Le bilan de l’attaque contre ce site de villégiature proche de Bamako, dimanche, s’est alourdi. Quatre civils et un militaire malien ont été tués. Le pays est sur le qui-vive.
Un mauvais scénario aux airs de déjà-vu. Des hommes armés ont attaqué dans l’après-midi de ce paisible dimanche 18 juin un lieu de villégiature, connu de tous comme étant le campement Kangaba, tenu par le Français Hervé Depardieu depuis 2007. Ce sont les voisins du campement qui ont donné l’alerte, alors que l’établissement est situé à la périphérie de Bamako, au quartier Yirimadjo, qu’on rejoint depuis le centre de la capitale malienne après une longue traversée de route sinueuse. Des coups de feu en provenance du lieu attaqué, une fumée qui s’élevait au-dessus du site, les soldats de l’armée malienne et de la force française anti-djihadiste Barkhane ont aussitôt encerclé le site. « Le pire a été évité », assure-t-on du côté des autorités. Notamment grâce à la force spéciale antiterroriste Forsat, mise en place après l’attaque du Radisson Blu, appuyée par les militaires de l’opération française anti-djihadiste Barkhane et de la Minusma, la force onusienne. L’attaque a fait cinq morts et a été revendiquée par le mouvement filial d’Al-Quaïda.
LIRE aussi : Antiterrorisme : ce qu’il faut savoir des mesures en Afrique de l’Ouest
Comment l’attaque s’est-elle déroulée ?
Il s’agit bien d’une attaque djihadiste. Quatre civils et un militaire malien ont été tués. Selon le ministère malien de la Sécurité, l’attaque a été menée par des djihadistes. Plusieurs hommes armés ont fait irruption dans ce village de vacances fréquenté par les Bamakois et les Maliens pendant les week-ends, mais aussi par des Occidentaux. Créé en 2007 par un Français amoureux des arts, et de l’Afrique, cet ancien repaire de routards s’est transformé en lieu de villégiature, complexe hôtelier, sportif. Mais, ces dernières années, le campement connaissait des difficultés, en partie depuis 2012 et l’entrée en guerre du Mali contre les groupes djihadistes liés à Al-Qaïda. Les djihadistes ont été en grande partie chassés de cette région par une intervention militaire internationale lancée en janvier 2013 à l’initiative de la France, qui se poursuit actuellement.
Mais des zones entières échappent au contrôle des forces maliennes et étrangères, régulièrement visées par des attaques meurtrières malgré la signature, en mai-juin 2015, d’un accord de paix, censé isoler définitivement les djihadistes, dont l’application accumule les retards.
Une quarantaine de civils ont réchappé de ce premier attentat depuis plus d’an dans la capitale malienne, tandis que quatre suspects ont été arrêtés au cours de l’enquête, selon un dernier bilan fourni lundi par le ministre malien de la Sécurité, le général Salif Traoré. « Quand j’ai vu les terroristes, tout de suite, j’ai indiqué un trou où se sont cachés les clients. Après, ils sont sortis » de leur abri, a-t-il dit, précisant que les assaillants étaient de « peau claire ». Créée en mars, la force spéciale antiterroriste est rapidement intervenue. En cas d’attaque, ses 180 policiers et gendarmes d’élite sont effectivement appelés à intervenir sur-le-champ.
Que sait-on des victimes ?
Selon les premiers bilans, parmi les tués figurent un militaire malien ainsi que quatre autres personnes, de nationalités gabonaise, chinoise, portugaise et malienne, a indiqué le ministre de la Sécurité. Un Français et un Suédois portés disparus « ont été retrouvés », a-t-il ajouté.
Que sait-on des auteurs présumés ?
L’enquête avance très rapidement. Cinq suspects ont été arrêtés dès ce lundi. « Les quatre assaillants ont été neutralisés », a déclaré le général Salif Traoré, mais, dans sa revendication, le Groupe de soutien à l’islam et aux musulmans affirme qu’ils étaient au nombre de trois. Tous trois appartenaient à l’ethnie peule, précise dans un communiqué cette alliance djihadiste dirigée par le chef islamiste touareg malien Iyad Ag Ghaly, repris par les agences privées mauritaniennes ANI (Agence Nouakchott Information) et Al-Akhbar.
Comment les autorités réagissent-elles ?
LIRE aussi : Lutte contre le terrorisme : le Sahel se lève
Les réactions de solidarité internationale se succédaient au lendemain de ce premier attentat dans un lieu touristique depuis plus d’an dans la capitale malienne.
Le Mali est sous état d’urgence quasiment sans interruption depuis l’attentat contre l’hôtel Radisson Blu de Bamako le 20 novembre 2015, qui avait fait 20 morts, outre ses 2 auteurs. Cet attentat avait été revendiqué par Al-Qaïda au Maghreb islamique (Aqmi), en coordination avec le groupe djihadiste de l’Algérien Mokhtar Belmokhtar, Al-Mourabitoune, rallié à Aqmi. « Le mode opératoire est semblable aux attaques de la Terrasse (à Bamako en mars 2015) et (de l’hôtel) Radisson Blu », a indiqué le procureur du pôle judiciaire spécialisé, Boubacar Sidiki Samaké, faisant état de la découverte de trois fusils d’assaut kalachnikovs. Le bilan, moins lourd que lors d’attaques similaires, pourrait s’expliquer notamment par la présence parmi les clients de militaires de la mission européenne de formation de l’armée malienne (EUTM Mali) et de la force de l’ONU, la Minusma, qui ont pu lancer une première riposte, selon des témoins.
Le G5 Sahel attendu sur le terrain
Le président français Emmanuel Macron est attendu dans la capitale malienne le 2 juillet pour le prochain sommet du G5 Sahel, qui doit porter sur cette initiative, en butte à de sérieuses réticences au Conseil de sécurité de l’ONU, en particulier des États-Unis.
LIRE aussi : Mali : le président Macron à Gao avec les soldats français
Par ailleurs, dans le nord du pays, une attaque lundi à Bamba a fait un mort dans les rangs de l’armée malienne et un parmi les assaillants. Le 9 juin, l’ambassade des États-Unis avait publié une consigne de sécurité à l’intention des Américains les informant d’une « menace d’attaques accrue » à Bamako dans les lieux fréquentés par les Occidentaux.