Comme un cautère sur une jambe de bois, la lutte contre la spéculation foncière à Bamako est loin de sonner le glas des transactions irrégulières sur la terre au Mali. Surtout quand celle-ci est cautionnée par des autorités communales. En Commune VI du district de Bamako, l’autorité communale censée mener ce combat, est accusée d’entorse à la loi en faisant valoir une simple prétention de propriété d’un certain Bakara Diallo au détriment des titres fonciers en bonne et due forme d’une société immobilière bien connue de la place. Le maire Souleymane Dagnon et certains de ses conseillers sont pointés du doigt.
De quoi s’agit-il en fait ?
Nous sommes en décembre 2008. La mairie de la Commune VI qui entreprenait des travaux de morcellement (lotissement) sur une superficie considérée vacante à Missabougou a fait empiétement sur des biens fonciers de la société immobilière du Mali, propriétaire des titres fonciers n°1091, n°10921, 10923, 1760, 1761, 1762. Les trois (3) premiers TF cités relèvent du cercle de Kati. Sur la base de documents dont l’authenticité a été constatée par la justice, il ne restait à l’autorité municipale que de replier. Comme pour prouver sa bonne foi, la mairie par l’entremise du maire Souleymane Dagnon et son conseil, a signé avec la SIFMA un protocole d’accord dans lequel elle a fait son mea-culpa.
En effet, la mairie de la Commune VI, représentée par le maire Souleymane Dagnon, reconnaît qu’une erreur technique l’a conduite au morcellement d’une partie des titres fonciers appartenant à la SIFMA. L’arrêt des travaux suite à la reconnaissance de l’erreur et après que la mairie ait, par décision n° 569/M.CVI-DB du 23 novembre 2008, rapporté de la décision n°00169/M.CVI-DB du 04/10/2007, tous les îlots empiétant sur les titres fonciers de la SIFMA-SA, a motivée cette dernière à mettre fin à l’action judiciaire engagée.
Mais, comme un recul pour mieux sauter, la mairie de la Commune VI revient à la charge avec une nouvelle stratégie consistant à présenter un particulier du nom de Bakara Diallo comme propriétaire foncier et victime de pratiques irrégulière de la part de la SIFMA.
A travers cette nouvelle façon de faire, le maire Souleymane et certains de ses conseillers s’adonnent à cœur joie à leur sport favoris : le commerce de la terre, l’une des principales sources de revenus de leur mairie.
Ainsi, faisant fi de toute procédure légale, Dagnon et ses acolytes entreprennent de nouveau le morcellement sur le TF n° 1632 de la SIFMA.
Pourtant, la réglementation foncière en la matière est on ne peut plus claire. Suivant instruction du ministre de l’Administration territoriale et des Collectivités locales, il a été rappelé à tous les maires du district de ne procéder à aucun lotissement ni cession sans un respect strict des textes réglementaires tels que le titre de propriété délivré par le conservateur des domaines de l’Etat, l’autorisation de lotissement, etc.
La même entreprise du maire Dagnon tranche avec cet article de la réglementation foncière qui interdit à l’autorité communale de précéder à des cessions de parcelles de terrain sans avoir eu comme décision d’affectation prise en conseil des ministres et sans autorisation du lotissement du gouverneur du district.
En agissant de la sorte, Dagnon et ses complices (dont certains ne cachent plus leur préférence au lieu de la manifestation de la vérité) portent un énorme préjudice à la SIFMA qui avait déjà fait adopter depuis six (6) ans le plan de lotissement par le ministre de l’Habitat et de l’Urbanisme et le Gouverneur de la région de Koulikoro beaucoup de ses titres fonciers situés à Missabougou.
Par son stratagème, le maire de la Commune VI, Souleymane Dagnon défie l’autorité de l’Etat. Chose qui risque de lui coûter le même sort advenu en 2001 à son adjoint Baba Sanou, alors maire délégué à Niamakoro.
Car selon la réglementation foncière en vigueur, « la vente ou la mise en gage du bien d’autrui consentie de mauvaise foi sera punie d’un emprisonnement de un à cinq ans au plus et pourrait même l’être avec une amende de 180 000 à 1 800 000 F CFA ».
« Quiconque, par la force ou par des procédés frauduleux, aura dépossédé autrui d’une propriété immobilière, sera puni d’un emprisonnement de un mois à cinq ans et facultativement d’une amende de 20 000 à 300 000 F CFA sans préjudice, le cas échéant des peines qui seraient encourues pour attroupement armé, violences et voies de fait, menaces escroquerie et autres infractions ».
Quant au sieur Bakara Diallo dont la simple prétention est paradoxalement mieux soutenue contre les documents authentiques de la SIFMA, lui ne servirait que de bouclier par le maire Dagnon et ses comparses.
Nous y reviendrons dans nos prochaines parutions.
Abdoul Karim Maïga