«Le problème avec le monde c’est que les gens intelligents sont pleins de doute, alors que les imbéciles sont pleins de certitudes.» (Charles Bukowski).
Sans en avoir la grandeur et l’importance requises, la sortie médiatico- politique du président français Emmanuel Macron défraie aujourd’hui la chronique dans pratiquement tous les coins et recoins de Bamako. En fait, Macron a pris sur lui la mesure de reconnaître à la face de l’Afrique et du reste du monde la responsabilité majeure de la République française dans les drames survenus au Rwanda, en 1994 et en Libye, en 2011. C’était jeudi le 25 mars 2021.
Si pour une bonne partie des populations africaines la reconnaissance du président français du rôle de la France dans le génocide des Tutsis au Rwanda et dans la furie meurtrière en Libye, est l’expression parlante du regret de la France quant à son rôle dans ces événements tragiques sur le sol africain, pour l’infime minorité d’hommes critiques du continent africain, la France, loin de regretter tant soit peu le rôle qu’elle a joué dans ces conflits en Afrique, ne fait que changer le fusil d’épaule.
Le moins que l’on puisse redire du jeu que la France n’a cesse de mener en Afrique, c’est que de la traite négrière à nos jours, en passant par les années sombres de la colonisation française chez nous, elle n’a été mue que par un seul gage: celui de spolier, de tuer et de galvauder en Afrique nos paisibles populations pour des intérêts sordides inavouables.
Pour assouvir ses sales besognes en Afrique, la France, par ses gouvernements successifs, ne fait que chanter la rhétorique chanson de la démocratie supposée par eux comme le moyen de construire les paradis terrestres sur notre continent. Cette chanson qui abuse du caractère pacifique de nos populations trompées par une race d’intellectuels et de dirigeants en mal de confiance et de crédibilité, a tout le mérite (si c’est là un mérite !) de réussir ses saloperies déconcertantes sur la terre libre de nos ancêtres. Se camouflant derrière son chapelet de règles de «démocratie», la France coloniale a su endormir bien de consciences africaines aux dépens de leurs intérêts fondamentaux. Ainsi, croient- elles aux fausses leçons de démocratie, de bonne gouvernance véhiculées chez nous par le colonisateur français d’hier et le néocolonialiste d’aujourd’hui !
Pendant ce temps, que Macron se détrompe: il y a des gens intelligents avertis en Afrique qui n’ont jamais cru un seul instant aux gesticulations des gouvernants français sur le devenir africain. L’on peut tout au moins dire qu’il y a énormément de doutes sur la volonté de la France de bien faire chez nous, quand bien même les aveugles y croient. Lisons attentivement ces lignes mémorables d’un grand de la plume soviétique : «Le problème avec le monde c’est que les gens intelligents sont pleins de doute, alors que les imbéciles sont pleins de certitudes.» (Charles Bukowski).
Que la France soit complice, en 1994 du génocide de la minorité tutsi, sous la barbe de «l’Opération turquoise» des troupes françaises, cela se passe de tout commentaire. Pour quel intérêt, seul le pouvoir colonial français le sait ! Le peuple rwandais a perdu des centaines d’hommes et de femmes lors de cette sale guerre qu’on lui a imposée.
En 2011, le président français Nicolas Sarkozy a fait appel à ses collabos de l’Europe capitaliste et des USA pour tuer des milliers de Libyens dont le charismatique et intraitable guide de la Révolution Mouammar Kadhafi. La suite n’échappe à personne: les quarante (40) tonnes d’armements larguées dans le désert libyen par la France ont servi de moyens matériels pour ensanglanter le Sahel. C’était pour (entre autres) tuer l’initiateur de l’Union africaine (UA) parce que l’OUA a montré toutes ses limites objectives dans la construction d’une Afrique respectable et prospère.
Pour Kadhafi et donc pour tous ceux des Africains qui se battent pour le bien-être des peuples d’Afrique, il faut absolument l’indépendance monétaire et donc économique du continent africain. Pour arrêter le cours de l’histoire, à la demande de la France Sarkozy a demandé l’intervention directe des troupes de l’OTAN en Libye. Tenez-vous bien !
