Le weekend passé, des affrontements entre des habitants de Koussouma et Kognan-Bambara, deux villages dans le cercle de Djenné, ont fait plus d’une dizaine de morts et une quarantaine de blessé. Le gouvernement du Mali a envoyé en catastrophe une mission pour faire la lumière sur l’incident très grave. Tout indique que cet affrontement meurtrier entre civils n’est pas un cas isolé dans le delta intérieur du Niger.
La tension entre les deux villages est montée doucement jusqu’à l’explosion le weekend dernier, le samedi 25 juin 2016. Une situation qui aurait pu être évitée si le sous-préfet de Djenné qui avait entamé une médiation entre les belligérants était accompagné de suffisamment de forces dissuasives de sécurité.
En clair, les représentants de l’Etat et les responsables locaux étaient parmi ceux qui savaient que la situation pouvait dégénérer entre les deux villages. Comme notait notre confrère Les Echos, «chaque fois que le problème se réveille, le juge du jour le gère en sa manière », mais une des parties reste sur sa faim comme ce fut le cas en 2014 lorsqu’un juge a ordonné à la fin l’interdiction aux deux villages d’exploiter l’espace.
Et pourtant, les habitants des deux villages n’osaient plus régler leurs différends par la violence aveugle après un affrontement sanglant remontant à 1988. Il faut craindre que ce ne soit un des signes de l’effondrement de l’Etat contre lequel mettent en garde des activistes comme le jeune Yacouba Diakité, Coordinateur national de Le Réveil citoyen du Mali.
Si chacun décidait de résoudre ses problèmes, affirmait-il, le Mali risque de ne jamais se relever étant donné qu’il y a plein de difficultés partout. Mais dans le delta intérieur du Niger, le risque est plus élevé avec des conflits fonciers qui prennent souvent des connotations ethniques ou communautaires depuis que l’instabilité s’est renforcée à cause de l’abandon des populations par l’Etat qui s’est retiré des lieux.
En mai dernier, le caractère ethnique de l’affrontement meurtrier entre Peul et Bambara à Dioura, dans la zone de Ténénkou, a occulté les dessous économiques de ce drame. L’eau et la terre sont en effet à l’origine de nombreux antagonismes entre les différentes communautés vivant dans le delta central du Niger. Un problème si ancré historiquement même si le mécanisme traditionnel mis en place sous la Dina, l’empire peul du Macina, ne suffit plus.
L’administration qui est censé résoudre actuellement les problèmes est malheureusement absente de la zone. Résultat, les populations qui ont pris goût à la violence choisissent la mort au lieu de recourir à l’arbitrage des représentants de l’Etat.
Soumaila T. Diarra