Un conflit oppose aujourd’hui les habitants du village de Kouresalé à des spéculateurs fonciers et dans le lequel sont cités un ex-Chargé de Mission du ministère de la Communication et un ex-Commandant de Brigade de la Gendarmerie. Aux dires de Lassana Keïta, ressortissant dudit village, il s’agit tout simplement d’une dépossession. Nous l’avions interrogé.
Lassana Keïta: «Koursalé est un vieux village dans la commune rurale de Mandé à environs 45 km de Bamako. C’est un village qui compte aujourd’hui plus de 7.000 habitants et composé de plusieurs ethnies (les Keita, les Traoré, les Dabo, les Koné, Les Doumbia…). Mais la chefferie appartient aux Keita. Si ce n’est aujourd’hui, la terre appartenait jadis à tout le monde. Par conséquent, personne ne peut vendre à l’insu des autres notamment le chef de famille en passant par le chef du village.
Par ailleurs, chaque famille a ses parcelles. Mais, il y a des parties réservées aussi pour le village entier appelées espaces publics qui concernent les bordures du fleuve. Nous, nous sommes à 3 km du fleuve Niger. Le fleuve Niger passe par Koursalé. Mais à côté, nous avons une dizaine de rivières qui permettent de faire la pèche collective, l’extraction du sable… Ces bordures ont été consacrées comme propriétés collectives dont le gardiennage est convié au chef du village.
Sur cette base, les bordures du fleuve sont aménagées depuis les années 1980, plus précisément par un projet d’aménagement au profit de la population de Koursalé appelées « périmètres irrigués », l’un pour les femmes et l’autre pour les hommes. Et les activités ont démarré en 1983. Le périmètre aménagé dans la zone, c’est cette partie qui a été vendue en 2010 à l’insu du village de Koursalé par une famille Traoré en l’occurrence celle de Drissa Traoré.
Le nommé Drissa Traoré a vendu cette utilité publique du village de Koursalé à des hauts responsables de l’administration. Pourtant, Drissa Traoré est habitant aussi de Koursalé. Quand le village a appris la nouvelle, on a approché ces responsabilités. Ceux-ci ont dit : «Nous avons tous des villages comme vous de Koursalé. Nos parents vivent dans les villages paternels. Donc, nous ne voudrions pas venir nous opposer à un contre comme Koursalé à cause de leurs terres. Nous ne pouvons-nous permettre de créer des troubles chez les autres à cause de leurs propres patrimoines ».
Donc le nommé Drissa Traoré dit OUATRI a immédiatement revendu les mêmes parcelles à un certain Mamadou Diaouné qui, en son temps était chargé de mission au ministère de la communication en 2010. Quand les ventes ont été faites, le village n’a pas compris. Car c’était la première fois qu’une telle partie collective soit vendue.
Donc le village s’est vite levé. C’était un scandale et le village a vivement réagi Leurs biens ont été saccagés. Mais les ressortissants de Koursalé à Bamako sont intervenus pour qu’on ne porte pas atteinte à la vie de la famille de Drissa Traoré. Au moment de la vente, il y avait Amadou Keita qui était le chef du village.
Le chef du village a fait appel à Mamadou Moussa Traoré, un commandant de la gendarmerie qui est le grand-frère de Drissa Traoré (vendeur) pour qu’il convainc son frère Drissa Traoré d’annuler cette vente. Parce que c’est un bien commun. Moi-même, étant chef du village, je ne peux pas vendre cet espace public appartenant à tout le village.
Aussi, l’association pour le développement de Koursalé (ADK) a appelé le commandant au Badialan III pour qu’il parle à son frère Drissa Traoré. Ce jour-là, le commandant Mamadou Moussa Traoré nous a promis. Des lors, il n’est pas revenu. Nous avons aussi convoqué Mamadou Diaouné (acheteur) à la réunion de notre association ADK AU Badialan III. Il nous avait acceptés, mais à quelques heures de la rencontre, M. Diawouné nous a appelés pour dire qu’il ne vient si Drissa ne venait pas aussi.
Donc Drissa Traoré a procédé à la vente le 26/08/2010. Cet acte de vente a été signé devant témoins par Issif Camara (ressortissant de Bankoumana à 12 Km de Koursalé). Et M. Diaouné est venu avec un certain Wandé comme 2ème témoins. Sur cet acte de vente, le préfet Ibrahim Sylla a établi deux numéros, 3401 et 3402 sur le titre provisoire d’une superficie de plus de 7 hectares.
On avait porté plainte contre la gendarmerie. Parce que 6 hommes et une femme parmi nous étaient en prison. Les autorités ont dit tant qu’on n’a pas retiré la plainte contre la gendarmerie que les détenues ne seront pas libérées. Nous nous sommes battus, et nos camarades ont été libérés.
Quand même, ils ont dit qu’ils ont publié dans le journal ESSOR après une enquête. Mais, le village n’a jamais été au courant et aucun acte n’a été signé par le chef du village de Koursalé encore moins ses conseillers. Quand ils ont commencé à investir, on a introduit une action contre lui au tribunal pour le faire déguerpir. Ce jour-là, il nous a présenté ses titres provisoires.
Donc, nous avons attaqué ces deux titres provisoires devant le tribunal administratif. Et le tribunal administratif à son tour rendit une décision d’annulation des deux titres provisoires par le jugement N° 415 du 30 octobre 2014. En revanche, ils ont encore attaqué cette décision du tribunal administratif devant la cours Suprême. A notre grande surprise, la cours Suprême a rendu une décision contre celle du tribunal administratif avec l’arrêt n° 195 du 23 juillet 2015 pour donner raison à Mamadou Diaouné.
Mais lors de la transition de 2012, grâce à Sinko Coulibaly, nous avons pu rencontrer le préfet Sylla de Kati. Une décision de suspension de ces deux titres a été élaborée par M. Sylla. Parce que le préfet Sylla affirma qu’il a été induit dans l’erreur. Sylla nous a avait dit de revenir dans une semaine pour l’annulation des deux titres. Mais ils sont partis combiner à la préfecture en disant que l’affaire était déjà au tribunal. Le préfet Ibrahim Sylla s’’est dégagé.
Et M. Mamadou Diaouné, partout où il va, il se fait accompagner par Semé Keita qui est un grand-frère à moi comme étant le chef du village, et Fomba Traoré qui parle au nom des chasseurs de Koursalé. Pourtant, les Semé Keita et Fomba Traoré n’ont aucune légitimité à Koursalé.
Ensuite, le même Semé se dit qu’il était le chef du projet d’aménagement de cette zone. Or à l’époque, le président du projet s’appelait Doussouba Madou Keita. Et le père de Drissa Traoré avait prêté cette zone au Village.
Nous avons la copie du procès-verbal de la première réunion du comité de gestion du projet en date du 04 février 1984 en dactylographie.
Pour une autre tournure, ils permettent de dire que c’est la chasse aux Traoré. Alors qu’il y a beaucoup de familles Traoré à Koursalé qui ne sont même pas impliqués dans cette affaire. Des Traoré sont des conseillers du chef de village de Koursalé. En clair, c’est un combat contre la seule famille de Drissa Traoré. Parce que nous voulons notre patrimoine. Ceux qui sont sensés d’appliquer les textes, qu’ils analysent les dossiers et envoient une délégation sur le terrain pour constater. Un village de plus de 7000 habitants ne peut pas être manipulé par un spéculateur foncier. Des présidents d’institutions ont des parcelles aujourd’hui à Koursalé. Ceux-ci n’ont pas de problème avec la population de Koursalé».
Propos recueillis par Saba Ballo
A suivre !