Discours de Dakar du Président Français : Adame Bâ Konaré bat le rappel des historiens

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L’historienne malienne, Adame Bâ Konaré a, au cours d’un point de presse hier, expliqué les motivations de son projet « Appel aux historiens », en réaction au discours annihilant du président français sur l’histoire du continent africain, le 26 juillet dernier à Dakar. Un projet ambitieux dont la finalité est de « mettre Sarkozy à niveau de connaissance de l’histoire africaine » à travers la publication d’un ouvrage sur les vérités historiques du continent africain.

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Dans une allocution sidérante prononcée à Dakar, Nicolas Sarkozy, qui ose tout, a dévoilé le fond d’une pensée qui, si les mots ont un sens, est la parole officielle française la plus raciste depuis longtemps. Chimiquement pure. Ainsi donc, dira-t-il, dans la prestigieuse Université Cheikh Anta Diop, sans scrupules, que « le drame de l’Afrique, c’est que l’homme africain n’est pas assez entré dans l’histoire. Le paysan africain […] dont l’idéal de vie est d’être en harmonie avec la nature, ne connaît que l’éternel recommencement du temps rythmé par la répétition sans fin des mêmes gestes et des mêmes paroles. Dans cet imaginaire où tout recommence toujours, il n’y a de place ni pour l’aventure humaine ni pour l’idée de progrès. Dans cet univers où la nature commande tout, [ il ] reste immobile au milieu d’un ordre immuable où tout semble être écrit d’avance. Jamais l’homme ne s’élance vers l’avenir. Jamais il ne lui vient à l’idée de sortir de la répétition pour s’inventer un destin ».

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Un choc, voilà ce qu’a ressenti l’historienne malienne Adame Bâ Konaré en lisant ce discours. « Quand, j’ai reçu ce discours, je suis devenue perplexe. Des choses graves ont été dites dans ce discours et compte tenu de la gravité de ces mots, j’ai dit qu’il faut réagir. Il fallait sortir de l’émotion », a expliqué Mme Konaré au cours d’un point de presse hier.

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Et pour lier l’acte à la parole, Adame Bâ a initié un projet d’Appel aux historiens qui s’articule autour de deux axes. D’abord, scientifique, car aux yeux de l’ex-première Dame, « ces affirmations de Sarkozy reposent sur les théories hégéliennes qui disaient que l’Afrique n’avait pas d’histoire et qui faisaient état de l’immobilisme du continent, des bienfaits de la colonisation… »

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Ce projet vise donc à interpeller les historiens à écrire, chacun dans son domaine spécifique, des articles argumentés qui seront compilés en un grand ouvrage à l’intention de Sarkozy et du peuple français. « Ce combat pour l’historicité de l’Afrique était pour nous révolu. Mais, aujourd’hui, il nous faut mettre Sarkozy à niveau de connaissance de l’histoire africaine en dévoilant sa pseudo théorie et sa démarche statique ».

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Ensuite, pour y parvenir, Adame Bâ met l’accent sur l’aspect militant. Il s’agit, à travers ce deuxième  axe, de créer un Comité de défense de la mémoire de l’Afrique, « un véritable rempart contre toute atteinte à la mémoire du continent et nous ferons feu de tout bois », a-t-elle souligné. Pour elle, « le rôle de l’historien n’est pas de juger, de polémiquer mais de rendre compte des faits. Nous ne laisserons plus personne écorcher la mémoire du continent », a-t-elle prévenu. Question d’un confrère, ne pensez-vous pas que ce débat sur l’histoire africaine vient tardivement ? « Il n’est pas tard », a laissé entendre Adame Bâ pour qui, « la politique de rupture prônée par Sarkozy n’a rien à voir avec les vérités historiques. Sarkozy veut venir en sauveur pour libérer les peuples africains de tous leurs maux ».

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Notre dignité d’abord…

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Autre question : Pourquoi perdez-vous votre temps à répondre à Sarkozy alors que le continent fait face à d’autres maux plus urgents ? « C’est important car c’est une question de dignité. Le sens de l’histoire, c’est la recherche du bien-être, de la dignité. Comment peut-on dire que l’Afrique est un continent immobile quand on sait que l’Afrique est le berceau de l’humanité et que le premier homme a marché en Afrique ? », s’est interrogée la présidente de la Fondation Partage. Et d’ajouter : « Ce sont des thèses à pallier avec des arguments scientifiques. C’est à cela que j’invite mes collègues ».

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« A quoi servent ces considérations d’arrière-zinc ? A parler de la colonisation bien évidemment. Oh, certes, cruelle ! Mais que l’on se rassure, si terrible qu’elle soit, la colonisation a ouvert les cœurs et les mentalités africaines à l’universel et à l’Histoire », paroles de Sarkozy. Réaction d’Adame Bâ : « Il ne réalise pas la gravité de ce qu’il dit. On ne fait pas le bien pour le proclamer. Et ça, c’est une valeur africaine qui renvoie à l’humilité et qu’on pourrait enseigner à nos enfants ».

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Faisant référence à l’école méthodique ou positiviste de la IIIe République en France, les écrits d’Ibn Batuta, les concepts de Ki-Zerbo, Adame Bâ dira qu’ « il faut normaliser la pensée africaine ». Selon elle, « nous avons perdu notre mémoire historique, faute de l’avoir entretenue. Tant que nous ne mettrons pas la veille, je crains que notre histoire ne s’émousse. Les historiens sont interpellés pour redynamiser la conscience historique africaine ».

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Prenant exemple sur les attaques contre les juifs, les Arabes et la manière dont ils ont riposté, historiquement parlant, Adame Bâ a réitéré son appel aux historiens et à toutes les autres disciplines. « Tant qu’on ne défend pas notre dignité, notre mémoire historique, nous risquons d’être pulvérisés par cette mondialisation cruelle », a-t-elle averti.

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Le projet d’Appel aux historiens a, aux dires de son initiatrice, recueilli près de 170 réactions de par le monde entier. Tous ont manifesté leur indignation face à ces dérapages verbaux de Sarkozy et salué cette initiative de l’ancienne première Dame du Mali de 1992 à 2002. L’historienne vieillissante, comme elle se définit elle-même, dit pouvoir compter sur la presse pour porter loin cette riposte des historiens africains contre l’ignorance historique de Sarkozy sur le continent africain.

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Etaient présents à la conférence de presse, l’ethnologue Filifing Sacko, l’historien Doulaye Konaté, le journaliste Cheick Mouctari Diarra et plusieurs autres personnalités.

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Sidiki Y. Dembélé

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De l’intox, rien que de l’intox…

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A quelques mois des dernières législatives, des rumeurs faisaient état de la candidature de Mme Adam Bâ Konaré dans la circonscription de Kati sous les couleurs de l’Adema. Des journaux en avaient, d’ailleurs, fait leur chou gras et la nouvelle avait vite fait le tour de la capitale. De l’intox, rien que de l’intox. Interrogée Adam Bâ a été on ne peut plus clair, « pour être honnête et franche, je défie qui que ce soit de dire que je l’ai approché pour être candidate. Personne, non plus, ne m’a approché et ça ne m’est jamais venu en tête », a-t-elle fait savoir. Et d’ajouter à l’intention des journalistes, « le jour où je déciderai d’entrer dans la danse, je vous ferai savoir moi-même ». Pour l’heure, l’historienne et l’ancienne Première dame du Mali, est plutôt préoccupée par la correction de la gifle de Sarkozy à l’histoire et aux historiens africains.

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S. Y. D.

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