Que se passe-t-il réellement à Kidal ? Quel est désormais le statut de cette ville, où les bandes armées continuent toujours de régner là où il était question de les désarmer ? Ce sont là, entre autres, deux questions qui reviennent après le retour de l’armée dans cette ville et les évènements ou manifestations d’hostilité qui ont accompagné ce retour. Et qui obligent les militaires maliens d’être cantonnés à la place des éléments appartenant aux groupes armés.
La signature de l’accord de Ouaga avait suscité un grand espoir chez de nombreux Maliens, et au-delà, au sein de la communauté internationale. Aussi, l’accord de Ouaga était perçu comme étant le couronnement des efforts de tous ceux qui ont contribué à la résolution de la grave crise sécuritaire au Mali, avec l’occupation de l’ensemble des régions du nord par des bandes de Djihadistes, terroristes et narcotrafiquants.
L’accord de Ouaga prévoyait le retour de l’armée malienne à Kidal, afin de parachever le recouvrement de l’intégrité territoriale. Il était surtout prévu le cantonnement et le désarmement des groupes armés, notamment ceux du Mnla.
C’est conformément aux termes de cet accord que 150 soldats de l’armée régulière sont arrivés à Kidal. Ils ont directement été orientés vers le camp N°1. Ils y sont encore. Cependant, le retour de l’armée à Kidal provoque à la fois des grincements de dents et des tensions dans la localité.
D’abord du côté de l’armée, une source militaire indique qu’à Kidal, ce sont les forces armées qui sont cantonnées et non les groupes armés. La même source indique que les 150 éléments qui sont arrivés n’ont aucune liberté, ni de mouvement, ni d’action. Or, les éléments des groupes armés continuent de parader en ville avec armes et munitions. Toutes choses qui sont contraires à l’accord de Ouaga.
Au sein de l’armée, de nombreuses interrogations sont posées : pourquoi un quota portant sur le nombre de soldats (200 éléments) a-t-il été imposé par les Français ? Jusqu’à quand cette restriction ? L’accord de Ouaga prévoit-il ce quota? Pour l’instant, il n’y a guère de réponses à ces questions.
Kidal : rupture d’avec le Mali
Au même moment, la situation n’a cessé de se dégrader à Kidal, malgré le retour, la semaine dernière, du gouverneur Kamissoko. Il était à la tête d’une délégation d’administrateurs (préfets et sous-préfets) dont le déploiement est prévu avant l’élection présidentielle. Et contrairement à ce que certains organes de presse internationaux ont affirmé, le retour, jeudi dernier, du gouverneur à Bamako n’est pas lié à la tension à Kidal. En effet, Kamissoko n’était pas allé pour rester. Il avait juste accompagné et installé ses collaborateurs et marqué le retour symbolique de l’administration à Kidal. Le gouverneur doit y retourner cette semaine, indique une source proche du département de l’administration territoriale. Cependant, la situation est loin de se stabiliser à Kidal.
En effet, sous la houlette des mouvements armés, des enfants et des femmes sont quotidiennement manipulés et poussés à agir contre les soldats maliens, qui sont obligés de se retrancher dans leur camp. Tous ces actes de provocation semblent cautionnés par les notabilités de la ville, dont le vieux Intallah, qui aurait affirmé à des responsables de l’administration qu’entre eux (populations de Kidal) et le Mali, « c’est fini ». Cette déclaration de rupture aurait été faite, la semaine dernière, devant des responsables de la Minusma et de Serval, qui accompagnaient les administrateurs maliens. Cette déclaration venant de ce vieux manitou de Kidal ne surprend guère. Car, lui et sa famille ont toujours été associée et/ou au centre des remous dans la localité. Mais la situation actuelle et les comportements affichés par certains individus à Kidal, a ceci de positif : la communauté internationale finira par découvrir certaines réalités dans cette ville. Elle va surtout découvrir la vraie face de gens qui se rendent compte que la présence de la Minusma à Kidal est loin d’arranger leurs affaires, celles qui a toujours consisté à faire de la rébellion un fonds de commerce et un moyen de chantage contre l’Etat malien.
C. H. Sylla