rien à perdre ; l’essentiel, c’est que nous puissions être écoutés lors des négociations avec le nouveau pouvoir», nous a-t-il révélé.
Depuis Ouagadougou où il réside, l’un des responsables du Mnla, Mahamadou Djéry, explique que ce rapprochement avec le Maa est naturel. «Nous avons signé l’accord de Mauritanie et son respect ne fera pas défaut, car toute discorde entre Azawadiens ne fera que profiter aux ennemis», a-t-il déclaré.
Pour le moment, les responsables des groupes d’auto-défense ne veulent pas commenter cet accord. «Jusqu’à présent, nous travaillons à faire en sorte que le Maa puisse épouser la position du Mali. C’est vrai que certains de ses membres hésitent encore», a laissé entendre un leader sédentaire qui a requis l’anonymat, sans donner d’autres détails.
Pire, selon plusieurs sources, depuis quelques jours, le Mouvement arabe de l’Azawad est en train de s’armer dans le nord et procède à des recrutements massifs. D’ores et déjà, des témoins font état de la présence des camps d’entraînement dans le vaste désert du nord de Tombouctou.
Mourabitounes portée sur les fonts baptismaux
Si à l’annonce de la fusion entre le Mujao et le groupe de Belmokhtar, nous avons pris le soin de ne pas traiter la question, il nous est revenu de nous interroger sur la riposte que nos autorités apporteront pour anéantir cette nouvelle coalition et les autres cellules dormantes.
En effet, le Mujao (Mouvement pour l’unicité et le jihad en Afrique de l’ouest) qui était installé à Gao et le groupe dirigé par le jihadiste algérien Mokhtar Belmokhtar se connaissent très bien et ont des répondants dans le Nord du Mali, selon plusieurs spécialistes.
C’est dire donc qu’il s’agit tout simplement des retrouvailles entre le Mujao et la Katiba, l’unité combattante de Belmokhtar. A travers cette fusion, les deux groupes jihadistes veulent paraître aux yeux de l’opinion comme une renaissance. En clair, le nom Mourabitounes donné au groupe signifie en arabe «union», «force». On se rappelle que le groupe de Mokhtar Belmokhtar, alias «le borgne» et le Mujao avaient tous deux revendiqué les attentats suicides menés à Agadez et Arlit en mai dernier. De quoi faire redoubler de vigilance, au Nord tout comme partout au Mali.
En tout état de cause, la multiplication des fronts armés inquiète et doit amener les nouvelles autorités à redoubler d’ardeur afin de ne pas tomber dans le piège. En somme, c’est là une équation difficile que le nouveau Chef de l’Etat, Ibk, devra résoudre avec promptitude. Car, les Maliens n’aspirent qu’à vivre dans la paix et dans la quiétude. Et en ce sens, aucune faute ne sera pardonnée.
Alpha. M CISSE