Le président de l’Assemblée régionale de Kidal, Abdoul Salam Ag Assalat, est mort dans la nuit du 24 au 25 mai 2011 entre Anéfis et Gao. Selon les premières nouvelles que nous avons reçues, il serait mort suite à un accident de la circulation. Avec cette disparition brutale, c’est l’espoir de toute une région à la paix qui s’envole. Abdoul Salam ne devait pas mourir si précocement.
Il n’y a pas longtemps, Abdoul Salam, tenait des propos qui dérangeaient un certain milieu : «Grâce à une armée républicaine et responsable qui n’arrête pas de veiller sur notre sécurité, nous nous réjouissons de la situation satisfaisante que nous vivons. Malheureusement, il y a des médisants et des marchands d’illusion qui n’arrêtent pas d’intoxiquer à propos de la situation au nord Mali. Ce sont des gens à qui, en réalité, le désordre profite et qui ne se retrouveront jamais dans une Nation tranquille et forte. Ils pensent qu’ils peuvent se substituer au Juge, au Gendarme, au Policier et à l’Etat en général. Même quand une attaque se passe dans le Sud algérien, ils préfèrent dire que cela se passe au Nord du Mali. J’ai dit souvent que nous devions faire une autocritique, une autoévaluation et éviter d’en vouloir toujours aux autres. Si AQMI est là, dans notre zone, nous y sommes pour quelque chose, car il y en a parmi nous ceux qui ont bien voulu les installer. Il est donc impératif de traquer ces complices… ». Il venait de se brûler les doigts en touchant ainsi l’intouchable.
En tout cas, la ville de Kidal s’est réveillée, tôt ce matin-là avec une des plus tristes nouvelles de son histoire récente : Abdoul Salam est mort…Un silence glacial enveloppe la ville. La population est inconsolable. L’administration aussi. A Kidal, pour le Mali, pour la paix au Sahel, c’est un espoir qui est assassiné. Ainsi donc, le président de l’Assemblée régionale de Kidal, en déplacement pour Bamako où il devait participer à la signature du contrat de subvention du programme spécial pour la sécurité et le développement du Nord Mali, trouva la mort entre Anéfis et Gao aux environs de 1heure du matin.
Abdoul Salam, un homme engagé et déterminé pour la paix au Sahel
Il venait de débloquer il y a seulement quelques jours une crise explosive au tour du problème d’eau. Une marche des populations sur l’administration locale a été évitée de justesse. A Kidal, les populations ont raison de pleurer. En effet, le déluge qui s’était abattu sur le cheptel des éleveurs de la localité avait compromis dangereusement la paix et la stabilité dans cette zone.
Il est important de noter que le lait, constitue l’alimentation de base des populations de Kidal. Pire encore, les éleveurs accédaient difficilement aux pâturages pendant l’hivernage, car leurs principaux moyens de déplacement (les ânes et les dromadaires) étaient dans un état lamentable d’amaigrissement physique les rendant inutilisables. C’était un autre handicap pour des pasteurs dont tout l’équilibre économique repose sur la mobilité.
Abdoul Salam Ag Assalat a pris son bâton et s’est armé de courtoisie auprès des autorités compétentes pour trouver les solutions nécessaires à ces différents problèmes. «Si nous avons pu surmonter cette crise, c’est grâce à la mobilisation des collectivités, à l’implication de l’administration régionale, la promptitude avec laquelle s’est exprimée la solidarité des plus hautes autorités du Mali et leurs partenaires et l’implication de certains projets et programmes. Plus explicitement, je voudrais dire que la sensibilisation par les élus de l’opinion locale, régionale, nationale et internationale a été porteuse, car elle a permis de faire connaître la réalité qui prévaut sur le terrain et d’attirer l’attention de tous. La mission des élus, en avril 2010 en France, les multiples rencontres avec les Ministres et autres personnalités maliennes et étrangères, les missions sur le terrain illustrent à suffisance la volonté des collectivités à faire face à leurs responsabilités en véhiculant suffisamment le message». Voilà en somme ce que déclarait l’illustre disparu il y a peu.
Abdoul Salam, ne ratait aucune occasion pour rappeler les vertus de la paix et de la sécurité dans le développement de son pays. Il s’est engagé si fortement qu’il s’est attiré quelques jalousie au sein de sa communauté.
C’est ainsi qu’il disait : « La promptitude avec laquelle l’Etat a écouté les collectivités pour apporter des réponses salvatrices aux populations, a été un témoignage de la volonté du Gouvernement, et singulièrement celle du Chef de l’Etat de soutenir la région de Kidal. Il faut saluer l’implication du président de la République qui, au moment crucial de la crise, a mis à la disposition des autorités régionales des fonds pour minimiser les conséquences de la sécheresse».
Sous sa conduite, l’Assemblée régionale a signé avec le Programme Intégré de Développement Rural de la Région de Kidal (PIDRK), une convention de ravitaillement des sites les plus exposés en eau par citernes et cela, en dépit de leur éloignement. Il a également obtenu du PIDRK, des fonds destinés aux différents Conseils de Cercle afin d’assurer les frais de transport de l’eau. En plus, il a renforcé le Programme de forage des puits dans plusieurs secteurs, appuyé des éleveurs, financé des projets dont la plupart, au profit des femmes.
Au plan de la sécurité, tous les espoirs étaient fondés sur l’implication dynamique d’Abdoul Salam Ag Assalat. Il faut noter qu’il appartient au groupe de ceux qui ont appuyé et continuent de se battre de toutes leurs forces pour instaurer la paix et la stabilité dans la bande sahélo-saharienne. C’est à ce titre d’ailleurs qu’il avait été invité à Bamako où l’attendait la Délégation européenne conduite par Manuel Lopez Blanco, Directeur pour l’Afrique de l’Ouest et Centrale au service Européen d’Action Extérieur. Paix à son âme et que la terre lui soit légère.
Abdoulaye NIANGALY