Génocide des Tutsis : Cet autre crime de la France en Afrique

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Le génocide des Tutsis au Rwanda a fait entre 800 000 et 1 million de victimes, massacrées dans des conditions atroces… En soutenant les auteurs du génocide, les autorités politiques et militaires français se sont rendues complices de ce crime. Cette complicité est attestée par de nombreux documents et témoignages, pourtant aucun responsable français n’a été jugé.

Dès 1990, la France sait qu’un génocide peut survenir au Rwanda. Plusieurs massacres à caractère génocidaire ont déjà été organisés sous la responsabilité des autorités rwandaises, et Paris est informé dès l’automne 1990 par l’Ambassade de France à Kigali du risque d’extermination des Tutsis. Dès janvier 1993, suite à sa participation à une mission d’observation au Rwanda par la Fédération internationale des droits de l’Homme, Jean Carbonare, alors président de Survie, intervient au “20 heures” de France 2 pour alerter l’opinion : « C’est une politique organisée (…). On a parlé de purification ethnique, de génocide, de crime contre l’humanité dans le pré-rapport que notre commission a établi. (…) Notre gouvernement, qui supporte militairement et financièrement les autorités rwandaises, a une responsabilité… Il faut qu’on fasse quelque chose  ».

 

Soutien militaire à une armée en déroule

La France forme l’armée et la gendarmerie rwandaises à partir de 1990, permettant aux effectifs des Forces Armées Rwandaises (FAR) d’être multipliés par 10 (de 5 000 à 50 000 hommes). Des témoins ont indiqué que des miliciens ont également été formés par des militaires français. En 1990, pendant l’opération militaire Noroît (1990-1993), officiellement destinée à la protection des expatriés français, l’armée française s’engage aux côtés des FAR sur le front contre le FPR, pour bloquer son avancée. A cette époque, les Tutsis rwandais subissent une forte discrimination et plusieurs massacres sont commis en toute impunité.
Les militaires français restent passifs face au génocide. Pendant l’opération Amaryllis, mise en place pour l’évacuation des ressortissants français au début du génocide, les troupes françaises n’interviennent pas pour faire cesser les massacres dont elles sont les témoins directs. Pendant l’opération militaire Turquoise, menée à partir de fin juin 1994 par la France sous mandat de l’ONU, les soldats portent secours à des Tutsis mais laissent par ailleurs des actes de génocide se poursuivre dans la zone sous leur contrôle.

Ainsi, à Bisesero, des rescapés tutsis découverts par une patrouille française sont délibérément abandonnés 3 jours durant aux tueurs.

La France livre des armes avant et pendant le génocide. Cela a été expliqué par Hubert Védrine en 2014 comme “la suite de l’engagement d’avant” aux côtés des forces armées rwandaises, toujours en guerre contre le FPR. Mais même l’embargo décidé par l’ONU en mai n’empêche pas les armes d’arriver par Goma, au Zaïre, à la fin du génocide, quand l’aéroport est contrôlé par les militaires français de l’opération Turquoise.

Pendant l’opération Turquoise, la France protège puis laisse fuir les génocidaires. La “Zone Humanitaire Sûre” (ZHS), contrôlée par la France au sud-ouest du pays, sert de refuge aux génocidaires qui n’y sont ni désarmés ni arrêtés. Le gouvernement intérimaire rwandais (GIR), une partie de l’armée et des milices génocidaires fuient librement vers le Zaïre voisin avec armes et bagages. En refusant d’arrêter les acteurs du génocide et au contraire en facilitant leur fuite, la France viole la Convention de l’ONU sur la prévention et la répression du crime de génocide qu’elle a signée, qui enjoint de déférer les présumés coupables à la justice. De plus, ces armées préparent la reconquête du Rwanda, la France les entraîne et les réarme. Ils formeront plus tard les Forces démocratiques de libération du Rwanda (FDLR) qui seront à l’origine de la déstabilisation des Kivu, deux régions frontalières du Zaïre.

 

Soutien diplomatique à un régime extrémiste

Le soutien politique apporté au pouvoir rwandais est décisif.  Suite à l’attentat mortel contre l’avion du président Habyarimana le 6 avril et à l’assassinat des responsables politiques opposés au génocide, le Gouvernement intérimaire rwandais (GIR) est constitué en partie au sein même de l’ambassade de France à Kigali, avec le soutien de l’ambassadeur. Ce nouveau gouvernement devient le maître d’oeuvre du génocide. Les autorités françaises soutiennent le GIR à l’ONU où il siège au Conseil de sécurité en tant que membre non permanent et reçoivent plusieurs de ses leaders en France : le 27 avril 1994, le ministre des Affaires étrangères du GIR – lequel est en train de commettre le génocide – et le leader du parti extrémiste CDR sont reçus officiellement au Quai d’Orsay par Alain Juppé, à Matignon par Edouard Balladur et à l’Elysée par Bruno Delaye, conseiller Afrique de François Mitterrand.

Mémé Sanogo

 

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