L’exil de Djata :
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Soundjata était appelé par des noms multiples : Maghan Konaté (son vrai nom) Diata, Sogolon Diata devenu Soundjata, Simbo, Naré Maghan Mandé nka, Lawali Simbo, Mari Diata, Kirikiya Maghan Konaté, l’enfant du buffle, Sogo-Sogo Simbo (chasseur qui ne revient jamais bredouille, qui tue gibier sur gibier, sogo wo sogo). …….
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Contrairement à la plupart des mansa, Simbo n’a pas abandonné sa patrie pour échapper à la domination des Sosso et à la guerre de Soumangourou qui ravageait le Mandé. C’est son père Farakoro Maghan Kégnin lui-même qui lui avait conseillé de quitter le pays : « Va lion d’ici et ne revient pas avant sept ans, sinon les hommes parviendront à ployer le destin et l’empêcher de s’accomplir. Or Dieu t’a fait venir au monde pour être roi, et le plus puissant de la terre ». Sa mère, de son côté, l’incitait toujours à partir : Sigui tè na ko min gna, tama lé no ban ». « Si la cohabitation ne peut empêcher les tensions et mésententes entre frères consanguins (fadengna dialan), seul l’exil (nianimabori) peut les éteindre ».
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Convaincu qu’un grand destin attendait son fils, Maghan Kon Fata l’avait instruit, avant sa mort, dans plusieurs domaines de la connaissance occulte. Soundjata devint vite un homme très versé dans la sorcellerie (soubaya). Il ne lui restait plus qu’à « travailler » afin que son destin se réalisât. Il était de ce fait condamné à s’éloigner de sa patrie, à partir pour se soustraire aux sortilèges. Diata devait s’exiler pour devenir « ce pour quoi Dieu l’a créé » Ainsi, c’est en entonnant l’hymne à l’arc que la petite griotte Toumou (djéli moussonin Toumou) annonça au Mandé entier le départ de Soundjata pour l’exil : « Bara kala ta, Sogo-Sogo Simbo ! Bara kalata, Naré Maghan Mandé nka ! Bara kala ta, dougoulamini sadian ! Bara kala ta, ka b’i yala ! » (Il a pris son arc, Sogo-Sogo Simbo ! Naré Maghan Mandé nka a pris son arc ! Comme Toutou dankalan, le grand serpent enlaçant l’univers, il va faire le tour du monde !)
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Oui , Maghan Konaté a pris le chemin menant hors du Mandé. Les basses rivalités et les maléfices avaient fini de détruire les liens de consanguinité entre lui et son aîné Dankaran Toumani, quand leur père Maghan Kon Fata s’éteignit. A la recherche d’un asile, Soundjata et les siens errèrent longtemps. Dans son pays même, l’hospitalité leur fut toujours refusée à la cour de nombreux mansa. A ces rois, le fils de Sassouma Bérété avait envoyé de l’or. Il leur était demandé en retour d’assassiner son frère Sogolon Diata. Mais chaque fois, Lawali Simbo échappait miraculeusement aux pièges qu’on lui tendait. Car ce que les devins avaient prédit devait se réaliser et rien ne pouvait l’entraver. Et d’ailleurs, comme signe annonciateur de cette destinée, c’est l’ennemi juré des Maninka qui intervint en faveur de Soundjata.
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Aux envoyés de Dankaran Toumani, Sosso Bali Soumaoro fit cette mise en garde : « Celui qui tue son chien parce qu’il est méchant s’expose a être mordu par la chèvre d’autrui. Gens du Mandé, la parenté est sacrée ». (ni yi ka woulou diougou faga, dô ka ba b’i kin). Pour donner le temps aux prédictions de s’accomplir Diata prit son arc et son carquois et s’en alla, très loin, là-bas. Il longea les rives verdoyantes du Djoliba, escalada les montagnes. Simbo traversa le pays de la claire savane, marcha dans des plaines. Il parcourut de vastes régions couvertes par les sables et après un long et pénible voyage, atteignit Goumbou, première capitale du Ouagadou.
