Faut-il le rappeler Choguel Maïga dans son livre intitulé « Les rebellions au nord du Mali » les officiers subalternes qui ont pris le pouvoir le 19 novembre 1968 n’étaient pas aussi inexpérimentés comme certains l’ont soutenu. C’est avec discernement qu’ils évaluaient l’héritage légué par le régime de l’US-RDA pour en retenir ce qui est positif et rejeter ce qui a nui au peuple et rendu le régime impopulaire.
Concernant le nord du Mali, ils agissaient avec prudence. La région était maintenue sous administration militaire. Le capitaine Charles Samba Sissiko, chef de la subdivision de Kidal a été rappelé à Bamako à cet effet pour y être coopté au sein du CMLN. Il a été remplacé par l’un des dix officiers subalternes avec lesquels le général Abdoulaye Soumaré avait créé l’armée malienne : feu le lieutenant Ousmane Coulibaly.
Après leur reddition, les responsables de la rébellion de 1963, sur intervention d’Intalla Ag Attaher, n’ont pas été exécutés. Elladi Ag Alla et Zyed Ag Attaher, faits prisonniers, ont été transférés à la prison centrale de Bamako où ils ont retrouvé Mohamed Aly Ag Attaher Insar qui s’était réfugié au Maroc auparavant. Elladi Ag Alla parviendra à s’évader pour rejoindre l’Algérie via le Niger. Zyed Ag Attaher et Mohamed Aly Ag Attaher Insar ont attendu 1974 pour être libérés.
Donc, de la part des nouvelles autorités du pays, la fermeté affichée par Modibo Keïta a été maintenue. Ce qui a changé, ce sont les rapports avec la chefferie traditionnelle. Celle-ci avait été supprimée par Modibo Keïta comme il avait supprimé au sud, la chefferie de canton. Mais, à l’instar de la chefferie de village qu’il avait maintenu au sud, au nord, il avait également maintenu la chefferie de fraction. A l’égard des deux types de chefferie, la démarche du CMLN s’apparentait plutôt à celle des Français qu’à celle des responsables de l’US-RDA, particulièrement à cette politique définie par le chef de bataillon Bétrix, commandant de la région de Gao, sous la dénomination « principe de responsabilité ». Elle consistait à « donner aux nomades l’idée de discipline » pour les amener à se plier à l’autorité de l’État à travers la soumission à leur hiérarchie, à l’amrar en premier lieu, à l’Aménokal en second lieu, ce dernier étant placé sous les ordres du représentant de l’autorité centrale.
Ainsi, la féodalité que Modibo Kéïta voulait supprimer se trouve restaurée par Moussa Traoré. Les chefs de tribu ont conservé leurs privilèges. Pour agir sur le milieu nomade, l’État passait par leur intermédiaire. Ce sont eux qui recevaient les dons pour les répartir ensuite à travers un réseau de clientélisme. En contrepartie, ils agissaient sur leurs « sujets » pour les contraindre à la discipline. Si l’un d’eux s’écartait, l’Aménokal le mettait aux arrêts pour le remettre au représentant de l’autorité centrale avant d’intervenir, quelques jours après, afin de négocier et d’obtenir sa libération.
En 1979, l’UDPM a été créée. Parti unique et constitutionnel, il se voulait un creuset de la Nation. Les nomades ont évité l’erreur commise de 1945 à 1955 en s’abstenant de faire de la politique. Tous les chefs de tribus, rassurés par le maintien de leurs privilèges, adhéraient au nouveau parti politique. Ainsi, se sont retrouvés secrétaires généraux de section UDPM : Intalla Ag Attaher (Kidal), Bajan Ag Hamadou (Ménaka), Nok Ag Athia (Diré), Mohamed El Mehdi Ag Attaher Insar (Goundam), Mohamedoun Ag Hamani (Tombouctou), Boudama El Kounti (Gourma-Rharouss). Trois grandes confédérations touaregues occupaient le devant de la scène : celles des Kel Adagh, des Oulliminden et des KelAntessar.
Cette configuration politique ne s’est pas faite sans créer un certain déséquilibre avec les populations noires. Dans la plupart des sections, celles-ci, par leur nombre, sont majoritaires. Mais, compte tenu du fait que l’on compte un comité UDPM par fraction nomade et un comité UDPM par village sédentaire, le nombre de fractions nomades l’emporte de loin sur le nombre de villages. De ce fait, la représentation des populations au sein des instances et organes politiques de base du Parti n’a pas reflété la réalité sur le terrain : minoritaire sociologiquement, les Touaregs et les Arabes, en termes de représentativité, devenaient par ce jeu, politiquement plus nombreux que les populations noires.
Au vu de ce qui précède, la thèse selon laquelle les Touaregs se trouvent marginalisés par rapport aux Négro-Africains se trouve dépourvue de fondement. Cependant, elle a été l’un des prétextes avancés par les rebelles pour reprendre les armes contre l’État central en 1990, après une phase de maturation.
Nous allons retenir du Général Moussa Traoré ce grand homme qui a pendant 23 ans fait de l’armée malienne des lions (waraba). Il a équipé l’armée pour être l’une des meilleures en Afrique. C’est lui qui a doté le Mali de deux grands barrages hydroélectriques à savoir celui de Sélingué et celui de Manantali. C’est lui qui a fait revenir le Mali en juin 1984 dans l’Union Monétaire Ouest Africaine (UEMOA) faisant disparaitre les signes du franc malien. C’est en 1983, qu’il a créé la télévision nationale. C’est lui qui a bitumé la route de Sévaré-Gao. De cette date à maintenant aucun régime fut-il démocratique, n’a pu réhabiliter cette route dont se plaignent les citoyens de nos jours.
Un règne, quel qu’il soit n’a pas la même longueur de vie qu’une barre d’or. Le Match final du 19 novembre 1968 vient de se jouer entre les deux Moussa (Traoré et Koné) des cousins à plaisanterie. C’est Moussa Koné qui aura gagné le pari. Qui mieux que lui doit lire l’oraison funèbre de son homonyme ?
Le seul regret qu’il a éprouvé en quittant cette terre, c’est le fait que les Touaregs ont détaché la région de Kidal du Mali, alors qu’il a juré que tant qu’il est en vie, Kidal sera toujours malien, tel n’est pas le cas aujourd’hui.
Son regret est également le fait que le parti unique à doter et doper l’armée malienne en formation et en équipements russes, la démocratie, une fois installée a démantelé nos outils de défense. Mais à la fin de la conversation, il a dit que l’armée malienne et les hommes politiques ont refusé de mener la bataille de Kidal bien qu’il y a plus de 60 généraux actifs dans les rangs.
Pour lui, tant que cette bataille n’est pas menée à son terme, le Mali ne récupéra jamais Kidal. Dans son dernier souffle, il a reconfié cette mission aux généraux maliens afin de redorer leur blason en récupérant Kidal. Ce combat vaut la peine d’être mené doit se faire. Il fut l’homme d’État le plus glorieux après l’empereur Kankou Moussa. Sous son régime le Mali était pauvre, mais prospère
Dors en paix mon Général d’Armée, tu as mérité de la Patrie!
Badou S KOBA
Dors en paix le général .
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