Moussa Fofana est un vieux routier de l’enseignement. Originaire de Nara et installé à Koutiala où nous l’avions connu, l’ex Conseiller Pédagogique est à la retraite de nom puisqu’il est Formateur au Collège Moderne de Sincina. Vous aviez découvert plusieurs de ses œuvres dans ces colonnes. Notre collaborateur animera désormais une rubrique intitulée « POINT D’HISTOIRE » qui servira de repère pour notre génération.
DIAKA, PREMIER HABITAT DES SONINKE OU LA FONDATION DES COLONIES
Enfin, quand Mama Dinga et ses compagnons parvinrent au terme de leur long déplacement ils choisirent comme premier habitat Diaka (Macina) du nom du bras du fleuve Niger allant de Diafarabé au lac Débo. Ils y fondèrent les localités de Djénné-Djeno (l’ancien site de Djenné, situé à deux kilomètres au Sud Est de la ville actuelle) ensuite de Dia, (il y a plus de cinq mille ans, sûrement l’une des plus anciennes villes de notre pays) enfin Choua (Assouan), et Saye. Ce village est maintenant habité par les Bamanans. Mais il faut comprendre que la région de Ségou fut d’abord un pays Marka avant d’être envahie par d’autres groupes ethniques : Peuls et Bamanans.
Ces derniers, venus du Nord de la Côte d’Ivoire, séjournèrent dans la zone de Djenné avant de venir occuper celle de Ségou en cohabitation avec les Soninkés et à une époque relativement récente (fin du seizième siècle). Ils se fixèrent en quatre endroits (Sékôrô, Sébougou, Sékoura et Ségou Sikôrô) à côté de neuf célèbres villes Marka (1-Dougouba ou Marakadougouba, anciennement désignée sous le nom de Taa. 2-Kokou. 3-Kirango Markala. 4-Boussin. 5-Togou. 6-Soké Markala. 7-Koyila. 8-Fougannin. 9-Sama Markala. « Le peuplement dans le pays de Ségou est très ancien. Bien des villages actuels reconnaissent s’être installés, il y a plusieurs siècles, sur d’anciens sites plus ou moins tombés en ruines. Parmi les plus anciens habitants de la région, on retient les Boso et les Marka » (Bazin Jean. Recherche sur les formations socio politiques anciennes en pays bamanan).
Diané (la petite Dia)
Aujourd’hui, elle s’appelle Djenné et fut créée bien plus tard par la tribu Sarakolé venue de Dia et dirigée par Nono (les Nononké). Les Bwa ou Bobo qui habitaient le plateau de Kanafa avant la fondation de la ville, en l’an huit cents, se retirèrent vers la zone non inondée c’est à dire Sévaré, Barbé, Konio, Madiama et leur pays actuel (Tominian, Boura, Mahou.) Partant des rives du Niger à l’Est, la migration Soninké s’effectua jusqu’aux confins du Sénégal à l’Ouest. Elle fut provoquée par quatre grandes sécheresses qui survinrent vers 1700, 700 et 220 avant Jésus Christ et en l’an 527 de notre ère. Pendant l’avant dernière sécheresse les Sarakolés abandonnèrent Diaka pour aller fonder des colonies agricoles dans le secteur où se trouvent aujourd’hui Bassikounou, Néma et Oualata en territoire mauritanien.
Ainsi, après plusieurs pérégrinations, Dinga parvint au lieu dit Daraga, dans le Kingui, près de la mare de Diokha, entre Nioro et Kayes. Il devient l’allié du génie de cette mare : Fatounganné. Cette alliance lui permit d’avoir des pouvoirs immenses. Dinga épousa les trois filles du génie : Katana Boro, Diagana Boro, Sananguilé Gouné Khousso. La deuxième fille de Fatounganné lui donna cinq fils : Maghan Diabé, Maghan Tané, Maghan Tané Fankanté, Maghan Mamari, Maghan Kaya.
La conquête du Ouagadou
Le Ouagadou est la province qui couvre la majeure partie du cercle de Nara. Il s’étend autour de Gounbou, la ville millénaire, son centre vital et occupe une bonne superficie du Sud Mauritanien. Ouagadou, dénomination retenue par la tradition orale signifie pays de la végétation et des troupeaux. Le nom authentique de cette zone ancienne est Kagorotan domaine des Kagoro ou autochtones. Ces aborigènes furent les ancêtres de ceux qui deviendront les Maninkas après l’exode des populations du Ouagadou vers le Mandé (Maninka, habitant de Mani, village créé après celui de Kirikoroni). Les Arabes l’appellent « Kwarizmi » (pays des Noirs) ou encore Ghana. D’où vient cette appellation ? Pendant la domination soninké, le territoire s’étendait des rives du fleuve Niger (Djoliba) aux bords du Sénégal (Bafing) jusqu’au Nord de leurs deux boucles divergentes.