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Les chefs Doucouré de cette localité l’accueillirent avec amabilité. Ses hôtes furent cependant, peu de temps après, obligés de l’envoyer dans la province de Méma, à cause, de la rigueur du climat. Mari Diata fut reçu par leur cousin Méma Nwana Farin Tounkara (nwana = brave, héros ; en Soninké farin ou harin = envoyé, gouverneur ; tounkara = qui appartient à la famille du Tounka, la famille impériale). Ce farin résidait à Dogohiri (Dogofiri, dans le cercle actuel de Niono). Sogo-Sogo Simbo profita de son long séjour chez Farin Tounkara pour acquérir d’énormes connaissances auprès des grands maîtres chasseurs du terroir.
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Chasser était devenu son occupation favorite et il se montra très doué dans ce domaine. Lorsqu’il acquit le titre de Simbo (maître chasseur), il enseigna à de nombreux jeunes gens les secrets de sa confrérie. Le fils de Sogolon s’exerça ensuite au métier des armes et devint un grand guerrier. Il apprit et arriva à parler couramment cinq langues de la région : bamanankan, bozo, soninké, foulfouldé et hassania, la langue des Sourakha (Maures). Naré Maghan Mandé nka s’attira la sympathie et l’amitié sincère de plusieurs notabilités du Ouagadou et des personnes de modeste condition, des gens du petit peuple. C’est en compagnie de ses confrères chasseurs, de ses élèves et de nombreux partisans qu’ils prit le chemin de sa patrie. Il avait une seule ambition : la libérer des hordes sanguinaires du roi autochtone Soumaoro. Sa suite comprenait des personnalités de haut rang, Farin Diatigui et Farin Birama. Originaires de Méma, ils s’installèrent plus tard à Kita en cohabitation avec les Camara, enfants de Samé Toloba. Sa troupe, nombreuse, regroupait surtout des chasseurs et guerriers soninké, kakolo, sourahka, foula.
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Le roi de Sosso s’était malheureusement fait partout des ennemis jurés. Il avait endeuillé non seulement le pays de Soundjata, mais, avait causé d’importants dommages aux habitants de plusieurs autres régions. « Il n’y avait pas une seule personne, nous explique Wâ Kamissoko, griot initié de Kirina, dont Soumaoro n’ait pas cassé soit le village, soit tué un parent, ou déchiré le boubou ou le pantalon ». C’est bien parce qu’il détruisit l’économie des grandes métropoles du Ouagadou, que les riches marchands et notables de ce pays dotèrent les troupes de Soundjata en chevaux, armements et nourriture. Tout au long du chemin conduisant à la patrie des Maninka, de nombreux volontaires venus des peuples opprimés, se joignirent aux combattants de la liberté. Désormais, l’affrontement avec les farouches guerriers du kaniaga était inévitable.
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Le retour de Maghan Konaté :
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Le retour de Soundjata fut un événement d’une grande ampleur. Pendant son absence, les choses allaient très mal. La vie n’était pas rose pour les habitants du Mandé qui ne rigolaient pas tous les jours. Le fils de Dâbi Kémokhô faisait régner partout la terreur (Dâbi est le village où était installé le père de Soumaoro, Diara Kanté ; Kémokhô = vieux). N’ayant jamais pu oublier le traitement fait à son père, retenu longtemps en captivité par les Cissé de Boron, Sosso Simbo était devenu le plus résolu des esclavagistes. Il n’avait pas non plus pardonné aux gens du Mandé leur refus de l’aider à éteindre l’esclavage.
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Poussé par un désir ardent de vengeance, Soumangourou s’était juré de « leur faire boire du fer en fusion » (nègue sinkérin kènè). Aussi, n’est-il pas besoin de le souligner, les habitants du Mandé vécurent un véritable drame. Et, comme nous l’enseigne le sage, « le poisson pris dans la nasse commence d’abord par réfléchir ». Soumis à un régime de terreur et d’oppression, ils se souvinrent soudain du fils du buffle, de l’enfant prodige, celui contre qui les sortilèges n’ont rien pu. Une délégation fut envoyée à sa recherche. Et lorsque fut annoncé le retour de Maghan Konaté, sa patrie commença à vibrer d’émotion parce que l’espoir renaissait.