Selon des sources dignes de foi, en sept mois de guerre contre ce pays d’Afrique l’OTAN a effectué sur le territoire libyen 30 000 missions dont 10 000 d’attaques. Plus de 40 000 bombes et missiles ont été largués sur le peuple travailleur de Libye. À l’poque, la France de Sarkozy s’est enfermée dans les bluffs sans queue ni tête parce que faisant croire que le guide libyen tuait son peuple. Mais les intelligents avaient déjà compris qu’autant l’épervier ne saurait protéger les poussins de la basse-cour, autant la France ne peut œuvrer pour le bonheur du peuple travailleur de Libye. Au-delà des atrocités commises en Libye, la France et l’OTAN ont balisé la route pour les trafiquants d’êtres humains vers l’Europe. Il s’en est suivi que le Sahel a été transformé en poudrière, en no man’s land. Les victimes de ce chaos orchestré par la France et ses suppôts occidentaux et afro-arabes se comptent désormais par centaines de milliers.
Quand le président français reconnaît aujourd’hui la responsabilité de la France dans le désordre au Sahel, ce n’est là que bluff et mépris vis-à-vis de nos peuples. Comme l’avait fait d’ailleurs son prédécesseur François Hollande, en 2012 ! Pour justifier l’envoi de troupes françaises au Mali, Hollande a dit et répété que c’est pour payer une dette de la France à l’égard du Mali. Son complice malien n’était autre que l’illégitime président de transition Dioncounda Traoré. Le peuple malien saura bien faire la part des choses au moment venu ! Aujourd’hui, il n’est plus besoin de dire que la France fait bel et bien partie de la problématique de la rébellion et donc du terrorisme chez nous ; cela ne souffre d’aucun doute possible ! Et si des Maliens continuent à croire en la bonne foi de cette même France, c’est bien là le comble du ridicule.
Le physicien et écrivain allemand Albert Einstein disait: «Si vous avez un problème et que vous comptez sur la classe politique pour le résoudre à votre place, vous avez deux problèmes: on ne règle pas les problèmes avec ceux qui les ont créés.»
Après les atrocités commises en Libye et au regard de la présence de mercenaires étrangers sur le terrain comme ceux de Turquie, la France ne peut plus y faire la pluie et le beau temps notamment dans l’exploitation des multiples gisements de pétrole. Du coup, les Libyens ont réalisé que leur premier ennemi est sans doute le pouvoir colonial français. L’arroseur arrosé, la France, par la voix de son président, tente de redonner son blason en Libye et donc dans le Sahel. C’est bien là une grosse illusion qui n’a d’intérêt que pour les marchands d’illusions !
Il est aujourd’hui évident que partout où la France est ou était présente, il ne peut y avoir que du sang et non de la paix comme en témoigne d’ailleurs le cas de la Centrafrique. Sauf que les gouvernants français oublient ou feignent d’oublier qu’une nation qui en opprime une autre ne saurait être libre. La France cherche à s’accrocher parce que sentant que les Africains la comprennent bien mieux aujourd’hui.
La Libye ne sera jamais une propriété coloniale française, encore moins le Mali. Cette petite vérité, les Libyens l’ont comprise à bon escient. Tout comme le peuple malien réalise de plus en plus que tant que la France restera chez nous, il n’y aura pas la paix dans notre pays.
Aujourd’hui, nous pouvons dire avec juste raison qu’il n’y pas d’école de vérité dans le monde. La vérité du chat ne sera jamais la vérité de la souris et vice versa. Il en ressort que la France se nourrissant de nous, notre malheur est son bonheur et son malheur est l’expression de notre bonheur, tout comme la bourgeoisie et le prolétariat ne peuvent s’accommoder d’un intérêt commun.
De toute évidence, le mea-culpa de la France est une poudre toxique aux yeux des aveugles. La victoire finale sera celle conquise par nos masses laborieuses. N’en déplaise à tous ces bourreaux du Mali qui ont trahi leur propre peuple pour des intérêts sordides. L’audit de la nation est en marche !
Elle se fera malgré la mauvaise foi des déprédateurs du tissu socioéconomique national.
Fodé KEITA