Guerre et sécurisation au Mali: Au fil du temps

0

Difficile de savoir comment mais les islamistes reviennent alors que les soldats ouest-africains de la Mission internationale de soutien au Mali (Misma) continuent d’arriver à Bamako, pendant que des centaines d’entre eux sont déjà déployés dans certaines localités du pays pour sécuriser tout le territoire malien et assurer son intégrité.

La question du statut de casque bleu n’aura pas eu le temps d’être tranchée avant que la donne ne change brusquement. Les terroristes sortent enfin de leurs cachettes pour affronter les soldats maliens et étrangers présents au Nord. Au même moment, la capitale a renoué avec la violence interne, vendredi dernier, par des affrontements et des tirs entre deux factions de l’armée : les bérets rouges proches de l’ancien président Amadou Toumani Touré renversé en mars 2012, et les bérets verts qui avaient soutenu les putschistes. Les tirs ont tué deux adolescents et fait 13 blessés, selon des sources hospitalières.

Le président de la République par intérim, Dioncounda Traoré, a condamné ces affrontements fratricides et demandé, dans une déclaration, aux militaires maliens de se ressaisir au moment où des armées étrangères viennent aider le Mali à bouter dehors les jihadistes et narcotrafiquants qui occupaient le nord du pays depuis 2012. Comme en 2012, les islamistes semblent mettre à profit les querelles internes de l’armée malienne pour avancer. Les attaques-suicide annoncées par le porte-parole du Mujao, ont été suivies de violents combats à Gao au cours du week-end. Les autres groupes terroristes feront certainement parler d’eux dans les jours à venir. Pour les contrer, les soldats africains vont entrer dans la danse même si la question des casques bleus est évoquée. Là encore, les terroristes sont en train de bousculer le plan de l’ONU pour le Mali avec les attentats en cours.

En attendant, parmi les nouvelles troupes de la Misma arrivées récemment à Bamako, figurent des Béninois, des Ivoiriens et des Sénégalais, pour le compte des pays de la Communauté des Etats d’Afrique de l’Ouest (Cédéao). Le colonel Yao Adjoumani, porte-parole de la Misma, indique que les pays contributeurs des troupes pour la Misma continuent d’envoyer leurs éléments. «À ce jour, entre 65 et 70 pour cent de l’effectif de la Misma est présent au Mali», a-t-il déclaré lors d’un point de presse à Bamako, la semaine dernière. Le col Adjoumani a également annoncé que les troupes guinéennes ont franchi la frontière malienne, avant de préciser que le déploiement de la Misma sera effectif d’ici la mi-février. Mais il est resté silencieux sur le nombre des soldats, les lieux et le calendrier de leur déploiement, pour des raisons de sécurité, soutient-il.

Selon une source proche du ministère malien de la Défense, le nombre de soldats ouest-africains au Mali devrait dépasser 5.000 avant la fin de février. Environ 2.540 soldats sont déjà arrivés dont une bonne partie est déjà déployée dans le centre et le nord. Les habitants des zones de leur déploiement se disent rassurés par la présence des troupes ouest-africaines. Le contingent de 600 Burkinabès est dans la localité de Markala, au centre du Mali. «Nous nous sentons en sécurité avec l’arrivée des soldats burkinabés. Ils sont basés à l’Ecole des sous-officiers et ne posent pas de problèmes aux gens», affirme Demba Diallo, maire de la ville de Markala. La mission des soldats ouest-africains est de sécuriser les zones de leur déploiement en organisant des patrouilles. «On ne peut pas faire plus de cinq minutes sans voir des soldats burkinabés en patrouille. Ils sécurisent la ville et les autres localités environnantes», explique Diallo. Dans la même région, à Ségou, sont installés 250 Nigérians tandis qu’un peu plus au nord, se trouvent des Togolais dans la localité de San. Quant à Gao, l’une des grandes villes du nord du pays, elle abrite le contingent des soldats nigériens venus là-bas directement de Niamey, au Niger, avec les troupes tchadiennes déployées vers l’extrême-nord, à Kidal et au-delà.

Au plan humanitaire, des dispositions sont prises pour le respect des droits de l’Homme au cours de la mission de sécurisation du pays. Par exemple, plusieurs cadres officiers de la Misma ont bénéficié d’une formation sur le respect des droits humains, le 5 février à Bamako. Le Comité international de la Croix-Rouge (Cicr) espère ainsi rappeler à toutes les parties au conflit leurs obligations dans la protection de la population civile. Selon Zavan Raniero Owsa, chargé des forces armées et sécurité au Cicr, l’objectif est d’arriver au respect d’un Etat de droit durant la période de conflit et au cours des périodes post-conflit. «La stratégie qui sera adoptée consiste, pour chaque officier sensibilisé, à servir de relais au niveau de sa troupe, en sensibilisant chacun au moins cinq éléments… De fil en aiguille, cette stratégie devra toucher au moins plus de 20 pour cent de l’effectif total des cadres de la Misma», rassure Owsa.

Mais, au moment où des tractations sont en cours pour placer les troupes de la Cédéao sous le contrôle des Nations unies, les nouvelles de la déchirure interne de l’armée à Bamako inquiètent les populations du Nord-Mali. Par ailleurs, la situation alimentaire est difficile dans la région, même si l’ONU a annoncé, le 5 février, la reprise de la distribution de rations alimentaires dans le nord. Le Programme alimentaire mondial (PAM) avait cessé d’envoyer de l’aide depuis la reprise des combats en janvier. «Nous avons commencé la livraison des vivres par la voie fluviale vers des villes du nord comme Tombouctou, Goundam et Niafunké», affirme Daouda Guirou, chargé de communication au bureau du PAM au Mali. L’ouverture, à partir du vendredi 8 février, de l’axe routier Sévaré-Douentza, va permettre d’acheminer des vivres vers Gao. «Les distributions de vivres aux populations vont commencer très prochainement -samedi ou dimanche», précise Guirou.

Soumaïla T. DIARRA 

Commentaires via Facebook :