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Les guerriers de Simbo étaient répartis par clans, ethnies ou régions. Les chasseurs eux, formaient un groupe homogène, celui des enfants de Sané et Kontoron. Les libérateurs du Mandé s’arrêtèrent d’abord à Kouloukoro. Là, ils sacrifièrent plusieurs animaux au Nianan- Koulou, demeure des génies tutélaires. Les grands prêtres firent aussi des sacrifices à Bâ farô, déesse de l’eau. Pendant ce temps, Soumaoro guerroyait vers l’Est à Dioro, Charô et Sanamandougou. Soundjata et ses hommes campèrent ensuite sur le plateau situé au Sud de Bankôni. Les nombreux génies et divinités reçurent là aussi des offrandes et sacrifices. Des veillées d’armes furent organisées pendant trois nuits.
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Au cours de ces fêtes nocturnes, des hymnes à la bravoure des combattants. Les plus braves (nwana) faisaient des déclarations les plus audacieuses sur les actions d’éclat qu’ils comptaient accomplir. En tout cas, tous étaient déterminés à vaincre ou périr. Le lendemain, une armée immense s’enfonça dans le pays profond. Entre temps, le roi de Sosso atteignit le village de Niani, près de Niamina. De là, il regagna rapidement Niamankô où il avait installé un grand camp d’initiation de jeunes forgerons et métallurgistes. Sur place, Soumangourou constitua une armée de quarante mille novices à qui il intima l’ordre formel de l’y attendre. Soundjata et son armée s’engagèrent enfin sur le chemin du Wôyôwayankô, porte d’entrée du Mandé. Ils entonnaient une chanson à la gloire de Sogo-Sogo Simbo. En outre, il faisait allusion au soleil nouveau qui se levait sur le monde.
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Diata et ses compagnons lançaient en même temps un défi à leur redoutable ennemi Sosso Simbo. Enfin, ce chant était un avertissement pour les chefs et notabilités du Mandé. Ceux-ci avaient par « leurs méchantes rivalités » contraint Djata à l’exil. « Ayé nfilé n’ senkan lé ma toubalakônô ! Diamatigui nakan tè dogo, toubalakônô ! ». (Au Mandé aucune société secrète n’était aussi puissante que le kômô. Son masque s’appelait toubalakônô. A l’occasion de sa sortie, il rassemblait tous les hommes du Mandé, chaque année). Voici traduites les paroles de cette chanson : « Jugez-moi au bruit de mes pas. Moi, je suis toubalakônô, l’oiseau, du grand bosquet. Ne considérez pas ma jeunesse ! Regardez plutôt l’immensité de mon armée. On ne se trompe jamais sur la puissance de celui qui a tant d’hommes avec lui ». Le message était compris par tous les hommes de la savane. Le destin du Mandé et de Soundjata allait se jouer et s’accomplir.
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Les premiers affrontements :
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Les guerriers et chasseurs de toutes les régions persécutées par la domination du Kaniaga rallièrent en masse l’armée de la coalition. Celle-ci était impressionnante par sa puissance et la détermination de ses combattants. Mais, tout n’était pas joué car Sosso Simbo disposait d’atouts incomparables : le nombre considérable de ses chasseurs et guerriers bien rompus au maniement des flèches lances et pan- mourou (sabres), la qualité bien supérieure de l’armement fabriqué par des forgerons spécialisés dans ce domaine et surtout son imposante cavalerie, sa force principale. Les premières engagements eurent lieu à Kounkamba, Bantamba , Nianiniani et Kambassiga. Nos cousins, les Maninka évitent adroitement de faire allusion à ces affrontements au cours desquels les troupes réunies autour de Simbo subirent des pertes incalculables.
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Endeuillé et désorienté, Sogo Sogo Simbo se réfugia à Kalifaya avec les débris de son armée. Dans ce village, il laissa reposer ses hommes et fit soigner ses blessés. Ensuite, il rassembla à Dakadiala, sa ville natale, tout ce que le Mandé comptait d’hommes valides. Il reconstitua ses forces et discuta avec ses principaux généraux des leçons à tirer des quatre défaites successives. Il fallait à tout prix changer de tactique et mettre sur pied une nouvelle stratégie de guerre. Le rassemblement de tous les chasseurs et guerriers dans la plaine de Kirina annonçait déjà le début d’une bataille mémorable.