A cause de sa puissance, le Tounka était glorifié par ses sujets du titre prestigieux « nwana » ou héros. C’est ce terme que la transcription arabe a changé en Ghana et qui a été attribué au pays. De leur côté, les habitants du Mandé qui ont abandonné la région l’appellent Baganna, pays des bagan ou animaux. A la mort de Dinga, le benjamin Diabé Cissé avait été choisi pour lui succéder. C’était au détriment de son aîné Térékhiné Sokhona. Ce dernier abandonna la troupe et alla s’installer ailleurs. Donc, quand le dernier fils du patriarche arrivait au Kagorotan, il était suivi de quarante quatre clans, des autres enfants de Dinga et de trois cent trois clans d’esclaves. Maghan Diabé entreprit alors la conquête du Ouagadou. Les Kagoro, redoutables guerriers s’opposèrent obstinément aux Soninkés en leur livrant d’effroyables combats. De nombreuses populations du Ouagadou choisirent l’exode en Gambie (Fabalidoumbè, lieu mystique situé à Niani sur Gambie), au Mandé, au Kaarta.
La constitution de l’empire
Après la longue période des Boula, Diabé fut le premier soninké et ce sont les Wagué, descendants de Dinga Khôrè qui se succèderont au trône de la création de l’empire à sa disparition. Ils étaient surnommés Tounka, Maghan, Ouagadou Niamey. Les Wagué savaient faire preuve de retenue et de dignité. Ils n’avaient pas amassé de fortunes pour eux mêmes. Ils regroupaient les clans suivants : Sokhona, Touré, Diané, Khouma, Cissé, Bérété.
La plupart portaient des noms significatifs : Touré (éléphant), Diané (fouet, par extension gouma ou bâton de commandement de Garabara Diané au moment de la migration soninké), Bérété (aujourd’hui Berthé) signifie « tout petit dans la langue des Kagoro ».
Les Bérété étaient les enfants métis de Mama Dinga. Le premier Tounka de ce clan qui montait sur le trône n’avait pas atteint la majorité, d’où ce nom Bérété. Les Cissé ont été les plus illustres ayant portés l’empire à son apogée. Ici, nous faisons allusion à Kaya Maghan (ou plus exactement Kangué Maghan). Kangué (or), Maghan (roi ou empereur), Cissé (propriétaire du cheval blanc ; Si veut dire cheval en soninké). Kaya Maghan Cissé était le fils de Bentigui Doucouré. D’après les traditions locales rapportées par Delafosse « le roi du clan Kara qui régnait vers la fin du huitième siècle, tua pour une raison futile un Soninké nommé Bentigui Doucouré, serviteur préféré du Premier Ministre, chef du clan Gama. Ce dernier cacha alors la veuve de Bentigui qui était enceinte.
Puis, lors de la naissance de son fils, il alla le cacher au loin dans un campement de cultures. Cet enfant, devenu homme tua l’assassin de son père et prit le pouvoir sous le nom de Kaya Maghan Cissé ». Il est bon de citer en plus de Diabé Cissé et Kaya Maghan, certains empereurs qui méritent d’être connus ; Tounka Ménin, Tounka Bessi, Tounka Kamissa. Le Tarikh El Fettach donne la description des écuries royales de cet empereur « chacun des mille chevaux ne se couchait que sur une natte. Chacun portait au cou et à la patte une corde de soie. Chaque cheval disposait d’un pot en cuivre pour uriner et avait auprès de lui trois personnes attachées à son service….. ».
Il faut souligner aussi que les Sokhona, descendants de Dinga et de Térékhiné n’ont pu régner que par quelques empereurs comme Djambéré Sokhona. Pour terminer, notons que le cheval (si en soninké) fut une pièce maîtresse dans les guerres de conquête et l’expansion du Ouagadou. A Koumbi Djoufé ou encore Koumbi Djoufi située à soixante treize kilomètres de l’Ouest de Nara et à Khoronga dans la direction de Nioro se trouvait la cavalerie de l’empire. Les enfants de ces guerriers montés sur des chevaux sont aujourd’hui les Sylla, Simaga (cheval royal), Sissako, Sadessi, Cissé, Simpara, Souaré, Yaressi, Gandessi.
(Prochainement : Le Pèlerinage de la Diaspora des Diarra à Ségou)
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