Journalistes de RFI tués au Mali: la thèse d’une prise d’otages ratée est privilégiée

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Des membres de la Minusma et du MNLA inspectent le véhicule emprunté par Ghislaine Dupont et Claude Verlon, avant leur enlèvement à Kidal, samedi 2 novembre. REUTERS/Stringer
Des membres de la Minusma et du MNLA inspectent le véhicule emprunté par Ghislaine Dupont et Claude Verlon, avant leur enlèvement à Kidal, samedi 2 novembre.
REUTERS/Stringer

Le procureur général François Molins a donné, le 13 novembre pour la première fois, des précisions sur l’avancée de l’enquête judiciaire sur le double meurtre des deux envoyés spéciaux de RFI, Ghislaine Dupont et de Claude Verlon, à Kidal le 2 novembre. Il privilégie la thèse d’un enlèvement qui a mal tourné. La voiture utilisée par les ravisseurs était en très mauvais état, ce qui accrédite la thèse d’une panne. Le magistrat évoque « des soupçons très précis » contre Baye Ag Bakabo, propriétaire du véhicule, soupçonné d’avoir planifié l’opération.

La mort de Ghislaine Dupont et de Claude Verlon serait le résultat d’une prise d’otage ratée ou, plus exactement, le résultat d’une panne de voiture. Mercredi 13 novembre, au cours d’une conférence de presse, le procureur général français a insisté sur l’état du pick-up qui a servi à l’enlèvement de nos confrères : un véhicule en très mauvais état qui a connu une avarie de moteur, une importante fuite d’huile. Ce 4X4 n’avançait qu’à moins de 30 ou 40km/h, au prix d’une surchauffe du moteur et de son arrêt au kilomètre 12. C’est là que les quatre ravisseurs ont abandonné le véhicule avec leurs deux otages.

 

 

Pourquoi avoir tué les deux envoyés spéciaux ?

Que s’est il passé ensuite ? Pour le procureur, les preneurs d’otage n’avaient pas préparé leur opération. Il n’y avait pas de deuxième véhicule capable de les relayer. Pas d’échappatoire, non plus, la zone désertique n’offrant aucun abri naturel pour cacher les deux Français.

 

 

Ghislaine et Claude ont-ils tenté de s’enfuir ? C’est une hypothèse évoquée. Les ravisseurs ont-ils pris peur, devant cet imprévu mécanique ? Ont-ils eu peur d’être pris par les militaires français ? Ils auraient alors exécuté leurs otages avant de fuir.

 

Ghislaine a été tuée de trois balles dont une première mortelle dans l’aorte. Claude a été abattu de dos, par une rafale de sept balles. Les quatre hommes ont réussi à s’évanouir dans la nature avant l’arrivée des blindés français à 14h25, une heure et quart après l’enlèvement. Ils sont activement recherchés.

 

 

Baye Ag Bakabo, le propriétaire du véhicule

Une certitude également : parmi les quatre ravisseurs, l’un a été formellement identifié. Il s’agit de Baye Ag Bakabo, le propriétaire du véhicule qui a servi à enlever Ghislaine et Claude. Cet homme, un touareg malien sur lequel toutes les recherches se concentrent, est un trafiquant de stupéfiants liés à Aqmi, selon François Molins, le procureur de la République de Paris.

 

 

« Les éléments de la procédure conduisent à porter des soupçons très précis sur cet individu[Baye Ag Bakabo, ndlr] puisque l’on sait que c’est un membre d’Aqmi, qui fait aussi du trafic de stupéfiants et qui a été vu circulant au volant du pick-up qui a servi à enlever les deux journalistes », indique François Molins, le procureur de la République à Paris, au micro de RFI. Il évoque « les soupçons » qui se portent « bien évidemment » sur cet individu « qui est connu pour servir de guide à Aqmi, pour partir souvent dans des conditions assez mystérieuses dans le désert ».

 

 

Pour le magistrat français, Baye Ag Bakabo « est en lien, chez Aqmi, avec la katiba al-Ansar, celle d’Abdelkrim le Touareg, qui apparaît dans la revendication qui a été faite par Aqmi auprès d’un média mauritanien pour revendiquer l’enlèvement et l’assassinat des deux journalistes ».

« Il est activement recherché au Mali par l’ensemble des services locaux et, je pense, par l’armée », indique également le procureur.

 

 

Qui est Baye Ag Bakabo ?

« C’est un bandit, un trafiquant, plus qu’un jihadiste pur et dur », explique un notable de la région de Kidal. Les méthodes d’Ag Bakabo pour organiser le rapt ne sont effectivement pas celles d’un terroriste aguerri. Il a, par exemple, été vu à Kidal la veille de l’enlèvement en train d’acheter 140 litres d’essence – trois bidons retrouvés à l’arrière de son pick-up.

 

 

Dans la cabine du 4X4, les enquêteurs ont également retrouvé une autorisation de circuler dans la région à son nom. D’après le procureur de la République à Paris, Ag Bakabo est proche d’Aqmi, il aurait notamment servi de guide au groupe terroriste.

 

 

Lien avec Aqmi

Selon nos informations, Baye Ag Bakabo a, ces dernières années, volé, puis fourni des véhicules tout terrain à la katiba al-Ansar. Une katiba dirigée par le Touareg Abdelkrim Targui. C’est cette brigade d’Aqmi qui a revendiqué l’enlèvement et l’assassinat de Ghislaine Dupont et de Claude Verlon, il y a huit jours.

 

 

Suite à ce trafic de voitures, Baye Ag Bakabo a été arrêté, en décembre 2010, par l’armée malienne. Selon nos informations, lui et d’autres proches d’Ansar Dine ont été échangé en avril 2012 contre des soldats maliens. Baye Ag Bakabo était cantonné depuis des semaines dans le camp du Haut conseil pour l’unité de l’Azawad, HCUA, au centre de Kidal.

 

Par RFI

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