Les services secrets Français et les otages :  Les fortunes diverses des barbouzes de Sarkozy

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Pour faire libérer ses citoyens otages à travers le monde, la France a choisi désormais d’envoyer sur les champs d’opérations,  des « supers héros ». En Afghanistan, ils font des succès, au Mali, ils sont eux mêmes faits otages. Chronique d’un plongeon dans « la piscine » de Sarkozy.                                                               

À la DGSE, on suit toujours toutes les prises d’otages de citoyens français à l’étranger, la libération des journalistes de France 3 Stéphane Taponier et Hervé Ghesquière a été vécue comme un vrai succès, net et sans bavure. Qui ne fait pourtant pas oublier l’échec sanglant de la libération ratée de Michel Germaneau, en juillet 2010, ni les autres otages dont les libérations tardent infiniment : un officier de la DGSE était détenu depuis le 14 juillet 2009 en Somalie ; quatre employés des groupes Areva et Satom ont été enlevés en septembre 2010 au Niger et trois autres Français, employés de l’ONG française Triangle Génération humanitaire, ont disparu au Yémen le 28 mai dernier. En matière de prise d’otages, il n’existe que des cas uniques. Et celui des deux captifs d’Afghanistan, aujourd’hui terminé, ne fait pas exception à la règle. La profession des deux otages n’a pas été anodine : deux journalistes d’une chaîne de télévision nationale, dotée d’un puissant réseau professionnel et d’une capacité de mobilisation sans égale. La visite à Kaboul en mai dernier de la compagne d’Hervé Ghesquière et de la mère de Stéphane Taponier a été considérée comme un élément positif par les négociateurs. Les agents de la DGSE étaient "nombreux" sur le terrain, mais "en nombre considérable" à la Centrale, nom que les employés des services secrets donnent à leur vieille maison du boulevard Mortier.                                                                                                 

 Lorsque les deux journalistes ont été enlevés en Afghanistan, le 30 décembre 2009, la DGSE a aussitôt mis en place un dispositif de grande envergure, faisant donc appel à des moyens humains, notamment en Afghanistan et au Pakistan, mais aussi à tous les moyens techniques imaginables. En liaison avec la DRM (Direction du renseignement militaire), le réseau téléphonique GSM est écouté, les communications radio interceptées, les satellites orientés, les drones nationaux déployés, parfois 24 heures sur 24, au point de manquer à quelques occasions aux troupes françaises qui en auraient eu besoin pour conduire des opérations dans la région.                                                                                                                                                             

  Ceci a eu cela de positif que des témoins directs rapportent les connaissances exceptionnelles acquises sur l’Afghanistan à cette occasion par la DGSE, ses groupes et sous-groupes, clans et groupuscules, leurs processus de décision, leurs relations et leurs connexions largement méconnues jusqu’alors : "Il le fallait bien", remarque un fonctionnaire de la maison, "chez ces ravisseurs où chaque gardien de moutons a son mot à dire et entend le faire valoir". Un professionnel du renseignement actif sur ce dossier explique : "Cette affaire nous a appris des choses essentielles : comment les talibans fonctionnent entre eux, quels sont leurs rapports hiérarchiques complexes. Le service à beaucoup progressé, vraiment !"                                                                                         

  Mais il faut remarquer que, dès cette période, les autorités françaises ont toujours affirmé que les choses allaient dans le bon sens.                                                                                                           
 

Le gros point positif, affirment les mêmes sources, c’est que cette négociation a permis de valider les circuits de décision chez les talibans, aussi bien en Afghanistan qu’au Pakistan, et de constater que les intégristes paraissant les plus obtus et les plus bornés se sont en réalité montrés ouverts à la discussion et à la négociation "sur des bases réalistes". Ainsi donc, la DGSE a curé et récuré les caniveaux dans les moindres recoins de cette partie du monde.  C’est donc la même méthode que « la piscine » a employé pour le Sahara en y envoyant un certain Pierre Camatte dont personne ne soupçonnait son appartenance aux services secrets.

Le pot aux roses sera découvert lors du compte-rendu public d’une audition du patron du renseignement français à l’Assemblée Nationale française. L’otage français libéré  Pierre Camatte serait en réalité un agent de la DGSE, les services du renseignement extérieur français. Et non simplement le président du comité de jumelage entre Gérardmer dans les Vosges et Tidarmène au Mali, ainsi que le président d’Icare, une association humanitaire travaillant à éradiquer le paludisme. Ces différentes casquettes auraient simplement servi de couvertures à des activités d’espionnage. Pierre Camatte aurait été missionné pour surveiller les mouvements des terroristes algériens qui utiliseraient le Mali comme base arrière de leurs opérations. C’est du moins ce que laisse entendre le site d’informations satiriques bakchich.info qui se base sur le compte-rendu public d’une audition à la commission de la défense nationale et des forces armées de l’Assemblée nationale.                                                                                                                                                             

