Le mystérieux cargo transportant des tonnes de cocaïne, retrouvé calciné dans le désert malien, n’a pas encore fini de révéler tous ses secrets. Le Gouvernement du Mali aurait bel et bien bloqué les services habilités à enquêter sur l’affaire. Pourquoi ? Mystère !
Avant d’être limogée de son poste, la Directrice générale de l’Agence Nationale de l’Aviation Civile, Mme Sanogo avait déclaré que sa structure n’avait jamais été impliquée dans les enquêtes relatives à l’avion de la coke. Un peu plus tard, son adjoint, Issa Saley Maïga lui aussi confirmait que leur structure (seule habilitée à mener de telles enquêtes) n’avait pas été autorisée par le Ministre de l’Equipement et des Transports Hamed Diane Séméga.
En décembre 2010 le représentant de l’Office des Nations Unies contre la drogue et le crime (ONUDC) fustigeait l’attitude des autorités maliennes en déclarant que «le Gouvernement malien n’avait pas partagé ses information avec les Nations Unies et les Etats Unis».
La brigade des stupéfiants de la police nationale du Mali a également été complètement écartée de toutes les enquêtes, alors qu’elle est la seule structure policière ayant une base de données à jour sur les réseaux africains du trafic de drogue.
Au sujet de cette rocambolesque affaire, la Maison Blanche continue de ruminer sa colère contre le président Amadou Toumani Touré qui aurait privilégié les services secrets français au détriment de la CIA qui, pourtant, tenait à investiguer sur cet avion qui s’est bien baladé sur le continent américain avant de se perdre dans le désert de notre pays. Fébrilement la DGSE française a verrouillé tous les accès, et aux médias maliens et aux structures régulières de contrôle et d’enquête en la matière.
Pourquoi la France tient tant à cette affaire ?
Quelques heures seulement après le spectacle hilarant, le correspondant de l’AFP au Mali a été le premier sur la carcasse fumante du Cargo, sous la protection et la «manivelle» des services secrets français. Le compte rendu est sans pareil en matière de reportage. De l’avion, il fait une description d’expert. Il retrace les événements qui ont précédé l’incendie dans les détails que même certains acteurs ignoraient. Mais curieusement, il s’est retrouvé selon les enquêtes que l’épave avait été bien «nettoyé» au point que l’avion n’avait plus de «personnalité». Le cargo a tété débarrassé de toute immatriculation. Comme élément, il restait de l’épave son gabarit de Boeing 727, triréacteur. Qui a donc défiguré notre appareil ? Après plus de deux ans d’enquêtes, les services secrets maliens n’ont pas encore révélé les identités de ces techniciens spéciaux. Au bout de 16 mois de minutieuses fouilles et farfouilles, les services de sécurité du Mali ont réussi à démanteler la branche malienne de l’affaire. Eric Vernay, pilote et expert de beaucoup d’autres choses de nationalité Française, Ben Hako propriétaire d’une drôle d’agence de voyage «Go-Voyage», ont été arrêtés. Un certain Awaynat, entrepreneur chargé de construire la piste d’atterrissage, a lui aussi été cueilli par les services maliens. Du coup la France panique. Le Qais D’Orsay annonce publiquement que Eric Vernay est sous couverture diplomatique de la France. L’affaire prend donc une tournure périlleuse pour les enquêteurs maliens qui venaient de marcher sur les «domaines réservés» de la DGSE qui avait certainement pour mission de protéger Vernay. Pourquoi protéger Vernay ? Nos sources révèlent qu’en réalité Eric Vernay était un agent de la DGSE française. On comprend donc aisément les raisons pour lesquelles, la France a utilisé les grands moyens pour fermer les accès au dossier aux services américains qui auraient été gênants. Malheureusement, elle ne pouvait rien contre les agents maliens dont la perspicacité et la vigilance ont été saluées par leurs collaborateurs français.
Actuellement, toutes les personnes impliquées dans cette affaire sont identifiées et localisées. Pourquoi donc du côté de la justice, aucune avancée significative n’est jusqu’à présent pas été réalisée ?
Pourtant, selon nos sources, plusieurs hauts responsables du Mali encore en fonction sont cités dans les rapports d’enquêtes tenus confidentiels.
Les services secrets français qui se sont appropriés le dossier ne révèlent plus rien sur l’affaire qui semble (si l’on n’y prend garde) mis sous éteignoir. Il y a seulement quelques semaines, Ben Hako, détenu à la maison centrale d’Arrêt de Bamako en même temps que Vernay, a vu rejeter sa demande de mise en liberté provisoire. Ses relations privilégiées avec la famille présidentielle (connues de tout le monde) continuent de peser lourdement sur le dossier et rend embarrassante toute l’affaire.
Par ailleurs, la France continue de mettre la pression pour que l’affaire puisse connaître un dénouement diligent. Pourtant, Ibrahim Gueye, PDG de la société AAA (à qui appartenait le mystérieux cargo), auteur principal de l’affaire, continue de se la couler douce sous le nez des barbouzes de Sarkozy. De quel moyen dispose t-il pour échapper à la redoutable DGSE française ? L’avenir nous en dira davantage.
Abdoulaye NIANGALY