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La guerre de Kirina (Kirina Kèlè) :
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Malgré la débâcle infligée à ses troupes, tous les devins et sorciers avaient prédit la victoire finale du fils de Sogolon sur les envahisseurs. De leur côté, les cinq familles de marabouts (Mandé moriw) bénirent Soundjata et son pays tout entier. Diata, bien qu’appartenant à la confrérie des chasseurs tolérera les musulmans. Plus tard, il leur permettra de pratiquer librement l’islam en les protégeant. Quand au roi de Sosso, adepte du nianan, il persécutait les musulmans et tous ceux qui se convertissaient à cette nouvelle religion. Il avait des guerriers bien entraînés et merveilleusement équipés, une armée redoutable.
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Mais, entre temps, un événement important allait se produire et faire basculer les chances en faveur des conquérants de la liberté. Le terrible Djamjan Koli (Fakoli Doumbouya) avait déserté l’armée de Sosso Bali Soumaoro. Son oncle lui avait retiré de force sa femme Kèlèya Kanko. L’épouse de Fakoli était une cuisinière exceptionnelle. D’après la légende, « cette femme était une grande sorcière. Elle parvenait à elle seule à préparer pour les troupes de Soumangourou des repas que ne pouvaient réussir les trois cents épouses du roi de Sosso ». Pilier des forces armées du Kaniaga, Fakoli Kourouma vint consolider les troupes de la coalition. Sous le commandement de Dan Massa Oulani, alias Touran Maghan Tarawélé, les chasseurs du Mandé suivis de leurs chiens dressés pour la bataille se cachaient dans les galeries forestières en bordure du Djoliba. Ils lâchaient sur les guerriers ennemis leurs bêtes. Elles mordaient les chevaux et désarçonnaient ainsi les cavaliers.
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Les enfants de Sané et Kontoron les criblaient ensuite de flèches empoisonnées. Enfin, ils les achevaient à l’aide de leurs gourdins et lances. Il y avait là mille cinq cents archers bobo qui firent preuve d’une adresse et d’un courage remarquables. La cavalerie du Ouagadou, confiée personnellement à Kirikiyan Maghan Konaté avait pour mission essentielle d’exterminer jusqu’au dernier les envahisseurs venus du nord : pas de quartier, avait ordonné Soundjata. Blottis dans les arbres, les tireurs d’élite abattaient le plus grand nombre de généraux Sosso, reconnaissables à leurs grandes coiffures. Les combats débutèrent le matin, à l’heure où les animaux sortent des parcs pour les pâturages. Ils s’achevèrent au moment où le soleil décline vers l’ouest. On profita d’une trêve pour soigner les blessés et enterrer les morts. Harassés et couverts de larges blessures, les guerriers de Sosso Simbo tentaient de s’échapper par la route des montagnes.
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De son côté, leur roi cherchait à joindre ses alliés forgerons du Bambougou (Bambouck) et Peuls du Fouladougou, à partir de Naréna. Lui donner la chasse devenait alors une obligation. Il fallait donc s’apprêter pour des combats de nuit (cela ne s’était jamais produit auparavant dans les régions soudanaises). Entre Sibi et Guéna, Touran Maghan (sa mère s’appelait Touran) et ses hommes exterminèrent jusqu’au dernier les guerriers ennemis qu’ils croisèrent sur leur chemin. Les forces de Soumaoro furent harcelées et dispersées, presque anéanties. Malgré cela, le roi de Sosso avait la ferme intention de rebâtir son armée avec des renforts vers la cité antique de Kirikôrôni. Les guerriers de Diata cherchaient à l’en empêcher. Cela ne fut pas facile car d’autres épreuves éprouvantes attendaient les belligérants.
