Le cas malien ne cesse plus de faire école dans la sous-région ouest africaine. Après la Guinée Conakry, c’est le pays des hommes intègres qui semble nourrir le dessein d’emboiter les pas du voisin malien. En effet l’insondable et amer scenario qui se concocte doucement au Burkina Faso présente une grande analogie avec celui du Mali, qui avait commencé à prendre forme un certain 5 juin 2020. Mauvaise gouvernance et corruption, dysfonctionnement et mal organisation au sein des forces armées, l’engrenage aigu d’une insécurité métastatique, opposition politique qui s’accorde grandement avec la majorité de la population, incessantes et virulentes manifestations d’humeurs de la société civile instrumentalisées par des politiques, etc. Bref, l’embarras et l’indécision du gouvernement à qui le peuple impose la périlleuse et rude mission de se détourner d’une France qui semble le tenir par la gorge. Voici en partie le cocktail explosif qui a eu raison du régime d’Ibrahim Boubacar Keita au Mali et qui ne tardera peut-être pas à se reproduire avec le président Rock Marc Christian Kaboré au Burkina Faso. D’autre part, si la stratégie ayant abouti au reversement d’IBK peut être considérée comme un cas d’école dans certains pays voisins, il n’en demeure pas moins que cette chute ne s’est jusqu’à preuve du contraire pas révélée le remède tant espéré pour sortir le Mali de l’insécurité et de la gabegie.
Sur un tout autre plan, en se donnant le privilège d’opter pour une transition, le Burkina Faso, connu pour sa grande stabilité sociopolitique, risque d’entrer de plain-pied dans un cycle de tumultes surtout que les clivages ont déjà atteint le summum jamais égalé dans l’histoire nationale de l’ancienne Haute Volta. Tout comme au Mali, en effet, les violences djihadistes se confondent très souvent aux affrontements intercommunautaires parallèlement aux discordances liées d’une part aux demandes de certains qui estiment qu’il faut remettre le charismatique général Gilbert Diendéré aux affaires tout en réclamant une relecture de l’accord de défense avec la France et, d’autre part, celles qui concernent le procès de l’assassinat de Thomas Sankara et de l’éventuel retour de l’ex président Blaise Compaoré qui désire regagner le bercail.
Somme toute, ce qu’il arrive au Burkina Faso est fort malheureux au regard d’’indénombrables victimes causées par l’insécurité, mais les manifestants du 27 novembre 2021 ne doivent pas se mettre dans la dynamique biaisée de déplacer le problème pour le suppléer par un autre plus ambigu. Cela Eddie Komboigo, chef de file de l’opposition – qui n’en finit plus d’envoyer des diatribes à un gouvernement loin d’être irréprochable – en sait parfaitement quelque chose. Sous nos tropiques, il est impérieux de s’abstenir des passions et émotions tout en admettant que notre mode de gouvernance et nos armées ne sont pas encore taillées pour faire face à la nouvelle guerre qu’on nous impose et que la symbiose est indispensable d’autant que ni l’opposition politique, ni le gouvernement n’ont une baguette magique.
Ousmane Tiemoko Diakité