Douentza, occupée et…oubliée

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Depuis l’occupation des régions du nord du Mali et d’une partie de la région de Mopti, notamment le cercle de Douentza, l’Association des ressortissants de ce cercle a mis sur pied un comité de crise pour soulager la souffrance des populations. La situation sur le terrain et les actions menées par le comité de crise ont été rendues publiques le samedi 16 juin, au cours d’une conférence  de presse. Elle était animée par Amadou Koita, président de l’Association, qui avait à ses côtés Fatoumata Dicko, chargée de la mobilisation des ressources.

Parlant de la situation sur le terrain, le président Koïta dira que depuis le 2 Avril, le cercle de Douentza est occupé comme les régions de Kidal, Gao et Tombouctou. Sa population subit les mêmes exactions. A travers une administration et un poste de contrôle, les éléments du MNLA rançonnent les populations. Cependant, selon le président de l’Association, un sort différent est réservé à Douentza par l’Etat, les médias et les organisations à caractère humanitaire. ” Toutes les aides vers les populations des zones occupées ont été décidées et exécutées sans aucune prise en compte du cas du cercle de Douentza”, s’est indigné monsieur Koita.  Face à cette situation d’oubli, le comité de crise a pris le taureau par les cornes en mettant en place un plan d’action. Sur le volet de la santé, le comité a envoyé  7 médecins et 7 infirmiers pour couvrir les arrondissements de Hombori, Boni, Boré, N’Gourma et Douentza.Des médicaments ont pu être acheminés dans les centres de santé locaux. En ce qui concerne le volet éducation, le comité de crise a procédé à l’inscription des élèves déplacés dans les différents établissements de Mopti. Quant au volet humanitaire, une commission évalue actuellement les besoins, ce qui n’a pas empêché d’envoyer en urgence 35 tonnes de riz à Douentza. Pour alimenter la centrale électrique qui était arrêtée, le comité de crise a acheté 5 000 litres de carburant depuis le 11 juin. Cette première dotation sera relayée par 25 000 litres d’une valeur de 15 millions offerts par les ressortissants du cercle qui vivent en Guinée Equatoriale. Le président Koita a attiré l’attention sur le drame animalier en gestation. En effet, chaque année, au mois de juin, les animaux quittent le Delta du Niger pour le Gourma en vue de paître. Cette année, avec l’occupation de toute cette zone par les rebelles, les animaux ne pourront pas partir, ce qui occasionnera la perte de milliers de têtes. Le président a demandé aux ressortissants de Douentza d’engagement pour appuyer le comité de la crise. Aux medias, il a demandé un traitement équitable de l’information par rapport à l’ensemble des zones occupées.

Comment l’Etat doit communiquer en temps de crise

L’hôtel Nord-Sud de Bamako a servi de cadre, samedi matin, à une conférence-débats sur le thème: “Quelle politique de communication gouvernementale en période  de guerre ?”. Organisée par l’association d’économistes dénommée ADSE, la conférence était animée par Maître Cheick Oumar Konaré, avocat à la cour, et a enregistré la présence de hautes personnalités comme le ministre de l’industrie, du commerce et des mines, Maître Ahmadou Touré; le représentant du ministre de la communication, Seydou Baba Traoré; la députée et ex-ministre Mme Askofaré Oulématou Tamboura, etc.

Selon le conférencier, Me Konaré, la politique de communication du gouvernement, dans la crise du nord, a été marquée par le silence, le refus de communiquer. Quans des guerriers armés sont venus de Libye camper à nos frontières, l’Etat n’a pas expliqué pourquoi le Mali ne les refoule pas ni ne les désarme. L’Etat n’a pas non plus révélé pourquoi il leur donnait de l’argent. Toutes choses qui ont, plus tard, servi à justifier les alléghations de collusion entre les autorités et les rebelles. Quand de grandes villes maliennes (Aguelhok, Tessalit, Kidal, Gao, Tombouctou, etc.) dans les mains des rebelles, l’Etat s’est réfugié dans le silence. Les rares fois où il a rompu le silence, c’est pour mentir en qualifiant de “repli stratégique” une véritable déroute des armées. “C’est l’absence de communication et les tentatives de manipulation de l’opinion qui ont décrédilisé le discours gouvernemental, démotivé les troupes sur le terrain, révolté les épouses de soldats et, finalement, entraîné les désertions massives puis le coup d’Etat du 22 mars”, a analysé Me Konaré. L’avocat, qui fut d’ailleurs journaliste, préconise que l’Etat respecte le droit de la presse et du peuple à l’information juste et change de politique de communication. La communication gouvernement doit être ponctuelle (et non tardive) et s’adresser au plus grand nombre de cibles (partis, associations, presse, etc.). Le conférencier propose la création d’un Service d’Information du Gouvernement qui, rattaché à la primature,  étudierait l’état de l’opinion, centraliserait les informations, les diffuserait auprès de tous les acteurs politiques, économiques et sociaux. “Cet organisme permettrait aussi, précise Me Konaré, d’éviter les discordances dans les messages des différents services publics”. Le conférencier a enfin souligné l’intérêt qu’a l’Etat à nouer un partenariat fructueux avec la presse, au lieu de considérer celle-ci comme un ennemi à l’affût de scoops sensationnels.

A la suite de Me Konaré, les débats ont fait constater la nécessité de voter une loi sur l’accès de la presse à l’information et sur le devoir de compte-rendu des gouvernants.

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