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La bataille de Naréna :
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Au cours de cette rencontre deux hommes s’illustrèrent par leur bravoure. Ils s’agit de Soundjata et Nan Koman Djan. De nos jours encore, les griots chantent leurs louanges. Voici les, par rôles, de la chanson dédiée à ces deux personnages. La première partie de l’air de ce chant est l’indicatif du journal parlé de Radio Mali. Elle correspond aussi au refrain de l’hymne national de notre pays. « Soundjata ma yogoro, kayira ! Soundjata ma yogoro, kayira ! Tama fila ta, Djata, Djata yé kèlè kè Naréna ! Djata yé kèlè kè, Djata yé Naréna kèlè kè, a ma siran ! Nan Koman Djan, Nan Koman Djan, Nan Koman Djan, kèlè yi fè ! kado mina lé, ka dofaga lé, Nan Koman lé, Nan Koman Djan! ». (Soundjata n’a pas eu peur !
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Quel bonheur ! Djata, le combattant aux deux lances guerroyait à Naréna ! Les chasseurs, comme des fruits mûrs tombèrent sur le champ de bataille. Mais, Djata le guerrier aux deux lances ne fut jamais saisi d’épouvante. Nan Koman Djan, tu es le héros de la guerre ! Tu as capturé la moitié de tes ennemis. Et l’autre moitié, tu l’as tuée). Dès l’aube, Touran Maghan engagea les hostilités en s’appuyant sur son puissant bras de guerre (Kélé bolo). Sa troupe comprenait aussi les Koné – Diarra, ses cousins à plaisanterie, chasseurs du Do Sankarana, pays d’origine de Sogolon. Ils étaient venus prêter mains fortes à leur neveu Soundjata.
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Parmi les braves, il y avait Fakoli Doumbouya, devenu Mandé Fakoli parce que son père était Maninka et à cause de ses exploits guerriers accomplis en faveur du pays de Soundjata. Djamdjan Koli usa de toute sa stratégie de guerre pour empêcher ses ex-compatriotes de se replier vers Kouloukoro. Il assurait ainsi les arrières de l’armée de Maghan Konaté. Vers le milieu du jour, Soumangourou et ses hommes étaient défaits ! « On enfila de nombreux prisonniers comme des perles et on les lia les uns aux autres comme des fagots de bois mort ». Le Mandé venait de recouvrer sa souveraineté perdue. Sosso Simbo fut pourchassé par Diata et Fakoli jusqu’au village de Gouni où il traversa le fleuve Niger.
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Soumaoro, premier roi et roi autochtone du Mande disparut dans les grottes de Kouloukoro (Nianan Koulou) dans des conditions encore mystérieuses. Son royaume fut anéanti par une révolte des peuples opprimés, soulevés contre son impitoyable domination. Soundjata prit Sosso et y installa une garnison militaire. C’était pour surveiller la ville et empêcher ainsi toute tentative de remise en cause de son autorité naissante. Nous étions en l’an mille deux cent trente cinq et au treizième siècle.
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L’œuvre de Kirikiya Maghan Konaté :
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En écoutant les récits de nos griots, on a l’impression que le Mandé n’a connu qu’un seul souverain : Soundjata. Et sans les historiens arabes, le resplendissant empereur Moussa, fils de Kankou serait un parfait inconnu. La tradition ne parle de lui que de façon superficielle. Elle met par contre Diata au centre de tout. Depuis cette éclatante victoire obtenue sur les troupes du fils de Dâbi Kémokho à Kirina, les griots et les chantiers des chasseurs ont adapté aux besoins de la circonstance, de nombreuses chansons populaires du terroir. (Ces chants appartenaient pour la plupart à la confrérie des chasseurs, adeptes de Sané et Kontoron). Ils les ont dédiés à la gloire de Sogo-Sogo Simbo, l’enfant du buffle. Ces chansons annonçaient aussi au monde entier la naissance du Mandé nouveau. « Soundjata fut grand » disent les détenteurs de notre tradition orale « et le plus grand de la terre après Djouloukara Naïni » appelé Alexandre le Grand par ceux qui ont fréquenté l’école des Blancs.
