Logements sociaux de Kati: 5 423 350 FCFA de destructions : Quand Monsieur le Préfet outrepasse ses prérogatives

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Malgré l’intervention des autorités judiciaires de la place, et en l’absence d’une décision de justice, le Préfet de Kati, très impliqué dans les scandales fonciers du cercle, vient d’ordonner la démolition d’une annexe contiguë à un logement social à Kati.  C’était dans la journée de lundi 4 août 2010, alors que le maître des lieux se trouvait à son lieu de travail. Youssouf Diarra, le bénéficiaire du logement en cause, déplore des pertes estimées à 5 423 350 FCFA.

Le cercle de Kati n’en finit pas de faire parler de lui, tellement les journaux ont rapporté les cas de litiges fonciers, dont celui de Kambila, où un titre foncier avait été morcelé et les parcelles vendues. Aujourd’hui, c’est la démolition d’une annexe contiguë à un logement social appartenant à Youssouf Diarra, comptable au contrôle technique de Bamako, qui défraie la chronique.

En effet, Youssouf Diarra est bénéficiaire d’un logement social à Kati depuis 2007. Le contrat a été signé, mais aucun des bénéficiaires de Kati n’a encore reçu de cahier des charges. Malgré cela, Youssouf Diarra est en avance de payemen,t à hauteur d’un million de francs CFA. Propriétaire d’une voiture, Youssouf Diarra a entrepris les travaux de construction d’un garage dans les limites de sa parcelle, contigüe au logement social. Le 7 mars, Youssouf a arrêté les travaux à la demande des agents de la préfecture et a aussitôt entrepris des démarches auprès du ministère de l’Urbanisme et de l’Habitat pour l’obtention d’un permis de construire. Il a été informé que «les logements sociaux» sont un programme politique et que, pour le moment, l’urbanisme n’est pas habilité à autoriser les gens à construire.

A sa grande surprise, Youssouf Diarra a été informé, dans la journée du lundi 4 octobre, que des agents de la préfecture, accompagnés de gardes, avaient jeté tous les occupants de sa maison dehors et qu’ils étaient en train de démolir l’annexe. Il s’est donc transporté d’urgence à Kati, pour solliciter l’intervention du Procureur de la République du Tribunal de première instance de la place. Mais celle-ci n’aura aucun effet devant la hargne du tout puissant Préfet. Diarra a ensuite sollicité les services de l’Etude de Maître Kanté. L’accès à la cour a été interdit à l’huissier de justice et aucun document relevant du tribunal de Kati ne lui sera présenté, sauf une décision de démolition signée par  Monsieur le Préfet de Kati.

Dans cette opération, qui ne visait que Youssouf Diarra, alors qu’il n’est pas le seul à avoir opéré des modifications dans son logement social, les pertes sont estimées à plus de 5 millions de francs CFA. Bizarrement, les installations sanitaires ont aussi été cassées et les appareils sanitaires purement et simplement saccagés. Youssouf Diarra a aussitôt saisi le Tribunal de première instance de Kati.

La démolition de l’annexe appartenant à Youssouf Diarra n’est qu’un cas parmi tant d’autres où le Préfet de Kati est nommément cité. En ce qui concerne les attributions de parcelles, Monsieur le Préfet foule impunément aux pieds le Décret N°040 du 2 février 2002, déterminant les formes et les conditions d’attribution des terrains du domaine privé et immobilier de l’Etat. Celui-ci stipule, en son article 7, que  l’attribution de la construction rurale est de la compétence du Délégué du gouvernement dans la commune, de 0 à 2,5 ha et dans le cercle, de 2,5ha à 5 ha. Tous les préfets respectent cette procédure, sauf celui de Kati, qui délivre des bulletins de lettres d’attribution au delà de ses prérogatives. A cause de sa boulimie à distribuer les parcelles à tour de main à ses amis, il n’hésite pas à effectuer des attributions sur des parcelles déjà attribuées par les Sous-préfets et les maires de son cercle. Déjà, des groupes de pression, composés de victimes d’attributions illégales, se concertent pour une procédure d’annulation.

Le même Préfet de Kati est impliqué dans le litige foncier qui oppose SIFMA et CEMA. Fort de ses soutiens au niveau du Secrétariat général du ministère de l’Administration Territoriale et des Collectivités Locales, il n’a pas été  emporté par le cas du morcellement d’un titre foncier à Kambila et celui de la vente de parcelles qui avait violemment dégénéré en affrontements.

Pour ce qui concerne Youssouf Diarra,  les logements sociaux constituent l’une des réussites du Programme de développement économique et social (PDES), cher au Président de la République. Dessinés, à juste titre, pour aider le plus grand nombre de Maliens, il va de soi qu’il manque certaines facilités aux logements sociaux à l’état brut. Et c’est justement pour combler certaines lacunes que les bénéficiaires y apportent certaines modifications. C’est dans cette logique que Youssouf Diarra avait entrepris la construction d’un garage, pour sécuriser sa voiture. Comme il n’est pas le seul dans cette situation, une campagne de démolition devrait donc normalement s’étendre  à tous les logements sociaux de Kati dans le même cas.  Ce seraient au moins 80% des logements de la zone qui seraient concernés. La démolition des annexes et modifications serait-elle sélective à Kati?

Le Préfet de Kati serait-il un intouchable, comme il le clame à qui veut l’entendre? En tout cas, il n’entre pas dans ses prérogatives d’ordonner une démolition, ce qui relève du seul domaine de la justice.

(Affaire à suivre) 

Pierre Fo’o Medjo

 

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