Selon un rapport publié mercredi dernier par «Global Initiative», les enlèvements sont utilisés par le JNIM comme un outil stratégique pour augmenter ses revenus. Le rapport fait surtout cas du Burkina Faso confronté aujourd’hui aux mêmes défis sécuritaires que le Mali voire le Sahel.
«Les enlèvements sont utilisés par le JNIM comme un outil stratégique» ! Telle est l’une des principales conclusions d’un rapport d’étude publié mercredi dernier par «Global Initiative». Il s’agit d’une GI-TOC (Initiative mondiale contre la criminalité transnationale organisée) qui anime un réseau d’experts dont le rôle est d’analyser, de réagir et d’innover en matière de lutte contre la criminalité organisée transnationale. Cela nous conforte dans la thèse que nous avions développée la semaine dernière.
En effet, dans notre précédente parution (Le Matin N°572 du mercredi 25 mai 2023), nous avons pertinemment mis en relation la libération de notre confrère Olivier Dubois et la recrudescence des attaques perpétrées par le Groupe de soutien à l’islam et aux musulmans d’Iyad Ag Ghali. Et cela parce que la caution payée pour sa libération et celle de l’humanitaire américain Jeffery Woodke ont visiblement permis au groupe terroriste de s’offrir des armes et de nouveaux moyens logistiques.
Selon «Global Initiative», les groupes criminels organisés ont diversifié leurs opérations pour augmenter leurs revenus. Ainsi, Jamāʿat nuṣrat al-islām wal-muslimīn (JNIM) ou en français Groupe de soutien à l’islam et aux musulmans (GSIM) est devenu «l’acteur le plus actif dans l’industrie des enlèvements au Burkina Faso» voire au Sahel. «Les enlèvements sont utilisés par le JNIM comme un outil stratégique, et l’augmentation des enlèvement reflète son expansion en termes de zones d’influence», a déploré «Global Initiative».
Selon l’organisation, «les enlèvements de ressortissants au Burkina Faso ont atteint des niveaux record en 2021 et se sont poursuivis à une échelle sans précédent tout au long de 2022. Les groupes armés non étatiques sont les principaux auteurs, en particulier le Groupe de soutien à l’islam et aux musulmans (Jama’at Nasr al-Islam wal Muslimin)». Selon les données de l’Armed Conflict Location and Event Data Project (ACLED), les enlèvements ont été multipliés par plus de 30 depuis 2017, lorsque la situation sécuritaire au Burkina Faso a commencé à se détériorer fortement. Le nombre d’incidents est passé de 8 en 2017 à 262 en 2021 et à 219 en 2022.
L’an 2021 a notamment vu le pic le plus important d’enlèvements, coïncidant avec le fait que le Burkina Faso est devenu l’épicentre du conflit dans le centre du Sahel, avec de graves violences engloutissant de grandes parties du pays. En avril 2022, des sources officielles ont signalé que 40 % du territoire échappait au contrôle du gouvernement.
«Ce rapport met en lumière l’économie politique de l’industrie des enlèvements au Burkina Faso, en l’analysant comme une économie criminelle qui alimente l’instabilité tout en étant elle-même alimentée par les conflits», a-t-elle indiqué. Le rapport explore notamment comment «l’enlèvement contre rançon fonctionne comme un point d’entrée pour les groupes extrémistes violents» et comment il a évolué à mesure que le conflit est devenu plus violent, impliquant des conflits intercommunautaires et s’étendant à la plupart des 13 régions du Burkina Faso.
Moussa Bolly