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Chef exceptionnel, son œuvre fut grandiose. Il travailla sans relâche pour la grandeur et la prospérité du Mali. Selon Wâ Kamissoko, « Maghan Konaté n’a pas creusé de trappe devant ses prédécesseurs, c’est à dire qu’il ne les a pas laissés dans une situation catastrophique en leur léguant un héritage encombrant. Ce qu’il a pu réaliser pour son pays fut grand : abolir l’esclavage , racheter moyennant or, ses compatriotes troqués contre quelques barres de sel gemme ou des chevaux, restituer à chacun sa liberté et sa dignité, rendre crédible sa patrie ». Si nous chantons la gloire de Soundjata, huit siècles après sa mort, c’est parce qu’il s’est immortalisé par son amour ardent de la patrie. « Saya bè kolo doun, a tè tôgô doun ». (Le corps tout entier se décompose après la mort. Mai le bien ou le mal que nous faisons, c’est à dire notre œuvre, demeure éternellement dans la mémoire de nos semblables).
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Soundjata s’est battu pour libérer sa patrie des exactions de son plus redoutable ennemi Sosso Simbo ani Simbo Salaba. Il n’était pas donné à tout le monde de réussir contre Soumaoro une pareille entreprise. Avant la bataille de Naréna, celle de Kirina eut lieu, la confrontation décisive. Et lorsque la paix mandingue fut acquise au prix d’énormes sacrifices, tout le pays se mit debout pour saluer l’événement. Le règne de Soundjata amena le bonheur. Le fils de Sogolon fut reconnu comme porteur de la baraka, comme le mansa de la chance (tèrè-gnouman) l’or pur et brillant, de couleur rouge (sanougna woulen) fut découvert au lieu-dit kôbada.
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Plus au Sud, on tomba sur un immense filon. Ce fut l’or du Bouré. Les Mandé nka crurent à leur étoile. Le peuple en liesse chanta : « Djon gné sanouyé soula djou la yan ? yékétékoun ! Massa a djamana diyara ! Bouré sanou yé soula djou la yan ? yékétékoun ! Massa djamana diyara ! » (A-t-on jamais vu des perles d’or à la taille des singes ? quelle coquetterie ! Le pays du mansa est devenu prospère ! voir l’or du Bouré à la taille des singes ? Le règne de Soundjata est devenu agréable !). Sogolon Djata lutta sa vie durant pour un idéal de progrès. Il combattit l’esclavage et l’oppression. Simbo réprima sévèrement les maures et le Sarakholés qui pratiquaient cette activité au Ouagadou. Fakoli s’acquitta de cette mission à la satisfaction générale. Ses guerriers saisissaient les esclavagistes, enduisaient leurs corps de beurre de Karité avant d‘y mettre le feu.
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Sogolon éduqua son fils dans le strict respect de la dignité humaine. Très sensible aux malheurs des autres, elle lui avait de tout temps recommandé fermement « de ne jamais mettre le mors dans la bouche d’un de ses semblables pour en faire un vil esclave ». La mère de Djata disait toujours ceci pour condamner ce système avilissant : « il n’existe rien de plus atroce pour un être humain que la perte de la liberté qui en fait un vil esclave. L’homme privé de liberté perd sa dignité et partant, sa raison d’être ». Sogo Sogo Simbo fut véritablement un unificateur, un réformateur, un en mot, un bâtisseur. A cet homme doit être rendu un vibrant hommage car il se préoccupa des choses de la terre (agriculture et élevage), tout en stimulant le commerce. Il mit fin aux injustices sociales en permettant à chacun d’exercer librement la profession de son choix et de bénéficier du fruit de son travail.
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L’esprit de tolérance religieuse dont ce souverain fit preuve pendant son règne donna plus tard à notre pays la chance d’avoir de fervents musulmans et même des saints dont la renommée dépassa largement nos frontières. Nous citerons comme exemple le premier saint marabout de l’Ouest africain Salim CISSE dit Souaré. Salim Souaré résidait à Diagaba (cercle de Bafoulabé). Soundjata était en avance sur son époque. Il a devancé tous ses contemporains par ses qualités humaines. Touran Maghan ne s’était pas trompé dans son jugement quand, généreusement, il lui céda le pouvoir suprême du Mandé (C’est sur Dan Massa Oulani dit Touran Maghan que les chefs réunis avaient porté leur choix). Fin politique, Soundjata suscita adroitement l’adhésion volontaire de tous les peuples de la savane à son projet de constitution de l’empire.
