Bilan du G5 Sahel: des annonces concrètes mais un manque de financement

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Roch Marc Christian Kabore, Ould Abdel Aziz, Emmanuel Macron, Ibrahim Boubacar Keita, Idriss Deby et Mahamadou Issoufou ce 2 juillet 2017 à Bamako. © REUTERS/Luc Gnago
Roch Marc Christian Kabore, Ould Abdel Aziz, Emmanuel Macron, Ibrahim Boubacar Keita, Idriss Deby et Mahamadou Issoufou ce 2 juillet 2017 à Bamako. © REUTERS/Luc Gnago

Les chefs d’Etat du G5 Sahel se sont réunis dimanche 2 juillet à Bamako pour acter la création de leur force anti-terroriste conjointe. Principal soutien à sa mise en œuvre, la France a voulu envoyer un signal politique fort, incarné par la présence du président Macron qui souhaite qu’elle puisse mener ses premières actions dès l’automne. Des annonces concrètes ont été faites, côté français comme africain, mais le manque jusqu’à présent de moyens financiers risque de freiner considérablement sa mise sur pied effective.

Le coup d’envoi de la force conjointe devait notamment être placé sous le signe d’une appropriation par les cinq chefs d’Etat africains de leur propre sécurité, au-delà des actions menées par la France et l’ONU au Sahel. Si cette dimension a bien été au cœur des discours, force est de constater que le président malien et son invité d’honneur Emmanuel Macron, seuls à s’exprimer, ont quelque peu relayé cet aspect au second plan.

A ceux qui se demandaient si le soutien de Paris à la création de cette force africaine pourrait présager un désengagement français, le président Macron a répondu à plusieurs reprises que la force G5 viendrait en complémentarité de Barkhane et de la Minusma. « Nous y mettrons les moyens qu’il faut, la détermination qu’il faut, et je sais que cela prendra du temps. Mais nous gagnerons cette bataille pour la liberté », a-t-il martelé.

Sur le plan des annonces, pour ce qui est du volet militaire, les pays du G5 ont annoncé débloquer 10 millions d’euros chacun; la France, une dotation de 8 millions d’euros sur 5 ans, en plus d’aides opérationnelles et techniques. Malgré ces efforts et les 50 millions déjà promis par l’Union européenne, ces financements atteignent tout juste le quart du coût nécessaire à cette force conjointe, estimé à 423 millions d’euros selon le président malien. D’où l’appel lancé par Emmanuel Macron au G5 à prouver son efficacité sur le terrain pour convaincre d’autres bailleurs et l’accent mis sur l’impératif d’une « responsabilité réciproque » entre la France et ses alliés africains.

■ Force G5 Sahel : la position de la Mauritanie

Si les autorités maliennes, burkinabè, nigériennes et tchadiennes se sont déjà plusieurs fois exprimées publiquement sur leur vision de la force G5 Sahel, la Mauritanie s’est peu fait entendre. Notre envoyée spéciale a pu s’entretenir avec le président Mohamed Ould Abdel Aziz, au sortir du sommet durant lequel il a eu un tête-à-tête avec Emmanuel Macron.

Pour le président mauritanien, si l’intervention Serval en 2013 a été « un coup d’arrêt vital » à la progression terroriste au Mali, la situation actuelle est plus inquiétante qu’alors. « La menace s’est étendue géographiquement, complexifiée avec de nouveaux groupes à connotation ethnique et la détresse croissante de certaines populations, là où l’Etat reste absent, les rend de plus en plus inféodées aux terroristes qui contrôlent leur zone, par les armes comme par l’argent », estime-t-il. Le président affirme avoir les hommes nécessaires pour déployer un bataillon à la frontière mauritano-malienne pour la force G5 comme le prévoit le dispositif envisagé.

Mais pas question pour lui de s’engager sans les moyens financiers et en équipement nécessaires, non pas pour « seulement harceler ponctuellement les terroristes » comme cela a pu être le cas lors de précédentes opérations conjointes avec le Mali, mais bien pour les neutraliser durablement; ce qui prendra plusieurs années, pense-t-il. « La différence avec le régime malien précédent, c’est qu’il y a eu une vraie prise de conscience. Tout est question de volonté. S’il y a une réelle volonté politique du G5 et de ses partenaires, et que les moyens sont mis, alors la force conjointe pourra devenir opérationnelle », estime-t-il. Sur ce point, Mohamed Ould Abdel Aziz dit apprécier la vision de la situation du nouveau président français Emmanuel Macron, « une vision plus pragmatique et réaliste » que son prédécesseur, indique-t-il.

 Par RFI Publié le 03-07-2017

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