Ansar Dine opte pour le dialogue: Sincérité ou piège ?

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Iyad Ag Ghaly, le chef d’Ansar Dine, à Kidal, dans le nord du Mali, le 7 août 2012
© AFP

Iyad Ag Ghali tend la main aux autorités maliennes. Fait inédit qui ouvre du coup un boulevard pour la voie de la négociation dans la crise malienne.

Ayant participé à tous les accords de paix signés depuis la rébellion de Juin 1990, son expérience peut s’avérer précieuse, sinon déterminant dans la résolution de la crise si, pour une fois, l’homme respectait sa parole donnée.

Au terme de négociations menées pendant deux jours à Ouagadougou, Ansar Dine qui occupe la région de Tombouctou affirme être prêt  pour le dialogue avec les autorités maliennes de transition. Le Mardi 6 Novembre, le mouvement a déclaré son rejet du terrorisme. « Ansar Dine rejette toute forme d’extrémisme et de terrorisme et s’engage à lutter contre la criminalité transfrontalière organisée » a indiqué une déclaration lue par un membre de la délégation du groupe islamiste reçu par le Président Compaoré. Cela signifie une prise de distance d’Ansar Dine avec les groupes terroristes AQMI et MUJAO.

Il s’engage aussi à « un arrêt total des hostilités » et appelle à un « dialogue politique inclusif » entre les différentes parties de la crise malienne. Pour l’instant, nul ne sait s’il s’agit d’un renoncement à la Charia appliquée vigoureusement depuis 7 mois dans les villes du nord.

La médiation burkinabè, bien que n’ayant pas été efficace depuis le début de la crise, aura tout de même réussi un bon cout en rendant Ansar Dine presque fréquentable même si, certains pensent que le changement de position de ce groupe armé n’est motivée que par la mobilisation de la Communauté Internationale pour une intervention militaire au Nord-Mali.

L’approche malienne pour résoudre cette crise a toujours été la voie du dialogue. Pendant que l’intervention militaire se prépare (et doit se préparer) les autorités maliennes  ont là,  une occasion  de faire valoir la solution politique négociée.

La guerre est toujours une mesure extrême. Donnons donc sa chance à la négociation. Qu’Ansar Dine soit sincère ou pas, il faut faire avec.

Qui est Iyad Ag Ghali ?

Le tout puissant chef d’Ansar Dine n’a pas toujours été cet islamiste borné ayant des ambitions d’application de la Charia. Il était surtout connu pour son goût pour les femmes et son penchant pour la “boisson”. Certes, il est rebelle depuis plus de vingt ans, mais, ses revendications avaient plus des bases ethniques que religieuses. Il prit part à toutes les rébellions qui se sont produites au Mali depuis 1990.

Issu de la noblesse Ifoghas, à l’instar de grands rebelles comme Ibrahim Ag Bahanga et Hassane Fagaga, il bénéficie d’un pouvoir “légitime” renforcé par le rôle qu’il a joué dans les différentes rébellions. C’est lui qui dirigeait le Mouvement Populaire de l’Azawad dont la création remonte à1988 et qui déclenchera la première rébellion de l’après révolution en Juin 1990. En 1991, au lendemain de cette première rébellion, le MPLA se scinde en trois groupes : le FPLA  (Front Populaire de Libération de l’Azawad) dirigé par Mohamed Ag ghissa, l’ARLA (l’Armée Révolutionnaire de Libération  de l’Azawad) d’Abdrahmane Gala et le nom initial du MPLA revient à Iyad Ag Ghali. C’est ce dernier groupe qui soutiendra le pacte national de 1992.

En Mai 2006, Iyad participe au mouvement de l’Alliance démocratique du 23 Mai pour le changement aux cotés de Fagaga et Bahanga dont il  devint le secrétaire général.

Ce mouvement débouche sur les accords d’Alger.

En 2008, il est nommé premier conseiller à Djeddah, en Arabie Saoudite d’où, il fut expulsé en 2010. Il tisse alors des réseaux visant à libérer des otages occidentaux retenus par Aqmi pour nombre de pays dont le Mali. Son âme de rebelle se révèle de nouveau à la faveur de la rébellion du 17 Janvier dernier.

Après le coup d’Etat du 22 Mars et la chute des trois grandes villes du nord, Iyad ne s’entendant pas avec le MNLA décide de créer le tristement fameux Ansar Dine et de quitter Kidal pour Tombouctou.

Son caractère versatile et son changement d’humeur peut servir ou desservir le processus de négociation dans la crise malienne.

 

Ahmed M.THIAM

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