Lutte contre le terrorisme au Sahel : Le jeu trouble de l’Algérie

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Au lendemain de l’échange d’otages contre des combattants djihadistes au Mali, c’est toujours le questionnement quant aux difficultés qu’éprouvent les pays du Sahel à faire convenablement face au péril djihadiste depuis l’invasion du Mali en 2012, par les fondamentalistes dont la progression sur Bamako a été stoppée net par l’armée française.

Huit ans après ces faits, un officier supérieur de l’armée française, aujourd’hui à la retraite, parlant de ses « mémoires militaires » compilés dans un livre récemment paru, revient, entre autres, sur ces événements,  notamment la reconquête du Nord du Mali, l’arrivée de l’armée française à Kidal et la dégradation continue de la situation sécuritaire dans le pays. En filigrane, on croit percevoir le mauvais rôle attribué à l’Algérie dans cette lutte des Sahéliens contre le terrorisme qui est, aujourd’hui, pratiquement devenu une arlésienne dans cet espace géographique. Et pour cause. Longtemps accusé de protéger Iyag Ag Ghali, l’Algérie s’en est toujours défendu sans véritablement convaincre de sa bonne foi tant toutes les pistes menant au grand chef salafiste, conduisent aux confins de ce pays, à la lisière du Mali.

Avec le changement de régime à Alger, on se demande si la donne va aussi changer

Et quand on sait comment l’Algérie a été capable de réduire considérablement la voilure des extrémistes musulmans au point d’avoir le contrôle total de la situation sur son territoire, on se demande comment l’ex-leader du mouvement islamiste Ansar-dine aujourd’hui patron du GSIM, longtemps traqué et aujourd’hui en plein regain de confiance suite aux échanges d’otages de la semaine dernière, peut encore courir sans que l’on ne puisse, y compris certaines puissances occidentales qui ont mis sa tête à prix,  lui mettre le grappin dessus. Sa seule bonne maîtrise du terrain et son agilité au camouflage, peuvent-elles, à elles seules, expliquer sa capacité à se  jouer des limiers des Occidentaux lancés de longue date à ses trousses ou bien y a-t-il d’autres explications ?

En tout cas, après que certaines sources  l’aient régulièrement  localisé entre le Sud algérien et le Nord malien où il aurait des attaches, on se demande  pourquoi il ne semble pas inquiété outre mesure au point de gagner en « grade » et en puissance pour continuer à défier nos Etats sur le plan sécuritaire dans la sous-région. En d’autres termes, l’Algérie joue-t-elle franc jeu ? Du temps de l’ex-président Boutef, la question ne semblait pas trop se poser puisque qu’à en croire certaines sources, les Français de l’opération Serval ont raté de peu de l’alpaguer avant qu’il ne trouve refuge dans le Sud algérien. Aujourd’hui, avec le changement de régime à Alger, on se demande si la donne va aussi changer. La question se pose d’autant plus que tout porte à croire que Iyad Ag Ghali est devenu un élément incontournable dans la résolution de la crise sécuritaire malienne. De même qu’Alger qui ne cesse de mettre sur le tapis, le strict respect des accords de 2015 censés sortir le pays de l’impasse. Mais sur le terrain de la lutte, on a parfois l’impression que le pays de Boutef ne mouille pas suffisamment… le treillis en faveur de ses voisins du Sud qui sont, depuis près de huit ans maintenant,  dans la tourmente terroriste.

C’est à se demander si la sécurité d’ensemble des Sahéliens, ne pâtit pas, quelque part, des intérêts de certains pays

Cela dit, si l’on peut s’interroger sur le rôle de l’Algérie, qui manque parfois de lisibilité quant à sa position vis-à-vis des djihadistes qui écument le Nord-Mali, ce qui fait dire à certains qu’Alger ne se montre pas suffisamment solidaire de la lutte contre le terrorisme au Sahel, il faut dire qu’en la matière, il n’est pas le seul pays à être soupçonné de jouer à un jeu trouble dans la crise sécuritaire que connaît le septentrion malien. En effet, par rapport à la question de Kidal, la France a eu sa part d’accusations,  quand ses soldats foulaient allègrement le sol de la ville rebelle du Nord longtemps restée zone rouge pour les troupes de Bamako. Il en est de même pour certains pays comme la Mauritanie dont certains mettaient l’accalmie sur son sol, sur le compte d’un pacte secret noué avec les terroristes pour l’épargner au moment où les attaques se multipliaient dans d’autres contrées comme au Mali, au Burkina Faso et au Niger. C’est à se demander si la sécurité d’ensemble des Sahéliens, ne pâtit pas, quelque part, des intérêts   de certains pays.  En tout état de cause, le livre de ce témoin privilégié de la situation sécuritaire au Nord-Mali ne pouvait pas mieux tomber. Puisqu’il intervient au lendemain de trois nouvelles attaques sanglantes dans le Centre du Mali, qui ont occasionné, le 12 octobre dernier, plus d’une vingtaine de tués civils et militaires. Et ce, au moment où Iyad Ag Ghali vient de frapper un grand coup en obtenant la libération de centaines de djihadistes contre quatre otages occidentaux et maliens. Un remerciement signé en lettres de sang, qui vient rappeler la nécessité de garder l’arme au pied, dans un contexte où les dirigeants du G5 Sahel ne savent plus véritablement à quelle stratégie se fier ; le tout-militaire ayant aussi montré ses limites. Surtout qu’il a fallu repartir à la case-départ en remettant de nombreux combattants ennemis dans la nature, après tant d’années d’efforts, de souffrances et de sacrifices pour mettre fin à leur cavale.

