Attaques multiples et complexes contre les Forces armées maliennes et de sécurité (FAMAS), mais aussi contre les soldats de la paix et de l’opération Barkhane, la difficile situation sécuritaire de notre pays nécessite des réponses à court, moyen et long termes. Quelles sont les pistes à explorer alors dans ce sens ?
L’opérationnalisation, dans les meilleurs délais, des patrouilles mixtes représente une alternative crédible pour combler le déficit sécuritaire dans lequel est plongé notre pays. L’environnement, de façon générale, est favorable à ce démarrage rapide. En effet, apprend-on, les trois parties signataires ont fourni chacune une liste de 200 hommes devant constituer la première unité pour les Patrouilles mixtes, qui sera basée à Gao.
De même, annonce la même source, le Mécanisme Opérationnel de Coordination (MOC), qui doit coordonner ces actions de mise en confiance et de sécurisation, est installé à Gao depuis octobre 2015.
L’on apprend que le MOC a bénéficié du soutien du Gouvernement et de la MINUSMA, pour la fourniture de véhicules, d’équipements militaires (treillis, armes, etc.), de mobilier et fournitures de bureau. L’alimentation, les soins médicaux, l’eau et le carburant destiné aux premières patrouilles sont disponibles.
Aidés par leurs camarades FAMAS, les sapeurs de Barkhane ont tout récemment effectué des travaux, permettant de sécuriser la zone du poste de commandement en y installant des ‘’bastion walls’’.
Grâce à leur connaissance du terrain, leur grande mobilité, leurs sources locales de renseignement (pour ce qui est en tout cas des mouvements armés), les Patrouilles mixtes pourraient porter de sérieux coups aux narco-terroristes dont le périmètre d’action s’élargit de plus en plus.
Il faut rappeler que le MOC a deux missions principales.
Pour le présent, il est chargé de la planification et de la conduite des patrouilles mixtes, associant les FAMAS, la Coordination et la Plateforme, avec l’appui de la MINUSMA et des forces internationales, afin d’assurer la sécurité dans le nord du Mali.
Pour l’avenir, il prépare le redéploiement sur l’ensemble du territoire des forces de sécurité et de défense reconstituées, issues du processus d’intégration des ex-combattants. Le MOC est donc un organisme temporaire, qui a vocation à disparaître lorsque les dispositions sécuritaires de l’APR auront été pleinement appliquées.
Une deuxième piste à explorer, pour endiguer l’insécurité, est l’accélération du cantonnement. Et pour cause, des jeunes à qui l’on a remis des armes écumant des régions entières et qui n’ont véritablement pas de source de revenus sont des dangers potentiels pour la sécurité des personnes et de leurs biens.
Si tout n’est pas encore en place, l’on devrait cependant pouvoir commencer le cantonnement avec le dispositif existant ; question de réduire le nombre de dangers potentiels dans la nature.
Pour l’existant, fait-on savoir, à ce jour, les parties signataires ont remis les listes de leurs représentants proposés pour la Commission nationale de DDR (CNDDR), la Commission d’Intégration (CI) et le Commissariat national à la Réforme du Secteur de Sécurité (CNRSS).
Il n’y avait que la liste de la CMA, pour le CNRSS, qui était encore attendue.
L’on rapporte également la construction de 3 sites de cantonnement proposés par la Plateforme dans les localités de Likrakar (région de Tombouctou), Fafa (région de Gao), et Inakar (région de Menaka) est complètement achevée.
Les 5 autres sites situés à Tinfadimata (région de Ménaka – CMA), Ilouk (région de Gao -CMA), Tabankort (région de Gao-Plateforme), Tessalit (région de Kidal – CMA) et Ber (région de Tombouctou -CMA) sont prêts à accueillir les ex-combattants à tout moment ; ils disposent déjà de l’eau, de l’électricité, des toilettes et des tentes. Chacun des huit sites a la capacité de recevoir 750 ex-combattants.
Le hic à ce niveau, est que les listes certifiées des combattants à cantonner de la Plateforme et de la CMA ainsi que leurs armes n’avaient pas encore été soumises, il y a quelques jours. Ce qui pourrait corroborer les accusations selon lesquelles, certains groupes armés mettent aux enchères la figuration sur la liste des éléments à cantonner. Les candidats doivent payer rubis sur ongle pour être retenus sur les listes, même s’ils n’ont jamais manié une kalach. Il faut dire que pour raisons d’opportunisme et de boulimie financière, l’éthique et les enchères font bon ménage.
Une troisième piste porte sur la hiérarchie militaire. Elle devrait veiller à ce que les Forces armées et de sécurité ne soient pas le refuge privilégié des demandeurs d’emploi ; parce que l’armée, on y entre par vocation, par conviction. Bien sûr que cela exigerait de certains d’entre les hauts galonnés une remise en cause.
Après le recrutement, la hiérarchie devrait valoriser le mérite ; mais aussi sanctionner les fautes. Parce qu’il n’est pas acceptable d’abandonner régulièrement ses positions, d’être surpris par l’ennemi…
En quatrième lieu, il faut une nécessaire et rapide conversion/reconversion aux techniques de la guerre asymétrique pour encaisser le moins de perte possible (en hommes et en matériels) dans les attaques complexes (utilisation d’engins explosifs puis tirs d’armes automatiques).
Il s’agira aussi de privilégier la mobilité pour aller traquer l’ennemi au lieu que ce soit lui qui vienne surprendre et prendre les camps fixes.
En définitive, si les Forces armées et de sécurité ont la mission de défendre les personnes et leurs biens ; la population elle, de son côté, est tenue d’y contribuer, à travers le renseignement.
Par Bertin DAKOUO