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Et c’est pour laver un affront (Diata n’aimait pas la guerre) que fut décidée la campagne contre Bassi Couloubaly dit Fall connu sous le nom de Djolofing Mansa. Ce roi était réputé pour ses talents de magicien. L’honneur de notre pays fut sauvé quand ses amulettes furent rapportées comme trophées au Mandé. Doit on comparer cet idéal de Diata (recherche de la paix et du bonheur pour son peuple) aux idéaux des autres souverains, notamment le mansa pèlerin Kankou Moussa et le navigateur Aboubacar ? Comment faut-il juger le resplendissant empereur Moussa ? Doit-on taire son gaspillage à la Mecque de l’immense trésor laissé à la postérité par Soundjata ? On magnifie la période de Kankou Moussa à cause de son fastueux pèlerinage aux lieux saints de l’Islam.
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On parle avec fierté de l’explorateur Aboubacari, ce roi qui voulait réaliser un rêve : atteindre les limites de la mer. Tout cela est tout à fait louable. Ce pèlerinage légendaire aussi bien que le voyage maritime du mansa explorateur ont fait connaître notre pays à travers le monde en lui donnant un prestige énorme. Pour autant, peut-on taire l’immense œuvre accomplie par Kirikiya Maghan Konaté ? A cet empereur, nous devons la cohésion sociale et la stabilité de notre pays. Le Mali lui doit l’esprit de tolérance qui caractérise ses habitants. Ici, il faudrait impérativement mettre l’accent sur le cousinage à plaisanteries. Il existait déjà à l’époque des chasseurs kakolo du Ouagadou, bien avant la fondation de l’empire des Kaya Maghan et celui du Mali.
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Ce sanankoungna était d’abord établi entre les Konaté et les Kouaté (Kouyaté) au moment où les Soninké n’étaient pas encore arrivés au Mali et dans leurs habitats actuels. Il va sans dire que le Mandé n’était pas encore né. A la création de son empire, Soundjata restructura cette alliance et l’institutionnalisa. Des pactes furent scellés entre ethnies, clans, tribus, villages et couches socio – professionnelles : (exemples : Soninké et Maninka) (Konaté, Couloubali, Keita) (Keita et les famille de Marabouts : Cissé, Touré, Berété), (Keita et Fofana depuis les batailles de Kounkoumba, Bantamba ; Nianiniani et Kambassiga), (Peuls et Forgerons) (Bamanan Cultivateurs et Foula éleveurs), (Bozos et Dogons), (Kakolo, soninké et Diawambé).
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Selon Diango Cissé ; « le sanakoungna impliqué une entraide totale. Ce qui appartient à l’un appartient à l’autre. L’assistance est obligatoire dans de nombreux cas : prestation alimentaire, logement, secours en cas de guerre ». (Dans le cas des Kakolo et Diawambé, des Dogons et Bozos, tout acte de courtoisie amoureux est formellement interdit). Diango Cissé poursuit : « cette assistance joue même dans les poursuites judiciaires où une solidarité s’impose. Ce cas est si bien connu que le témoignage d’un sanankoun, n’a pas beaucoup de poids. » Sogo Sogo Simbo fut un homme bon, juste, respectueux de la différence.
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La fin d’un démocrate :
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Aujourd’hui, on l’appellerai un démocrate. En tout cas, son nom résonnera dans nos hameaux, villes et villages aussi longtemps que vivra le Mali éternel. C’est par des notes musicales empreintes d’amertume que les griots font revivre les derniers moments de la vie tumultueuse de Soundjata. Il mourut noyé dans le Sankarani, apprend on d’un côté. Par ailleurs, certaines sources soutiennent que l’empereur du Mali trouva accidentellement la mort au Sambourou (Nara) blessé par une flèche décrochée involontairement sur lui par un peul nommé Bira Boli. Enfin , Wa Kamissoko donne une version plus proche de la vérité : « il s’éteignit sur son lit » après avoir laissé à la postérité un testament politique d’une grande importance.
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Moussa Fofana Conseiller Pedagogique à la retraite
Formateur au College Moderne de Sincina
rnLe Segovien du 14 Aout 2007
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