A .Diallo

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2 COMMENTAIRES

  1. Bonjour,

    Je l’ai dit à plusieurs reprises et je le redis, je réclame la paternité du G7 Sahel devenu G5 sahel.

    Dans l’inititive d’origine, le G7 Sahel devenu G5 Sahel est une initiative sahélienne, aidée par des partenaires, mais la divergence de visions a été provoquée par l’Algérie qui ne voulait pas du G7 Sahel avant même qu’il ne prenne forme et a choisi de faire cavalier seul puis s’est mise à la tête du cemoc, constitué de quatre pays, faisant chacun la lutte contre le terrorisme dans son territoire et peu ou pas d’actions communes aux frontières à part la fourniture du renseignement.

    La relation est bonne entre l’Algérie et plusieurs djihadistes dont IYAD AG GHALY qu’elle protége avec son important réseau de renseignement.

    C’est pourquoi, l’Algérie est un acteur incontournable au Sahel dans la lutte contre le terrorisme et pourra jouer un rôle important dans d’éventuelles négociations avec les groupes armés terroristes et djihadistes au sahel.

    Devant mutualiser les forces pour combattre le terrorisme comme le préconise le G7 sahel devenu G5 sahel malgré tout l’Algérie ne voulait pas y participer car sa constitution lui interdit de faire la guerre.

    Le G5 Sahel intégre des partenaires extérieurs pour faire la guerre contre le terrorisme contrairement au CEMOC.

    La mutualisation des ressources permet en plus au G5 Sahel de prendre en charge des projets au sahel.

    Le cemoc souhaiterait une telle aide des partenaires qui réfusent, la France en tête, la rivalité Algérie-France aidant.

    Le G5 Sahel souhaiterait que l’Algérie le rejoigne mais elle est toujours bloquée par sa constitution qui sera mise à jour en novembre 2020 mais lui interdisant toujours de faire la guerre au stade actuelle des propositions. Si elle veut participer au G5 Sahel, il faut plus que cela, l’Algérie doit y réfléchir et promouvoir cette idée avant que le référendum ne se tienne en novembre 2020.

    Au stade actuel. que ce soit au CEMOC qu’elle pilote ou plus tard au G5 Sahel auquel elle fait semblant (jeu trouble) de ne pas vouloir adhérer tout en montrant et en sachant qu’elle est incontournable contre le terrorisme au sahel, l’Algérie ne peut que collaborer à travers le renseignement.

    C’est pourquoi, l’Algérie, devant le tout militaire, préfère un règlement politique global dans la lutte contre le terrorisme au Mali et au Sahel.

    Est ce suffisant contre la horde des terroristes qui inondent le Mali et le Sahel ?

    Certainement, NON.

    Est ce que le cemoc est suffisant dans la lutte contre le terrorisme, certainement, NON.

    Que faire ?

    Permettons au G5 Sahel d’être autonome et utilisons une stratégie inclusive efficace de lutte contre le terrorisme.

    En tant qu’expert sécurité et gouvernance, j’avais fait en janvier 2020 une telle proposition, sans suite, au G5 Sahel avec le leadership assuré par les forces nationales et avec l’intégration des représentants des citoyens et communautés au sein du G5 sahel.

    Par Dr Anasser Ag Rhissa, expert TIC, Gouvernance et Sécurité, TEL 78731461

  2. C’est facile à comprendre, l’écrasante majorité des terroristes sont des arabes et ethnies semblables. Il y a y ajouter quelques endoctrinés ça et là. Ils peuvent facilement s’entendre entre eux quand il s’git de combattre les autres.

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