Selon cette retranscription, le député PS de la Mayenne, Guillaume Garrot s’est permis d’interroger en fin d’audition le coordinateur national du renseignement à la présidence de la République, Bernard Bajolet, sur "les informations qu’il pouvait transmettre à propos des agents des services retenus en otage."  A ceci, Bernard Bajolet a répondu à l’époque, "nous avons actuellement huit otages. Un au Mali, Pierre Camatte, quatre au Soudan, un en Somalie et deux en Afghanistan."  Reste que sa réponse est ambiguë voire maladroite, au point que la question se pose: Pierre Camatte a t-il été balancé par son patron ou ce dernier s’est-il juste emmêlé les pinceaux? Mystère total. Les dernières infortunes des «supers héros»de Sarkozy: l’enlèvement de deux ex-mercenaires français dans un petit hôtel de Hombori, entre Gao et Tombouctou, dans la nuit de mercredi, et celui de trois autres Occidentaux, à Tombouctou, vendredi, où un quatrième touriste a été tué, constituent le pire mélodrame pour « la piscine ». D’après l’un des meilleurs spécialistes de la région, s’exprimant à JDD (Journal DU Dimanche) sous couvert d’anonymat à Niamey, ces événements sont à relier à la création d’un nouveau mouvement terroriste dirigé par un maître négociateur du président malien Amadou Toumani Touré, Iyad Ag Ghali. Cet ancien chef rebelle touareg est devenu un djihadiste ardent après une parenthèse comme diplomate en Arabie saoudite poursuit notre confrère. Iyad Ag Ghali, qu’on décrit comme idéologiquement très proche d’Aqmi (Al-Qaïda au Maghreb islamique), a profité du retour de Libye de combattants touareg pour former son propre groupe armé. Désigné par les autorités maliennes pour négocier avec Aqmi dans plusieurs affaires d’otages, il a joué notamment un rôle dans la libération récente des trois otages d’Arlit, au Nord Niger. Iyad est donc un très proche collaborateur des agents de la DGSE qui ont envahi le Sahara en vue de faire libérer les quatre otages français enlevés à Arlit. Il connait particulièrement cet ex-colonel Jean- Marc Gadoullet, 49 ans, qui a été blessé par balle  à un check-point de l’armée au nord du Mali selon nos informations, et qui aurait supervisé le versement de la rançon pour la libération des trois otages : la Française Françoise Larribe, mariée à un cadre d’Areva, et deux agents togolais et malgache de la Satom au Niger. Le nouveau chef de guerre et Gadoullet, ex-dur du service action de la DGSE, devenu responsable de la sécurité de Satom au Mali, ont ainsi été « associés » dans les négociations franco-maliennes avec Aqmi. Celles-ci se sont soldées, certes, par la libération des otages, mais aussi par le versement d’une rançon que les connaisseurs du dossier disent considérable.                                                                                                   

Alors que quatre otages français d’Arlit sont toujours détenus par l’émir d’Aqmi Abou Zeid, l’ex colonel Gadoullet était de plus en plus critiqué pour son rôle ambigu. L’ancien militaire, qui a servi sur plusieurs continents dans des opérations clandestines, avait en effet développé une activité de sécurité privée très ambitieuse dans le Sahel depuis la fin 2010. Selon les révélations de notre confrère, en avril dernier, il avait notamment défendu à Niamey, sous les couleurs d’Areva, un projet à rayonnement régional modestement baptisé « Phénix ». Les autorités nigériennes y ont fait échec, mais Gadoullet n’a pas renoncé pour autant. À Bamako, il a repris sa casquette dans la sécurité privée, très actif auprès des groupes d’Aqmi.    
                      
Selon plusieurs sources françaises et nigériennes, Gadoullet a alors été mandaté par la France pour être l’interlocuteur d’Abou Zeid, et introduit auprès de l’émir par Iyad Ag Ghali à la demande du président ATT lui même. Il est établi qu’en fin d’année 2010, Abou Zeid était prêt à libérer sans contrepartie financière les trois otages, de peu de valeur marchande pour lui, s’agissant de deux Africains et d’une femme. Mais la négociation a échoué alors qu’elle était sur le point d’aboutir, sabotée par le réseau de contacts de Gadoullet. Finalement, la libération des trois otages en février suivant a coûté plus de 10 millions d’euros, de sources concordantes, à Areva et Satom. Les quatre otages restants sont d’ailleurs "mis à prix" à la somme jamais vue de 90 millions d’euros.                                                                                                                                                           

Qui est Jean-Marc Gadoullet?                                                                                                                            

  Pour le compte du service Action, pendant presque vingt ans, Jean-Marc Gadoullet a bourlingué, en Birmanie, dans les Balkans, en République démocratique du Congo et au Tchad, comme "soutien aux mouvements insurrectionnels ou à des structures de sécurité d’États alliés". "Un type solide, qu’on envoie dans des situations extrêmes", selon un ancien collègue. Mais l’aventure sous l’uniforme s’achève au Tchad, justement, où Gadoullet se grille comme agent secret en février 2008, à N’Djamena, au cœur du palais d’Idriss Déby assailli par la rébellion. La commission des Affaires étrangères de l’Assemblée nationale se demande même s’il n’a pas trempé personnellement dans la disparition, au même moment, de l’opposant tchadien Ibni Oumar Mahamat Saleh.                                                                                                                     

  Mercredi 23 novembre dernier, à un check-point de l’armée malienne, Gadoullet a refusé de s’arrêter. Il a été blessé par balle et rapatrié en France. Les deux mercenaires, qui ont été employés dans les années 1990 et 2000 dans des pays où le colonel a lui-même servi, le connaissaient-ils? Et ont-ils été enlevés pour cela? Ces événements sont, en tout cas, le signal d’une confusion grandissante dans la région et un très mauvais coup pour les autorités maliennes et françaises.                                                                                                                              
              Au  grand déshonneur des « James Bond » de Sarkozy, le nord de notre pays replonge dans la terreur.                                                                                   
                                                                           
Enquête réalisée par Abdoulaye NIANGALY

 

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