On aura tout vu et entendu quand la prévarication et le clientélisme s’en mêlent. Dans la pétaudière à scandales et malversations foncières qu’incarne désormais l’Agence de Cessions Immobilières, les sales draps s’amoncellent et s’annoncent de plus en plus engluants pour son PDG. Après l’épisode de la vente finalement avortée d’une ruelle à la Bnda, les indélicatesses de la sulfureuse gestion de Mamadou Tiéni Konaté ne sont pas près d’atteindre le fond. Par-delà les déficits accumulés d’années en années – et contre toutes les promesses mirobolantes de restructuration -, l’ancien président intérimaire de la Chambre de Commerce et d’Industrie du Mali est sur le point d’être emporté par les bruyants casseroles de retraits abusifs de parcelles aux allures de racket et leurs réattributions arbitraires aux relents clientélistes. Il est question, ici, d’un fumeux dossier dans lequel les missions d’inspection, abonnées à sa structure depuis quelques mois, n’ont pas manqué de fourrer le nez. Ils devraient sans doute y avoir subodoré du soufre pour qu’un grand coin du voile se lève sur une machine d’extorsions bien rodée où le favoritisme fait bon ménage avec l’affairisme, en fabriquant des victimes et des bienheureux. Au nombre des heureux bénéficiaires du pot-aux-roses figure, tenez-vous bien !, un étudiant répondant au nom de Papa Ousmane Samaké. S’agit-il réellement d’un étudiant ou d’un titre collé à l’intéressé pour la circonstance – c’est-à-dire pour les besoins de la supercherie ? Il y a tout lieu d’en douter, en tout cas, pour deux raisons au moins : d’abord la teneur vénale de l’opération est largement au-dessus des possibilités d’un apprenant ordinaire; ensuite parce que la même personne se présente sous un attribut différent dans d’autres opérations tout aussi opaques.
Qu’il s’agisse de l’étudiant ou de l’opérateur économique, en définitive, l’un ne se distingue de l’autre que par la nature et la taille des enviables privilèges dont il est question.
Nos confidences révèlent, en effet, qu’il s’agit bel et bien de la même personne et que c’est bien avec son titre d’étudiant que l’intéressé s’est adjugé quatre (4) terrains dans le quartier huppé d’Hamdallaye ACI 2000. Extraits du titre-mère 1339, on y dénombre la parcelle numéro 6/3041 d’une superficie de 500 m2 acquise pour la somme de 64 290 000 francs CFA. Le très extraordinaire étudiant est également propriétaire de l’immatriculation 1/3042 d’une superficie de 555 m2 achetée rubis sur ongle à 73 260 000, tandis que les parcelles numéros 3/3046 et 4/3048 – d’une superficie de 550 m2 chacune – lui sont respectivement revenues pour 71 960 000 et 71 700 000 francs CFA.
Un espace cumulé de plus de 2 100 m2 est ainsi attribuée à une seule et même personne pour une valeur totale de 286 210 000 francs CFA, au moyen d’une opération très singulière et intrigante par la synchronisation des actes d’attribution. En clair, les quatre (4) titres ont tous été établis et emprunté la même destination à la même date du 5 novembre 2018.
Une autre singularité a trait à la provenance desdites parcelles. Selon nos sources, en effet, les patrimoines fonciers sont tous issus d’une expropriation en règle effectuée de plein sang-froid, sans ménagement et sans aucune forme de procès à des propriétaires initiaux qui ne sont pourtant pas des quidams dans la République. Il s’agit de célébrités dont un président d’institution, un autre membre influent de la famille présidentielle, un ancien administrateur de société ou encore un responsable de démembrement de l’Etat. Ça n’est pas tout. Il nous revient de source concordante qu’aucune de ces illustres victimes n’a reçu une mise en demeure ni n’a été prévenue par avance d’une quelconque intention ou motif de retrait le concernant, alors même que l’ACI aurait encaissé les montants dus dans le cadre de la cession initiale. En outre, ces expropriations drastiques du PDG, confie-t-on, ne sauraient tirer argument d’une supposée irrégularité de la procédure d’attribution aux acquéreurs spoliés. Et pour cause, aucun des titres réattribués à l’heureux gagnant de la «Loterie Konaté» n’a obéi à la règle d’une vente aux enchères tel qu’exigé par les textes qui réglementent les cessions de terrain par l’ACI. Le nommé Papa Ousmane Samaké a visiblement raflé la mise en profitant des seuls pouvoirs discrétionnaires du PDG, à la face duquel pourraient rebondir toutes les opérations de même acabit d’autant que la tutelle, selon nos mêmes confidences, lui aurait enjoint d’annuler toutes les ventes effectuées en violation des procédures en vigueur. Au nombre desquelles ventes figure une cession et non des moindres, en l’occurrence le célèbre domaine administratif abritant précédemment «Les Recettes Générales du District». Installée sur un espace de 1500 m2 dont le titre remonte à l’époque coloniale (1910), ce joyau aussi est revenu à la même personne de Papa Ousmane Samaké pour la somme de 1,237 milliards de nos francs, mais avec le manteau mieux étouffé d’opérateur économique. Le paradoxe, par ailleurs, tient au fait que son statut d’opérateur précède curieusement celui d’étudiant, si l’on doit en juger par les dates des deux opérations. La cession des «Recettes Générales du District» acquise à titre d’opérateur est en effet antérieure de cinq (5) mois à la réattribution des parcelles retirées d’Hamdallaye ACI 2000 : l’une date de juin 2018 et la seconde opération de novembre de la même année. De quoi inciter certains facétieux à faire remarquer que l’intéressé a été opérateur économique avant d’être admis à l’université.
Quoi qu’il en soit, les nouvelles révélations ne sont pas de nature à baisser la vive tension qui rythme au quotidien les rapports entre le directoire de l’ACI et l’autorité de tutelle très regardante ces derniers temps sur les éventuelles conséquences de la gestion du PDG de l’ACI sur le devenir du fleuron qu’il dirige. En lieu et place du dépôt de bilan annoncé en début d’année, ledit département s’est accommodée pour l’heure d’un plan de redressement, un sursis toutefois trop contraignants pour inciter M KONATÉ à l’abandon de ses responsabilités actuelles au profit d’une carrière diplomatique. Il nous revient, de source bien introduite, que son nom revient fréquemment parmi la prochaine vague de nominations aux postes d’ambassadeur comme si cette fonction était un purgatoire des indélicatesses dignes de poursuite judiciaire.
A KEÏTA